Bataille d'Austerlitz 7802 31774473 2008-07-21T20:48:45Z Zetud 25495 Orth., Typo., typos fixed: forcements → forcément [[Project:AutoWikiBrowser|AWB]] {{Infobox Conflit militaire | image = [[Image:Austerlitz-baron-Pascal.jpg|300px]] | légende = ''Napoléon à la bataille d'Austerlitz'' par [[François Gérard|François Pascal Simon]] | conflit = Bataille d’Austerlitz | guerre = [[Troisième coalition]] | date = [[2 décembre]] [[1805]] | lieu = 8 km à l'est de [[Brno]] | issue = Victoire française décisive | combattants1 = {{Empire français}} | combattants2 = {{Autriche Habsbourg}} <br/> {{Russie impériale}} | commandant1 = [[Napoléon Ier|Napoléon I{{er}}]] | commandant2 = [[Alexandre Ier de Russie|Alexandre I{{er}} de Russie]] <br/> [[Mikhaïl Illarionovitch Golenichtchev-Koutouzov|Mikhaïl Koutouzov]] <br/> [[Franz von Weyrother]] | forces1 = {{formatnum:73100}} hommes <br/> 139 canons | forces2 = {{formatnum:85700}} hommes <br/> 278 canons | pertes1 = {{formatnum:1288}} morts <br/> {{formatnum:6993}} blessés <br/> 1 drapeau | pertes2 = {{formatnum:16000}} morts ou blessés<br/> {{formatnum:11000}} prisonniers <br/> 185 canons <br/> 45 drapeaux | batailles = {{Troisième coalition}} }} La '''bataille d’Austerlitz''', (maintenant [[Slavkov u Brna|Slavkov]], en [[République tchèque]]) surnommée la « bataille des Trois Empereurs », se déroule le [[2 décembre]] [[1805]] au sud de la [[Moravie]] ([[République tchèque]]), et plus précisément entre [[Brno|Brünn]] et [[Slavkov u Brna|Austerlitz]]. Après neuf heures de combats, la [[Grande Armée (Premier Empire)|Grande Armée]] de [[Napoléon Ier|Napoléon I{{er}}]] bat les forces autrichiennes de l’empereur [[François Ier d'Autriche|François I{{er}}]] et celle du tsar [[Alexandre Ier de Russie|Alexandre]]. L'[[Angleterre]], bien qu'invaincue, reste seule, ce qui met fin à la [[troisième coalition]]. Outre son importance stratégique, cette bataille, ainsi que la campagne qui l'a précédée, menant la Grande Armée, de [[Boulogne-sur-Mer]] jusqu’à Austerlitz, est considérée comme le chef d'œuvre tactique de Napoléon Bonaparte, et, encore de nos jours, enseignée dans de nombreuses écoles militaires. Austerlitz semble être la seule bataille où Napoléon ait pu choisir le terrain, y amener l'ennemi et lui imposer son plan : la totalité des autres furent soit des batailles de rencontre plus ou moins improvisées ([[Bataille de Marengo|Marengo]], [[Bataille d'Iéna|Iéna]], [[Bataille d'Eylau|Eylau]], [[Bataille de Lützen (1813)|Lutzen]], [[Bataille de Dresde|Dresde]]), soit des forçages de positions où l'ennemi préféra attendre l'Empereur ([[Bataille de Friedland|Friedland]], [[Bataille de Wagram|Wagram]], [[Bataille de la Moskowa|la Moskowa]]). == Prélude == === La Paix d'Amiens et début des hostilités === En mars [[1802]], la [[France]] et l’[[Angleterre]], affaiblies par dix ans de guerre, signent à [[Amiens]] un [[Paix d'Amiens|traité de paix]]. Cependant, farouchement anti-français, le nouveau Premier ministre anglais [[William Pitt le Jeune|William Pitt]] ne respecte pas le traité de paix et refuse de quitter l’[[Malte|île de Malte]]. En mai [[1803]], l’Angleterre ouvre les hostilités en saisissant {{formatnum:1200}} bateaux de commerce français et hollandais dans les ports anglais sans [[déclaration de guerre]]. Les Français réagissent quelques jours plus tard en arrêtant tous les Anglais se trouvant en France<ref>Décret du 22 mai 1803.