Algèbre d'un groupe fini 1407042 29164350 2008-05-01T12:41:10Z Ph.lalanne 62434 Restauration des [[Projet:Restauration des ancres brisées|ancres brisées]] En [[mathématiques]], l' '''algèbre d'un groupe fini''' s'inscrit dans le cadre de la théorie des [[représentations d'un groupe fini]]. Une '''algèbre d'un groupe fini''' est la donnée d'un [[groupe fini]], d'un [[espace vectoriel]] de [[dimension]] l'ordre du groupe et d'une [[Base (algèbre linéaire)|base]] indexée par le groupe. La multiplication des éléments de la base est obtenue par la multiplication des index à l'aide de la loi du groupe, elle est prolongée sur toute la structure par linéarité. Une telle structure est une [[algèbre semi-simple]], elle dispose de toute une théorie dont le [[théorème d'Artin-Wedderburn]] est le pilier. Cette approche apporte un nouvel angle d'analyse pour la représentation des groupes. Elle permet d'établir par exemple, la formule de [[réciprocité de Frobenius]], le [[théorème d'Artin (représentation)|théorème d'Artin]] ou par exemple celui de [[théorème de Brauer|Brauer]]. ==Introduction== ===Nature de la démarche=== L'objectif est l'étude des représentations d'un groupe fini ''G'' sous un angle particulier. Dans un premier temps, une unique représentation est étudiée, la [[représentation régulière]]. L'ensemble de départ est linéarisé, c’est-à-dire qu'il est identifié à l'[[espace vectoriel]] sur le [[corps (mathématiques)|corps]] ''K'' de la représentation, le groupe devenant la base canonique de l'espace. Le [[homomorphisme de groupe|morphisme de groupe]] de ''G'' dans le [[groupe linéaire]] de l'espace vectoriel est prolongé par linéarité. On obtient une structure d'[[algèbre associative]] sur un corps [[commutatif]], noté ''K''[''G'']. Avec les [[Caractère d'une représentation d'un groupe fini|caractères]], cette approche est l'un des deux piliers de la [[théorie des représentations d'un groupe fini|théorie des représentations]]. Le [[théorème de Maschke]] démontre que si l'ordre du groupe n'est pas un multiple de la [[caractéristique d'un anneau|caractéristique]] du corps ''K'', l'algèbre est [[algèbre semi-simple|semi-simple]]. Cette structure, objet d'une vaste théorie, permet la démonstration de résultats variés grâce à ses nombreux théorèmes. L'un des plus importants est sans doute celui d'[[Théorème d'Artin-Wedderburn|Artin-Wedderburn]], il indique que, si le corps est algébriquement clos, ou si le [[polynôme]] ''X''<sup>g</sup> - 1 est scindé, l'algèbre est isomorphe à une [[somme directe]] d'algèbres des endomorphismes sur des ''K''-espaces vectoriels de [[dimension]] finis. Ici ''g'' désigne l'ordre du groupe. L'algèbre d'un groupe opère sur toutes les représentations, il suffit de prolonger le morphisme de groupe par linéarité. On obtient une structure de [[module sur un anneau|module]] où l'[[anneau (mathématiques)|anneau]] ''K''[''G''] opère sur l'espace vectoriel de la représentation. Une telle structure se nomme ''G''-module. Il existe une équivalence stricte entre la notion de ''G''-module et celle de représentation de ''G''. ===Applications=== L'essentiel des premiers résultats de la théorie des représentations est une conséquence directes des propriétés générales des algèbres semi-simples. On peut démontrer le caractère fini du nombre de représentations irréductibles, ou l'égalité entre l'ordre du groupe et la somme des carrés des dimensions des [[représentation irréductible|représentations irréductibles]]. Il est vrai que ces propriétés se démontrent