</ref> et Bonaparte mobilise son armée. === L’armée d’Angleterre et le camp de Boulogne-sur-Mer === Napoléon Bonaparte a déjà eu l’occasion de commander l’armée de Nord (ou des Côtes de l’Océan) en [[1797]]. Mais devant l’impréparation de ses troupes et la puissante flotte anglaise croisant dans le détroit du [[Pas-de-Calais]], il préfère mener la [[Campagne d'Égypte]]. En 1803, Napoléon, fort de son expérience, assemble ses corps d’armées tout le long du littoral français<ref>[[Charles Pierre François Augereau|Augereau]] à [[Brest]], [[Michel Ney|Ney]] à [[Étaples]], [[Jean Lannes|Lannes]] et [[Nicolas Jean-de-Dieu Soult|Soult]] à [[Boulogne-sur-Mer]], [[Louis Nicolas Davout|Davout]] à [[Ambleteuse]], [[Auguste Frédéric Louis Viesse de Marmont|Marmont]] à [[Anvers]] et à [[Amsterdam]] et [[Charles XIV Jean de Suède|Bernadotte]] à [[Hanovre]]</ref>. Pendant un an, la [[Grande Armée (Premier Empire)|Grande Armée]] s’équipe, s’entraîne, forme ses conscrits, sous l'encadrement d'officiers compétents. En effet, ces derniers sont le support de la Grande Armée : la plupart sont d’anciens simples soldats levés en [[1793]]<ref>Tous les officiers, et Napoléon lui-même, étaient d’anciens soldats de l’armée royale ou des conscrits de 1793. Ces derniers ont connu un avancement rapide à cause du départ des nobles de l’armée et aux pertes subies pendant toutes les guerres de la Révolution Française.</ref>, qui ont acquis en 1804 l'expérience du combat et gardent un attachement pour les nouvelles recrues. === La Troisième coalition : l'Angleterre, l'Autriche et la Russie === Les Britanniques ont certes une puissante flotte, mais leur armée de terre peu nombreuse, essentiellement composée de milices sans discipline est médiocre et faiblement armée. Conscient que cette armée serait incapable de s’opposer à la [[Grande Armée (Premier Empire)|Grande Armée]] une fois débarquée, William Pitt, le Premier Ministre britannique, décide pour éloigner la menace française d’invasion, de former fin [[1804]] une nouvelle coalition contre la France avec l’Autriche, la Russie et la [[Suède]] qui ne mènera dans la guerre qu’un rôle anecdotique<ref> Une petite armée anglo-suédoise devait débarquer en [[Allemagne]] pour inciter les États nordiques du [[Saint Empire Romain Germanique]] à la rébellion. Cette opération fut cependant abandonnée à cause de la faible motivation du gouvernement suédois. </ref> . Le tsar [[Alexandre Ier de Russie|Alexandre I{{er}} de Russie]], sacré en [[1801]], adhère à la coalition pour des raisons de prestige : vaincre l’empereur des Français confirmerait la puissance de la Russie en pleine expansion depuis cinquante ans (voir [[partitions de la Pologne]] et [[Traité d'Iaşi]] contre les [[Ottomans]]). L’empereur [[François Ier d'Autriche|François II]] connaît le talent de Napoléon, qui par deux fois a battu les armées autrichiennes en quatre ans (voir [[première coalition|première]] et [[deuxième coalition]]). Mais l’annexion de l’[[Italie]] du Nord par la France (Napoléon s’étant fait couronner roi d’Italie<ref> il se fait alors appeler « Sa Majesté empereur et roi », renforçant alors sa rivalité avec l’Empereur d’Autriche et roi de [[Hongrie]] : François II </ref>) et les premières tentatives pour réunir les États allemands sous protection française, domaine tenu par l’Autriche depuis des siècles, poussent François II à adhérer à la coalition. Enfin, toutes les cours européennes ont vivement réagi à l’exécution du [[Louis Antoine de Bourbon-Condé|duc d’Enghien]] et au [[Le Sacre de Napoléon|sacre de Napoléon]]. Le [[4 juillet]], la [[Russie]] et l’[[Autriche]] signent une convention de guerre où les Russes s'engagent à envoyer en Allemagne {{formatnum:140000}} hommes pour aider les {{formatnum:100000}} Autrichiens. Les Anglais, financeurs de la coalition, s'engagent à verser à leurs alliés {{formatnum:1250000 }} livres<ref> Il s’agit d’une somme énorme à l’époque : le gouvernement anglais a dû s’endetter auprès des banques britanniques pour fournir cet argent aux Russes et Autrichiens. </ref> pour {{formatnum:100000}} hommes mis en campagne. == Mouvements préliminaires == === La prise d’Ulm === [[Image:napoleon ulm.jpg|350px|thumb|right|La capitulation du général [[Mack]] et le défilé des troupes autrichiennes devant Napoléon, par [[Charles Thévenin]].]] À la mi-[[août]] [[1805]], la situation de Napoléon est difficile : les mouvements royalistes s’intensifient<ref>Loin d’avoir calmé les royalistes, l’exécution du [[Louis Antoine de Bourbon-Condé|duc d’Enghien]] a provoqué la multiplication des contacts entre les royalistes de [[Paris]] et le [[Louis XVIII de France|Comte de Provence]].</ref>. Malgré la vigilance de [[Joseph Fouché|Fouché]], le [[Trésor Public]] est vide<ref>en effet, les finances impériales sont sans liquidités : pris de panique face aux tensions internationales, les épargnants voulurent récupérer l’or confié à la [[Banque de France]]. La situation financière de l’Empire ne s’améliora qu’après la victoire d’Austerlitz.</ref>. De plus Napoléon apprend que l’amiral [[Pierre Charles Silvestre de Villeneuve|Villeneuve]], jugeant sa flotte trop faible par rapport à celle de [[Horatio Nelson|Nelson]], s’enferme à [[Cadix]] ; tandis que la [[Bavière]] (alliée de la France) est envahie par les troupes du général autrichien [[Karl Mack|Mack]]. Devant ces événements, Napoléon décide le 23 août de ''pirouetter'' son armée sur le [[Rhin]]. Le [[29 août]], 150&nbsp;000 fantassins, 40&nbsp;000 cavaliers et 350 canons déferlent du littoral pour gagner l’Allemagne avec une étonnante précision : chaque unité de la Grande Armée a un itinéraire et des lieux d’étapes précis à respecter. Cette marche forcée (jusqu’à 40 km par jour) à travers le nord de la France a pour but d’atteindre [[Vienne (Autriche)|Vienne]] avant que les Russes ne rejoignent les Autrichiens, et qu'ils ne bénéficient ainsi de la supériorité numérique. Le [[26 septembre]], après trois jours de repos, les ''7 torrents'' (pour les 7 corps de la Grande Armée) traversent le Rhin en direction de la Bavière envahie. Mack attend de pied ferme Napoléon à [[Ulm]], verrou de la route la plus courte entre le Rhin et [[Munich]], la capitale bavaroise, c’est-à-dire à travers la [[Forêt-Noire]]. Napoléon décide alors de contourner [[Ulm]] par le nord puis de couper Mack de ses arrières, en insérant les ¾ de son armée entre [[Ulm]] et la ville de [[Ratisbonne]], tandis que [[Jean Lannes|Lannes]] et la cavalerie de [[Joachim Murat|Murat]] font diversion en faisant croire aux Autrichiens que la Grande Armée est toujours en face d’eux. Après la victoire de [[Michel Ney|Ney]] à la [[bataille d'Elchingen]], Mack doit se replier avec ses 25&nbsp;000 hommes dans [[Ulm]]. Après une semaine de siège, la meilleure armée autrichienne se rend<ref> Seuls les simples soldats sont emmenés en France comme captifs : les officiers sont libérés en promettant qu’ils ne combattront plus les Français. </ref> et défile devant Napoléon. La route de [[Vienne (Autriche)|Vienne]] est ouverte. === L’entrée dans Vienne === Même si Napoléon a vaincu une première fois les Autrichiens, il est loin d’avoir vaincu l’ensemble des forces de la coalition : Napoléon poursuit l’armée russe de [[Mikhaïl Illarionovitch Golenichtchev-Koutouzov|Koutouzov]]. Au fur-et-à-mesure que celui-ci bat en retraite, il ne cesse de se renforcer tandis que la Grande Armée se dilue, à {{formatnum:1000}} km. de ses bases. En Italie, [[André Masséna|Masséna]] est incapable de battre l’archiduc [[Charles Louis d'Autriche|Charles]] malgré son écrasante supériorité numérique ; Napoléon doit alors se priver de [[Michel Ney|Ney]] et de [[Auguste Frédéric Louis Viesse de Marmont|Marmont]] qui partent pour le [[Tyrol]] (afin d’éviter que l’archiduc Charles n’échappe à Masséna puis menace l’aile droite de la Grande Armée). L’empereur des Français doit aussi se priver d’[[Charles Pierre François Augereau|Augereau]], car un autre archiduc, [[Jean-Baptiste d'Autriche|Jean-Baptiste]], tente de lever une armée en [[Bohême]]. Pis encore, la [[Prusse]] prépare son entrée en guerre et promet à [[Alexandre Ier de Russie|Alexandre {{Ier}}]] d’attaquer les Français à la mi-décembre<ref> Le tsar Alexandre et le roi de Prusse [[Frédéric-Guillaume III de Prusse|Frédéric-Guillaume III]] se réunissent secrètement fin octobre au [[Palais de Sanssouci|château de Potsdam]] et jurent de s’unir contre la France. </ref>. Le lendemain de la capitulation d’Ulm survient le [[Bataille de Trafalgar|désastre naval de Trafalgar]], mais Napoléon n’apprend cette nouvelle que le {{1er novembre}}. Après avoir libéré [[Munich]], la Grande Armée descend le [[Danube]] pour prendre Vienne et chercher la bataille décisive avec les Russes. Napoléon estime les effectifs de [[Mikhaïl Illarionovitch Golenichtchev-Koutouzov|Koutouzov]] à plus de {{formatnum:100000}} hommes. En fait, le [[maréchal (armée)|maréchal]] russe ne dispose que de {{formatnum:36000}} soldats fatigués renforcés par {{formatnum:22000}} Autrichiens démoralisés. Informé de la défaite d’Ulm, Koutouzov décide de battre en retraite pour faire liaison avec des renforts russes et autrichiens, malgré les suppliques de [[François Ier d'Autriche|François II]] pour défendre Vienne et il charge [[Pierre de Bagration|Bagration]], son meilleur subordonné, de couvrir sa retraite avec ses divisions. Pendant ce temps, Napoléon espère livrer bataille à [[Saint-Pölten]] ([[Sankt Pölten]]), mais le [[11 novembre]], Koutouzov, renforcé par {{formatnum:10000}} Autrichiens et ayant repris de l’assurance, fond avec {{formatnum:15000}} hommes sur la division de [[Adolphe Édouard Casimir Joseph Mortier|Mortier]], dans le défilé de [[Dürrenstein]]. Pris de front, de flanc et par l’arrière, les Français résistent et combattent à un contre trois, et mettent finalement hors de combat {{formatnum:2600}} Russes. Napoléon ordonne à [[Joachim Murat|Murat]] de prendre [[Vienne (Autriche)|Vienne]], l’accusant d’avoir laissé Mortier seul et de ne pas avoir contre-attaqué les Russes, tandis que [[Charles XIV Jean de Suède|Bernadotte]] franchit difficilement le [[Danube]] à cause d’une subite [[crue]] de fleuve. Le [[13 novembre]], Murat et [[Jean Lannes|Lannes]] prennent Vienne sans coup de feu. Les deux lieutenants de Napoléon parviennent alors à s’emparer du pont de bois de la ville en affirmant à l’officier chargé de le faire sauter qu’un [[armistice]] a été signé entre Napoléon et François II. Aussitôt, [[Jean-Baptiste Bessières|Bessières]] et [[Nicolas Jean-de-Dieu Soult|Soult]] franchissent le fleuve. Le lendemain, [[Joachim Murat|Murat]] attaque avec sa cavalerie l’arrière-garde de [[Pierre de Bagration|Bagration]]. Les Russes parviennent à s’échapper en employant le même stratagème : ils font croire à [[Joachim Murat|Murat]] qu’une négociation d’armistice est en train de se dérouler et celui-ci arrête son attaque. [[Image:kutuzov1.jpg|thumb|right|Le général [[Mikhaïl Illarionovitch Golenichtchev-Koutouzov|Mikhaïl Koutouzov]]]] [[Koutouzov]] arrive à [[Olmütz]] (maintenant [[Olomouc]]), en [[Moravie]], où il opère sa jonction le [[19 novembre]] avec la 2{{e}} armée russe du