souvent facilement à l'aide des caractères, sans l'adjonction d'une théorie riche mais parfois complexe. En revanche, certains de ces résultats se démontrent de manière plus aisée avec une approche par les algèbres semi-simples, c'est le cas du critère de [[réciprocité de Frobenius]]. Il existe des éléments propres aux algèbres qui sont indispensables à la théorie des représentations. Le [[centre (algèbre)|centre]] de l'algèbre ''K''[''G''] est naturellement une extension abélienne commutative du corps ''K''. Il est possible d'utiliser la notion d'[[entier algébrique]]. Cette remarque permet d'introduire une [[arithmétique]], qui s'avère incoutournable. Elle est utilisée dans cet article pour démontrer que toute représentation irréductible possède un degré divisant l'ordre du groupe. Dans le cas où ''g'' est un multiple de la caractéristique du groupe, la propriété fondamentale des caractères, à savoir l'aspect [[base orthonormale|orthonormal]] des caractères irréductibles disparait. L'algèbre du groupe perd aussi sa semi-simplicité. En revanche la théorie des anneaux semi-simples et particulièrement le concept de [[radical de Jacobson]] permet d'élucider la nature des représentations. ==Définitions== ===Algèbre d'un groupe=== {{Article détaillé|Algèbre semi-simple}} Les notations suivantes sont utilisées dans tout l'article. ''G'' désigne un groupe fini noté multiplicativement, son élément neutre est noté 1 et son ordre ''g''. ''K'' est un corps commutatif de [[caractéristique d'un anneau|caractéristique]] soit nulle soit [[nombres premiers entre eux|première]] avec ''g''. :* La ''K''-'''algèbre du groupe''' ''G'', noté ''K''[''G''] est l'espace vectoriel des [[combinaison linéaire|combinaisons linéaires]] formelles des éléments de ''G'', il est muni de la multiplication suivante : <center><math>\forall (a_s)_{s\in G}\in K^G \; \forall (b_t)_{t\in G}\in K^G \quad (\sum_{s\in G} a_s.s)(\sum_{t\in G} b_t.t)= \sum_{s\in G}\sum_{t\in G} a_sb_t.st =\sum_{s\in G} (\sum_{t,u \in G \mid tu=s} a_t b_u ) s </math></center> Une telle structure bénéficie de la propriété suivante : :* ''La structure ''K''[''G''] est celle d'une [[Algèbre sur un corps|algèbre]] associative sur un corps.'' Quelques définitions sont nécessaires, elle concerne les algèbres en général : :* Une algèbre est dite '''simple''' si les seuls idéaux bilatères sont {0} et l'algèbre elle-même. :* Un [[idéal]] est dit '''facteur direct''' si et seulement s'il existe un idéal bilatère [[sous-espace supplémentaire]]. :* Une algèbre est dite '''[[Module semi-simple|semi-simple]]''' si et seulement si toute sous-algèbre simple est facteur direct. Une algèbre de groupe possède la propriété suivante appelée [[théorème de Maschke]] : :* ''Si l'ordre du groupe n'est pas un multiple de la caractéristique du corps ''K'', alors l'algèbre du groupe est semi-simple.'' {{boîte déroulante|align=left|titre=Démonstration|contenu= :* '''La structure ''K''[''G''] est celle d'une [[Algèbre sur un corps|algèbre]].''' L'associativité de la multiplication interne est la conséquence de celle du groupe et de la multiplication du corps : <center><math>\forall (a_s)(b_t)(c_u)\in K^G \quad \Big(\sum_{s\in G} a_s.s\sum_{t\in G} b_t.t\Big)\Big(\sum_{u\in G} b_u.u\Big)=\sum_{s\in G}\sum_{t\in G}\sum_{u\in G}a_sb_tc_t.stu= \Big(\sum_{s\in G} a_s.s\Big)\Big(\sum_{t\in G} b_t.t\sum_{u\in G} b_u.u\Big)</math></center> La distributivité de la multiplication interne par rapport à l'addition est la conséquence de celle du corps et de l'espace