général Buxhowden et le corps autrichien du [[Jean Népomucène Joseph de Lichtenstein|prince de Lichtenstein]]. L’armée coalisée compte alors {{formatnum:86000}} hommes. Le surlendemain, Napoléon arrive à [[Slavkov u Brna|Austerlitz]], à 100 km de [[Vienne (Autriche)|Vienne]]. Il n’a plus que {{formatnum:73000}} hommes. == Le piège de Napoléon == Ce piège consiste à faire croire à l'ennemi que les forces de Napoléon I{{er}} sont trop faibles pour vaincre. Pour ce faire, il utilise de nombreuses ruses (organiser le repli de ses troupes lors d'affrontements ou d'escarmouches, demander à être reçu par les autres empereurs comme pour négocier, etc.). Les ennemis pensent alors que Napoléon ne dispose que de {{formatnum:40000}} hommes (au lieu de {{formatnum:73000}}). [[Mikhaïl Illarionovitch Golenichtchev-Koutouzov|Koutouzov]] n'en est pas persuadé mais les jeunes généraux (nobles ayant acheté des charges, donc peu expérimentés) veulent briller devant leur empereur et foncent dans le piège, sans attendre les renforts du sud. === Le terrain === Le champ de bataille d’Austerlitz est un vaste rectangle de huit kilomètres sur douze. Il est délimité au nord par la route [[Olmütz]]-[[Brno|Brünn]] et à l'ouest par la route [[Vienne (Autriche)|Vienne]]-[[Brno|Brünn]]. Au sud, des étangs gelés ferment le champ de bataille. Entre le [[Goldbach]] et la [[Littawa]], deux ruisseaux formant un V, le plateau de [[Pratzen]] est la pièce maîtresse de la zone. La neige hivernale, encore peu épaisse, gomme les dénivellations. Pendant deux jours, Napoléon étudie scrupuleusement le futur champ de bataille qu’il a choisi : il mémorise chaque haie, chaque fossé, chaque bosquet… Il conseille alors à ses maréchaux : « Jeunes gens, étudiez bien ce terrain, nous nous y battrons ; vous aurez chacun un rôle à jouer ». === La météo === <center> {| class="wikitable" !Date || Température|| Vent || Précipitations |- |29/11.|| 1,1°C || faible || Pluie, brume |- |30/11.|| 2,0°C || faible || Neige |- |1/12.|| 2,5°C || moyen || Pluie |- |2/12.|| 5,2°C || faible || Brume, pluie |- |3/12.|| 2,5°C || faible || Neige |} </center> === Le plan et le dispositif français === {{Article détaillé|Liste des unités françaises ayant participé à la bataille d’Austerlitz}} Après la réunion des armées alliées, les Austro-Russes ont une nette supériorité numérique. [[Napoléon Ier|Napoléon]] se résout donc à une bataille défensive ; il rassemble ses forces et convainc ses adversaires qu’il refuse la bataille en battant en retraite et en abandonnant, le [[28 novembre]], le plateau de Pratzen, de haute valeur tactique. Le même jour, il sacrifie aux [[Cosaques]] les cavaliers du général [[Treilhard]]. Après une marche agressive de trois mois, ce repli et cette défaite apparaissent aux yeux des coalisés comme un aveu de faiblesse et réconforte le [[tsar]], qui a refusé la proposition de [[Koutouzov]] de retraiter jusqu’en [[Galicie]]. Napoléon, pour persuader psychologiquement ses adversaires qu’il est à la veille d’une défaite certaine, envoie [[Anne Jean Marie René Savary|Savary]], son [[aide-de-camp]], faire des propositions de paix<ref> Mémoires du comte de Rovigo, par Savary </ref>. Le tsar refuse mais, le [[30 novembre]], il envoie tout de même [[Petr Dolgorukov|Dolgoroukov]], un prince arrogant et impertinent. {{citation|Celui-ci, plus habitué aux bals à [[Saint-Pétersbourg]] qu’aux bivouacs, est saisi de surprise quand il voit Napoléon sortir d’un fossé, la figure sale et mal accoutrée}} raconte dans ses ''Mémoires'' le général [[Gaspard Louis Langeron|Langeron]], un émigré français qui a proposé ses services au tsar. [[Petr Dolgorukov|Dolgoroukov]] donne