vectoriel. Le calcul suivant démontre la distributivité à droite, celle de gauche est analogue : <center><math>\Big(\sum_{s\in G} a_s.s + \sum_{s\in G} b_s.s\Big)\sum_{t\in G} b_t.t=\sum_{s\in G}\sum_{u\in G}(a_s+b_s)c_t.st= \sum_{s\in G}\sum_{u\in G}(a_sc_t+b_sc_t).st= \Big(\sum_{s\in G} a_s.s\Big)\Big(\sum_{t\in G} c_t.t\Big) + \Big(\sum_{s\in G} b_s.s\Big)\Big(\sum_{t\in G} c_t.t\Big)</math></center> La compatibilité de la multiplication de l'anneau est de l'espace vectoriel est une conséquence de celle de l'espace vectoriel : <center><math>\forall \alpha,\beta \in K\;\forall (a_s)(b_t)\in K^G \quad \Big(\alpha.\sum_{s\in G} a_s.s\Big)\Big(\beta.\sum_{t\in G} b_t.t\Big)= \sum_{s\in G}\sum_{t\in G}\alpha\beta a_s b_t st =(\alpha\beta)\Big(\sum_{s\in G} a_s.s\Big)\Big(\sum_{t\in G} b_t.t\Big) </math></center> }} ===''G''-module=== {{Article détaillé|Module semi-simple}} :* Un module sur l'anneau de l'algèbre du groupe ''K''[''G''] est appelé un''' ''G''-module'''. Le théorème de Maschke démontre qu'un ''G'' module est semi-simple. En conséquence il bénéficie de la propriété suivante : :* ''En dimension finie, un module est semi-simple si et seulement si elle est [[somme directe]] de sous-module simples.'' La démonstration est donnée dans l'article associé. Cette propriété se transpose immédiatement à l'algèbre de groupe. La structure multiplicative de l'anneau restreint à ''G''x''V'' si ''V'' désigne le ''G'' module définit une représentation. Réciproquement tout morphisme d'une représentation se prolonge par linéarité sur ''K''[''G'']. En conséquence, il existe donc une équivalence stricte entre la notion de ''G''-module et celle de représentation. :* Soit ''V''<sub>1</sub> et ''V''<sub>2</sub> deux ''G''-modules, la notation''' ''hom''<sub>K</sub><sup>G</sup>(''V''<sub>1</sub>, ''V''<sub>2</sub>)''' désigne la ''K''-algèbre des morphismes de ''G''-module de ''V''<sub>1</sub> dans ''V''<sub>2</sub>. Un tel morphisme φ vérifie les propriétés suivantes: <center><math> \forall \alpha ,\beta \in \mathbb K \quad \forall a,b \in V_1 \quad \forall k \in \mathbb K[G]\quad \varphi (\alpha a + \beta b) = \alpha \varphi (a) + \beta \varphi (b) \quad et \quad \varphi (k.a) = k. \varphi (a) \quad </math></center> ==Propriétés== ===Représentation régulière=== {{Article détaillé|Représentation régulière}} On suppose dans ce paragraphe que la caractéristique de ''K'' est soit nulle soit première avec ''g'' et ''K'' est alors [[extension algébrique|algébrique]]. On suppose de plus que le [[polynôme]] ''X''<sup>g</sup> - 1 est scindé. La représentation régulière correspond à celle de l'algèbre de groupe. Par défaut, elle ne dispose pas d'une multiplication interne mais d'un morphisme de groupe de ''G'' dans le [[Groupe général linéaire|groupe linéaire]] de l'espace vectoriel ''V'' de dimension ''g''. Une analyse de la représentation apporte un éclairage important sur ''K''[''G'']. En particulier, on demontre que toutes les représentations irréductibles sont isomorphes à un ''G''-module, et plus précisement : :* ''Soient (''V'', ρ) la représentation régulière de ''G'' et (''W'', σ) une représentation irréductible de ''G'' de [[Théorie des représentations d'un groupe fini|degré]] ''d'', il existe exactement ''d'' sous espaces invariants ''V''<sub>i</sub> de ''V'', d'intersection nulle deux à deux, tel que la restriction ρ<sub>i</sub> de ρ à ''V''<sub>i</sub> soit une représentation isomorphe à (''W'', σ).'' La démonstration est donnée dans l'article associé. L'analyse de l'algèbre du groupe permet de comprendre plus profondément la structure de la représentation régulière. Une définition est néanmoins nécessaire : :* Un espace somme directe de copies d'un ''G''-module simple est dit '''isotypique'''. La somme directe de toutes les copie d'un ''G''-module simple est appelée '''composante isotypique''' du module simple dans le ''G''-module. La représentation régulière, isomorphe à ''K''[''G''] est un [[module semi-simple]] de [[Longueur d'un module|longueur]] fini. ''K''[''G''] est donc somme directe d'un nombre fini de sous-modules, correspondant à des représentations irréductibles. Soit (''S''<sub>i</sub>) une famille maximale de sous-modules non isomorphes deux à deux. Cette famille est finie et l'on note ''h'' son cardinal. La théorie des modules semi-simples indique que la composante isotypique de ''S''<sub>i</sub> ne contient que des représentations irréductibles isomorphes à ''S''<sub>i</sub>. Si ''d''<sub>i</sub> est le nombre de copies de ''S''<sub>i</sub> contenues dans une somme directe égal à la composante isotypique, alors celle-ci est notée <math>\scriptstyle S_i^{d_i}</math>. On dispose de l'isomorphisme suivant : <center><math>\mathbb K[G] \; \simeq \; \bigoplus_{i=1}^h S_i^{d_i}</math></center> La démonstration est donnée dans l'article [[Module semi-simple]]. ===Théorème d'Artin-Wedderburn=== {{Article détaillé|Théorème d'Artin-Wedderburn}} Avec les notations du paragraphe précédent, le théorème d'Artin-Wedderburn indique que : :* ''Il existe un isomorphisme d'algèbres entre ''K''[''G''] et la somme directe des ''h'' algèbres ''L''<sub>K</sub>(''S''<sub>i</sub>) des endomorphismes de ''V''<sub>i</sub> en tant qu'espaces vectoriels sur ''K''.'' <center><math>\mathbb K[G] \; \simeq \; \bigoplus_{i=1}^h \mathcal L_{\mathbb K}(S_i)</math></center> Cet isomorphisme montre par exemple que si (''d''<sub>i</sub>) est la famille du paragraphe précédent, c'est aussi la dimension de ''S''<sub>i</sub>, on retrouve l'égalité suivante : <center><math>g=\sum_{i=1}^h d_i^2\;</math></center> Il est toute fois possible de déterminer l'isomorphisme directement, sans utiliser le théorème. La démonstration est donnée dans la boîte déroulante. {{boîte déroulante|align=left|titre=Démonstration|contenu= Construction de l'isomorphisme : Soit ''k'' un entier entre 1 et ''h'' et ψ<sub>k</sub> une représentation irréductible de ''S''<sub>k</sub>, c’est-à-dire un morphisme de groupe entre ''G'' et ''GL''(''S''<sub>k</sub>). Soit φ<sub>k</sub> le prolongement de ψ<sub>k</sub> par linéarité à ''K''[''G''] dans ''L''(<sub>k</sub>) et enfin φ l'application de ''K''[''G''] dans la somme directe des ''L''(''S''<sub>i</sub>) qui à ''x'' associe le produit des φ<sub>i</sub>(''x'') pour ''i'' variant de 1 à ''h''. L'application φ est un morphisme d'algèbre, montrons qu'il est bijectif. Surjectivité : Il suffit de montrer que φ<sub>k</sub> est surjectif si ''k'' est un entier entre 1 et ''h''. Soit (f<sub>nm</sub><sup>k</sup>) la matrice de φ<sub>k</sub> dans une base quelconque de ''S''<sub>k</sub>. Montrer que φ<sub>k</sub> est surjectif revient à montrer que si ''s'' décrit le groupe ''G'', alors φ<sub>k</sub>(''s'') est une famille génératrice de ''L''(''S''<sub>k</sub>). L'espace généré par les φ<sub>k</sub>(''s'') est de dimension celle de la famille des fonctions de ''K''<sup>G</sup> qui à ''s'' associe f<sub>nm</sub><sup>k</sup>(s) correspondant à ''d''<sup>k</sup> au carré coefficients de la représentation matricielle. Or le [[lemme de Schur]] ''(cf [[Lemme de Schur#Corolaire 4|corolaire 4]])'' montre la relation suivante : <center><math>\forall n,m,n',m' \in [1,d] \quad \frac{1}{g}\sum_{s\in G} f_{nm}^k(s). f_{n'm'}^k(s^{-1}) = \frac{1}{d}\delta_{nm'}\delta_{n'm} </math></center> Ce qui exprime l'orthogonalité des différents coefficients pour une forme bilinéaire. La famille des coefficients est libre, donc de rang le carré de ''d'' <sub>k</sub> si ce nombre désigne ici la dimension de ''S''<sub>k</sub>. La famille φ<sub>k</sub>(''s'') est donc de rang la dimension de ''L''(''S''<sub>k</sub>), ce qui montre la surjectivité. Injectivité : Les dimensions de ''K''[''G''] et du produits d'algèbres d'endomorphismes sont les mêmes et φ est surjective, ce qui démontre l'injectivité. }} ===Centre de l'algèbre=== {{Article détaillé|Action par conjugaison}} Un anneau important de l'algèbre de groupe est le [[Centre (algèbre)|centre]] ''D'' de ''K''[''G''], c’est-à-dire l'ensemble des éléments commutant avec tous les éléments de l'algèbre. La théorie des algèbres semi-simples indique que c'est un anneau isomorphe à ''K''<sup>h</sup> où ''h'' désigne le nombre maximal de représentations irréductibles non isomorphes deux à deux. Cette anneau est composée de la somme directe des homothéties dans ''L''(''S''<sub>i</sub>) si ''i'' varie de 1 à ''h''. <center><math>\mathbb K[G] \; \simeq \; \bigoplus_{i=1}^h \mathcal L_{\mathbb K}(S_i)\quad et \quad \mathbb D = \bigoplus_{i=1}^h \{f \in \mathcal L_{\mathbb K}(S_i) \; / \; \exists \lambda_i \in \mathbb K \quad f = \lambda_i.Id\} </math></center> Dans le cas d'une algèbre de groupe, il est possible de déterminer les éléments du centre par leur décomposition dans la base canonique (e<sub>s</sub>) où ''s'' décrit ''G''. On obtient la proposition suivante : :* ''Soit ''c'' une classe de conjugaison et ''d''<sub>c</sub> la somme des éléments de la base canonique indéxés par les éléments de ''c''. Le centre de ''K''[''G''] est l'espace vectoriel engendré par les éléments ''d''<sub>c</sub> lorsque ''c'' parcourt l'ensemble des classes de conjugaison.'' Le nombre ''h'' de représentations irréductibles différentes est donc égal au nombre de classes de conjugaison. Cette analyse fournit des résultats complémentaires de ceux obtenus par les caractères. Cette théorie indique que les caractères forment une [[base orthonormale]] de l'ensemble des [[fonction centrale d'un groupe fini|fonctions centrales]]. La relation entre les deux est établie par la proposition suivante, si ''C'' désigne l'ensemble des classes de conjugaison : :* ''L'application φ défini ci-dessous, de l'espace des fonctions centrales ''K''<sup>C</sup> dans le centre de ''K''[''G''] est un isomorphisme d'algèbre sur ''K''.'' <center><math>\forall f \in \mathbb K^G \quad \varphi (f) = \sum_{c \in C} f(c).d_c</math></center> Pour cette raison, on identifie généralement le centre de l'algèbre et l'ensemble des fonctions centrales. Le centre peut être vu de trois manières différentes, soit comme l'espace des fonctions centrales, soit comme une somme directe ''S'' d'algèbres d'endomorphismes d'espaces vectoriels ''L''<sub>K</sub>(''S''<sub>i</sub>), soit comme un sous-espace vectoriel de ''K''[''G'']. Si φ désigne l'isomorphisme de ''K''[''G''] dans ''S'', la relation entre les trois visions est la suivante, si χ<sub>i</sub> est le caractère de ''S''<sub>i</sub> et ''d''<sub>i</sub> la dimension de ''S''<sub>i</sub> : :* ''Soit ''u'' un élément du centre de ''K''[''G''] et ''u''<sub>s</sub> ses coordonnées dans la base canonique, l'image