les conditions de paix du tsar : l’abandon de la rive gauche du [[Rhin]] par la France<ref> Conformément aux objectifs de la [[troisième coalition]]. </ref>. Napoléon refuse net mais [[Petr Dolgorukov|Dolgoroukov]] est convaincu de la victoire des coalisés. À son retour, il déclare : {{citation|Napoléon tremblait de peur. J’ai vu l’armée française à la veille de sa perte. Notre avant-garde suffirait à l’écraser}}<ref> Toujours d’après les Mémoires de Langeron. </ref>. Pour persuader tactiquement les alliés, Napoléon place peu de troupes sur son flanc droit. Il prévoit que les Alliés, voyant le point faible du dispositif français, quitteront leur position dominante, c’est-à-dire le plateau de Pratzen, pour envelopper les Français et leur couper la route de [[Vienne (Autriche)|Vienne]], car ils croient qu'elle est indispensable aux Français pour battre en retraite en cas de défaite, alors qu'en fait, l'Empereur se serait replié sur Paris. Au centre, [[Nicolas Jean-de-Dieu Soult|Soult]] et ses {{formatnum:20000}} hommes, contre-attaquera et coupera l’armée ennemie en deux en attaquant le plateau de Pratzen laissé sans défense. [[Jean Lannes|Lannes]] ({{formatnum:15000}} fantassins) et [[Joachim Murat|Murat]] ({{formatnum:8000}} cavaliers), au nord, défendront leurs positions. Pour renforcer son flanc droit, Napoléon prie Davout de quitter Vienne, où ses troupes sont stationnées, et de le rejoindre à marche forcée. Les {{formatnum:8000}} soldats de [[Louis Nicolas Davout|Davout]] parcourront alors les 110 km qui les séparent du champ de bataille en 48 heures (36 heures de marche). De plus, il place la cavalerie de Margeron au château de Sokolnitz et dispose la division Legrand à Sokolnitz (il ordonne également au 3{{e}} régiment de ligne de [[Claude Juste Alexandre Legrand|Legrand]] de tenir Telnitz jusqu’à l’arrivée de Davout). Enfin, [[garde impériale (Premier Empire)|la Garde Impériale]] ({{formatnum:5000}} grenadiers) et le 1{{er}} corps de [[Charles XIV Jean de Suède|Bernadotte]] ({{formatnum:12000}} hommes) restent en réserve<ref> Le positionnement des Français pour la bataille fut envoyé aux différents maréchaux dans le bulletin ''Dispositions générales pour la journée du 11 Frimaire an XIV ([[2 décembre]] [[1805]]) '' </ref>. L’artillerie française compte 139 canons. === Le plan et dispositif allié === {{Article détaillé|Liste des unités russes et autrichiennes ayant participé à la bataille d’Austerlitz}} [[Image:Schlacht bei Austerlitz.jpg|thumb|right|320px|Les positions françaises (en blanc) et austro-russes (en noir) à la veille de la bataille]] Le {{1er décembre}}, un conseil de guerre se réunit pour discuter du plan de bataille pour l'affrontement du lendemain. Koutouzov et Langeron, méfiants devant la conduite de l’Empereur des Français, veulent temporiser pour attendre l’archiduc Charles. Celui-ci, parti d’Italie, est le seul qui puisse se mesurer à Napoléon, l’ayant déjà beaucoup rencontré dans le passé<ref> En effet, [[Charles Louis d'Autriche|l’archiduc Charles]] a conduit la retraite de l’armée autrichienne pendant la [[Campagne d'Italie (1796-1797)|1{{re}} campagne d’Italie]]. </ref>. Mais le tsar, encouragé par de jeunes nobles ambitieux mais sans expérience, choisi [[Franz von Weyrother|Weyrother]], un général autrichien. Celui-ci a organisé les manœuvres de l’armée des Habsbourg l’année précédente sur ce même emplacement. Son plan d’attaque prévoit d’utiliser le corps de [[Pierre de Bagration|Bagration]] pour faire une attaque de diversion au nord tandis que la majeure partie de l’armée alliée attaquera au sud le flanc droit dégarni des Français avec {{formatnum:40000}} hommes en quatre colonnes et prendre les Français dans un mouvement tournant : {{citation|J’emploierai demain contre Bonaparte la même manœuvre qui lui avait servi à battre les Autrichiens à [[Bataille de Castiglione|Castiglione]]. La victoire est certaine}} déclare Weyrother au tsar. L’armée austro-russe compte {{formatnum:85000}} hommes, dont {{formatnum:15000}} Autrichiens. À la droite du dispositif allié se trouve le corps de [[Pierre de Bagration|Bagration]] (environ {{formatnum:15000}} hommes) ; au centre, [[Kollowrath]] ({{formatnum:17000}} hommes) et à gauche, {{formatnum:43000}} hommes (formés en quatre colonnes) sous les ordres de [[Przybyszewky]], Langeron, Dovtorov et Kienmayer). En réserve, Weirother place les {{formatnum:4000}} hommes de la [[garde impériale (Russie)|Garde Impériale russe]] (sous les ordres du frère du tsar, le [[grand-duc Constantin]]) et la cavalerie du [[Jean Népomucène Joseph de Lichtenstein|prince de Lichtenstein]] ({{formatnum:7000}} cavaliers). L’ensemble de l’artillerie allié compte 278 canons. === La nuit du 1{{er}} décembre au 2 décembre === [[Image:Austerlitz-lejeune.jpg|300px|right|thumb|Les bivouacs d’Austerlitz, par [[Louis-François Lejeune|L.-F. Lejeune]]]] Le [[1er décembre]], à 20 heures 30, Napoléon réunit ses maréchaux pour un dernier conseil : chacun désormais sait précisément son rôle pour le lendemain. À 22 heures, il part à cheval avec une escorte de vingt chasseurs rejoindre le sud du champ de bataille afin d’entendre les Russes prendre leurs positions sur le plateau de Pratzen. Dans l’obscurité, ils dépassent les positions françaises et des [[Cosaques]] surgissent de la nuit, mais l’escorte de l’empereur les repousse. De retour dans les lignes françaises, ils s’arrêtent dans un bivouac tenu par un des régiments de [[Dominique-Joseph René Vandamme|Vandamme]]<ref> Il s’agit en fait du 13{{e}} régiment d’infanterie, division Vandamme, 4{{e}} Corps de [[Soult]]. </ref>, du corps de Soult. Dans l’obscurité, l’Empereur se heurte à une souche d’arbre : un chasseur de son escorte l'éclaire en allumant une poignée de paille et en la fixant sur un bâton<ref> Une douzaine de personnes s’attribuent ce geste : un fantassin du 13{{e}} régiment, un chasseur de la Garde, un grenadier…</ref>. Un an jour pour jour après [[Le Sacre de Napoléon|le sacre de Napoléon]], toute la compagnie l’imite et 70&nbsp;000 hommes répartis en douze bivouacs, font de même puis renouvellent les feux pendant plus d’une heure. Voyant ce spectacle, les Russes et les Autrichiens croient que les Français brûlent leurs campements, sûrs de leur défaite. Confiant à ses aides de camps que cette nuit du 1{{er}} au [[2 décembre]] était la plus belle soirée de sa vie, Napoléon s’endort vers minuit, rassuré du mouvement des Russes sur sa droite, dans l'auberge où il a établi son quartier général, non loin de la route Olmütz-Brünn. Dans le château d’Austerlitz, Alexandre ne se réveille qu’à quatre heures du matin tandis que François II a attendu l’aube, soucieux. Dans la nuit, des patrouilles de reconnaissance françaises remarquent que les Russes marchent plus au sud que prévu : Napoléon ordonne alors à [[Louis Nicolas Davout|Davout]] de gagner [[Telnitz]], à l’extrême sud du champ de bataille, afin de stopper les Russes entre les villages de Telnitz et [[Sokolnitz]], distants l’un de l’autre de 800 mètres. La division [[Louis Friant|Friant]]<ref> Essentiellement composée de vétérans d’Italie et d’[[Égypte]], la division Friant est surnommée « ''la division de fer ''» car elle a la réputation qu’un de ses hommes en vaut dix chez l’ennemi. </ref>, harassée