de ''u'' par φ est une somme directe d'homothéties sur ''S''<sub>i</sub> de rapport λ<sub>i</sub> avec :'' <center><math>\lambda_i = \frac{1}{d_i}\sum_{s \in G} u_s \chi_i(s)</math></center> {{boîte déroulante|align=left|titre=Démonstrations|contenu= :* '''Soit ''c'' une classe de conjugaison et ''d''<sub>c</sub> la somme des éléments indéxés par ''c''. Le centre de ''K''[''G''] est l'espace vectoriel engendré par les éléments ''d''<sub>c</sub> lorsque ''c'' parcourt l'ensemble des classes de conjugaison.''' Montrons que ''d''<sub>c</sub> est élément du centre : Tout automorphisme intérieur restreint à ''c'' est une [[permutation]] et donc laisse ''d''<sub>c</sub> invariant. En conséquence, si ''s'' est un élément de ''G'', ''sd''<sub>c</sub>''s''<sup>-1</sup> = ''d''<sub>c</sub> ou encore ''sd''<sub>c</sub> = ''d''<sub>c</sub>''s'', ce qui démontre que l'espace engendré par les ''d''<sub>c</sub> est inclus dans le centre. Réciproquement, montrons que le centre est combinaison linéaire des ''e''<sub>c</sub> : Il suffit de montrer que, si ''x'' est un élément du centre de ''K''[''G''], son écriture comme combinaison linéaire des vecteurs de la base ''G'' possède des coefficients égaux pour deux éléments ''s'' et ''t'' conjugués. Soit ''Aut''<sub>u</sub> un [[automorphisme intérieur]] tel que son image de ''s'' soit égal à ''t''. Soit ''p'' la [[Projecteur (mathématiques)|projection]] sur l'espace vectoriel engendré par ''s'' et ''t'' parallèlement à l'espace vectoriel engendré par les autres éléments de ''G''. Dire que ''x'' est un élément du centre revient à dire qu'il est stable par tous les automorphismes intérieurs, en particulier ''poAut''<sub>u</sub>(x)=''p''(x). Soit λ<sub>a</sub> le coefficient de ''x'' pour le vecteur ''a'' de la base ''G'', alors ''p''(x) est égal à λ<sub>s</sub>''s'' + λ<sub>t</sub>''t'', et il existe un élément ''v'' de ''G'' tel que ''poAut''<sub>u</sub>(x) soit égal à λ<sub>v</sub>''s'' + λ<sub>s</sub>''t''. L'égalité ''poAut''<sub>u</sub>(x)=''p''(x) montre que λ<sub>s</sub>''s'' et λ<sub>t</sub>''t'' sont égaux, ce qui termine la démonstration. :* '''Soit ''u'' un élément du centre de ''K''[''G''] et ''u''<sub>s</sub> ses coordonnées dans la base indicée par ''G'', l'image de ''u'' par φ est une somme directe d'homothéties sur ''S''<sub>i</sub> de rapport λ<sub>i</sub> avec :''' <center><math>\lambda_i = \frac{1}{d_i}\sum_{s \in G} u_s \chi_i(s)</math></center> Si φ<sub>i</sub> désigne la composante de φ dans ''L''<sub>K</sub>(''S''<sub>i</sub>), par linéaité, φ<sub>i</sub>(''u'') s'écrit de la manière suivante : <center><math>\varphi_i(u)=\sum_{s \in G} u_s\varphi_i(s)</math></center> La trace de l'application est égale à ''d''<sub>i</sub> fois le rapport de l'homothétie, et donc, si ''Tr''(φ<sub>i</sub>(''u'')) désigne la trace de φ<sub>i</sub>(''u'') alors elle est égale à ''d''<sub>i</sub>.λ<sub>i</sub> et donc : <center><math>d_i.\lambda_i= Tr(\rho_f)=Tr\left(\sum_{s \in G} u_s.\varphi_i(s)\right)= \sum_{s \in G} u_s \chi_i(s)</math></center> }} ===Orthogonalité=== La complémentarité des deux approches, par les caractères et par l'algèbre du groupe s'applique aussi sur les propriétés d'orthogonalité. Soit (''V''<sub>1</sub>, ρ<sup>1</sup>) et (''V''<sub>2</sub>, ρ<sup>2</sup>) deux représentations de ''G'' : :* ''Si χ<sub>1</sub> et χ<sub>2</sub> désigne les caractères de ρ<sup>1</sup> et ρ<sup>2</sup> et si les représentations (''V''<sub>1</sub>, ρ<sup>1</sup>) et (''V''<sub>2</sub>, ρ<sup>2</sup>) sont considérées comme des ''G''-module, alors l'égalité suivante est vérifiée :'' <center><math><\chi_1\, | \chi_2>=dim \; Hom_{\mathbb K}^G (V_1\, ,\, V_2)\;</math></center> En utilisant les notations précédentes, notons : <center><math>V_1 \simeq \bigoplus_{i=1}^h S_i^{n_{1i}}\quad et \quad V_2 \simeq \bigoplus_{i=1}^h S_i^{n_{2i}} \;</math></center> Le lemme de Schur démontre que dim Hom<sub>K</sub><sup>G</sup> (''S''<sub>i</sub>, ''S''<sub>j</sub>) = δ<sub>ij</sub> si ''i'' et ''j'' sont des entiers compris entre 1 et ''h'' et δ<sub>ij</sub> désigne le [[symbole de Kronecker]]. On en déduit : <center><math>dim \; Hom_{\mathbb K}^G (V_1\, ,\, V_2)=dim \; Hom_{\mathbb K}^G \Big(\bigoplus_{i=1}^h S_i^{n_{1i}}\, ,\, \bigoplus_{j=1}^h S_j^{n_{2j}}\Big)=\sum_{ij \in [1,h]} n_{1i}.n_{2j}dim \; Hom_{\mathbb K}^G (S_i\, ,\, S_j)=\sum_{i=1}^h n_{1i}.n_{2i} \;</math></center> La propriété d'orthonormalité des caractères irréductibles permet de conclure. ==Applications== ===Réciprocité de Frobenius=== {{Article détaillé|réciprocité de Frobenius}} Un bon exemple d'utilisation de la structure d'algèbre de groupe est donné par le critère de réciprocité de Frobenius. Il concerne un mode de construction de ''G''-module appelé [[représentation induite d'un groupe fini|représentation induite]]. Soit ''H'' un sous-groupe de ''G'' et ''W'' un ''K''[''H'']-module. Alors la structure suivante est le ''G''-module induit par ''W'' : <center><math>V\simeq K[G]\otimes_{K[H]}W \;</math></center> La représentation induite correspond, à une extension des scalaires ''K''[''H''] à l'anneau ''K''[''G''] sur le ''H''-module ''W''. Dans le cas où ''H'' est un [[sous-groupe normal]] de ''G'', le ''G''-module induit est l'équivalent d'un [[produit semi-direct]]. Le critère de réciprocité de Frobenius est une méthode simple pour calculer le produit hermitien du caractère d'un module induit. Si ψ désigne le caractère de la représentation θ issus du ''H''-module ''W'' et χ celui d'une représentation ρ de ''G'', si ''Ind'' ψ désigne le caractère d'une représentation induite, c’est-à-dire la représentation associée au module induit et ''Res'' χ le caractère de la restriction de ρ à ''H'', alors : <center><math><Ind_H^G\,\psi\,|\,\chi>_G=<\psi\,|\,Res_H^G\,\chi>_H \;</math></center> Elle se démontre en établissant un isomorphisme entre les deux structures de morphismes de ''K''-algèbre associée, l'égalité des dimensions permet de conclure. ===Entier algébrique=== {{Article détaillé|Entier algébrique}} Le centre de ''K''[''G''] est un anneau commutatif sur le corps ''K'', une extension des rationnels. En conséquence, il est possible de parler d' ''entier algébrique'' sur cet ensemble. Cet approche est largement utilisée pour l'analyse de l'algèbre d'un groupe fini, ce paragraphe est un exemple. Notons ''c'' les classes de conjugaisons et ''d''<sub>c</sub> la somme des éléments de ''c''. :* ''Soit ''u'' un élément du centre de ''K''[''G''] tel que toutes ses coordonnées dans la base (''d''<sub>c</sub>) soit entières (au sens algébrique) sur ''K'', alors ''u'' est un entier algébrique.'' Comme ''u'' est combinaison linéaire à coefficients dans les entiers algébriques des valeurs ''d''<sub>c</sub>, il suffit de montrer que ces valeurs sont des entiers algébriques. Soit ''a'' et ''b'' deux classes de conjugaisons, ''d''<sub>a</sub>''d''<sub>b</sub> est combinaison linéaire à coefficients entiers des ''d''<sub>c</sub>, en conclusion le ''Z''-module est de [[groupe abélien de type fini|type fini]], ce qui montre que la famille des ''d''<sub>c</sub> est composée d'entiers algébriques. Or, ''u'' est combinaison linéaire à coefficients entiers algébriques d'entiers algébriques, ce qui démontre le résultat. Avec les notations du paragraphe précédent, on dispose de la propriété : :* ''Soit ''u'' un élément du centre de ''K''[''G''] tel que toutes ses coordonnées soit entières (au sens algébrique) sur ''K'', alors le nombre suivant est un entier algébrique.'' <center><math>\lambda_i = \frac{1}{d_i}\sum_{s \in G} u_s \chi_i(s)</math></center> Considérons l'image de ''u'' par φ<sub>i</sub>, φ<sub>i</sub>(''u'') est un élément du centre de ''L''(''S''<sub>i</sub>), et φ<sub>i</sub> est un morphisme d'algèbre. En conséquence φ<sub>i</sub>(''u'') est un entier algébrique du centre de ''L''(''S''<sub>i</sub>), c’est-à-dire de l'espace des homothéties de ''S''<sub>i</sub>, isomorphe au corps ''K''. Le rapport de l'homothétie est donc un entier algébrique de ''K''. On en déduit la propriété suivante : :* ''Le degré ''d''<sub>i</sub> d'une représentation irréductible divise l'ordre ''g'' du groupe.'' Considérons l'élément ''u'' égal à la somme si ''s'' décrit ''G'' des éléments χ<sub>i</sub>(''s''<sub>-1</sub>).s, le caractère d'un élément de ''s'' est la trace d'un endomorphisme admettant ''X''<sup>g</sup> - 1 comme polynôme annulateur. La trace est donc somme de racines ''g''-ième de l'unité est donc à valeur dans les entiers algébriques. La fonction χ<sub>i</sub> est un caractère donc une fonction centrale de ''G'', ceci démontre que ''u'' est bien un élément du centre de ''G'' à coefficients dans la base ''G'' donc entiers algébriques. La proposition précédente s'applique et la valeur ''g''/''d''<sub>i</sub> est celle d'un entier algébrique, c'est aussi un nombre rationnel et donc un élément de ''Z''. Ce qui démontre que ''d''<sub>i</sub> divise l'ordre du groupe. === Groupe abélien === {{Article détaillé|Analyse harmonique sur un groupe abélien fini}} Si le groupe est abélien, il est aisé d'établir le [[caractère d'un groupe fini|groupe dual]] de ''G''. Il est fini et isomorphe à ''G''. L'algèbre du groupe complexe possède alors tous les outils de l'[[analyse harmonique]]. On définit une [[transformée de Fourier]] et un [[produit de convolution]], et les théorèmes comme l'[[égalité de Parseval]], le [[théorème de Plancherel]] ou la [[dualité de Pontryagin]] s'appliquent. Il existe de nombreuses application à l'analyse harmonique sur un groupe abélien fini, on peut citer en [[arithmétique]] la constitution d'outils comme le [[symbole de Legendre]], les [[somme de Gauss|sommes de Gauss]] utilisées pour la démonstration de la [[loi de réciprocité quadratique]] ou pour le calcul des [[période de Gauss|périodes de Gauss]] et la recherche des racines du [[polynôme cyclotomique]]. ==Notes et références== {{Représentation des groupes}} ===Liens externes=== * {{fr}} [http://www.math.jussieu.fr/~beck/td-grc-3.pdf Cours de représentation des groupes finis] par M. Broué de l'université de Paris VII * {{fr}} [http://perso.univ-rennes1.fr/daniel.ferrand/RepFinal.pdf Représentation linéaire des groupes finis, une introduction] par D. Ferrand de l'université de Renne * {{en}} [http://www.math.umn.edu/~webb/RepBook/Ch1-8.pdf Finite group representations for the pure mathematician] par Peter Web ===Références=== * {{Serre2}} * {{Hall1}} * {{Lang1}} * N. Bourbaki ''Algèbre, Chapitre VIII'' Paris, Hermann 1958 {{portail mathématiques}} [[Catégorie:Théorie des représentations]] [[en:Group ring]] [[ja:群環]] [[zh:群環]]