de fatigue après sa marche, quitte son bivouac vers 4 heures du matin et part pour Telnitz. == La bataille == === Les assauts sur Telnitz et Sokolnitz === [[Image:Battle of Austerlitz, Situation at 1800, 1 December 1805.gif|300px|thumb|left|Les positions françaises (en bleu) et alliées (en rouge) vers 8 heures le {{1er décembre}} [[1805]]. Carte du Département d’histoire de l’[[Académie militaire]] des [[États-Unis]].]] Le [[2 décembre]] [[1805]], à 4 heures du matin, les 4 colonnes alliées quittent le plateau de Pratzen et marchent sur le flanc droit des Français. À 6 heures, les divisions de Soult ([[Dominique-Joseph René Vandamme|Vandamme]] et [[Louis Charles Vincent Le Blond de Saint-Hilaire|Saint-Hilaire]]), cachées par le brouillard, franchissent le Goldbach en silence et attendent le signal de l’attaque. À 7 heures, [[baron de Kienmayer|Kienmayer]] envoie son avant-garde à l’assaut de Telnitz, mais elle est repoussée par le [[3e régiment d'infanterie de ligne|3{{e}} régiment de ligne]] de [[Claude Juste Alexandre Legrand|Legrand]]. Quelques minutes plus tard, [[baron de Kienmayer|Kienmayer]] lance 3&nbsp;000 Autrichiens et 600 cavaliers pour prendre la petite bourgade. Ceux-ci arrivent à percer la ligne française jusqu’à l’église du village, mais les Français culbutent les Russes dans une contre-attaque. À 7 heures 30, les troupes de [[Louis Nicolas Davout|Davout]] relèvent le 3{{e}} régiment. À 8 heures, l’état-major allié s’impatiente : Kienmayer a perdu l’ensemble de ses troupes dans une troisième attaque vaine tandis que la 2{{e}} colonne de [[Langeron]] a perdu une heure dans l’exécution de sa manœuvre. En effet, à 6 heures, Langeron est bloqué par 4&nbsp;000 cavaliers de [[Jean Ier de Liechtenstein|Jean de Liechtenstein]]<ref>Journal inédit de la campagne de 1805, Langeron, édition la Vouivre. </ref>; or cette cavalerie devrait se trouver à 2 km derrière lui. Excédé, il alerte le général de cavalerie et lui démontre son erreur : ce dernier a confondu les villages de [[Krzeniwitz]] et de Pratzen. Mais ce dernier préfère attendre le jour pour replacer son unité car il ne veut plus se perdre dans l’obscurité. Langeron finit par passer outre et fait marcher sa colonne devant les Autrichiens, tandis que [[Doctorov]] (ou [[Dmitry Dokhturov|Dokhtourov]]), ne voyant ni Langeron sur sa droite ni Kienmayer devant lui, arrête sa colonne. Tout le plan de Weirother est compromis. À partir de 8 heures 30, Langeron attaque Sokolnitz. Après un violent bombardement, la colonne de Langeron pénètre dans Sokolnitz que les Français ont abandonné. Mais ceux-ci se reforment à l’arrière tandis qu’une poignée d’hommes se réfugie dans le château, résistant à tous les assauts des Russes. Finalement, les Français contre-attaquent et repoussent les Russes hors du village. Au même moment, Doctorov lance régulièrement plusieurs attaques sur Telnitz, forçant les Français à battre en retraite derrière le village, mais à chaque fois, une charge de dragons force les Russes à quitter la bourgade. Telnitz change ainsi trois fois de mains en une demi-heure. Finalement à 9 heures, Doctorov et Langeron prennent Telnitz et Sokolnitz dans une dernière attaque. Davout et ses aides de camps se demandent alors combien de temps ils pourront encore empêcher avec 1&nbsp;500 hommes l’avancée des Russes. En regardant leurs rangs, Davout aperçoit stupéfait que les Russes ont cessé leurs attaques : Napoléon vient d’attaquer. === L’attaque du plateau de Pratzen === [[Image:Battle of Austerlitz - Situation at 0900, 2 December 1805.gif|300px|thumb|left|L’attaque décisive du corps de [[Soult]] sur le centre allié et la contre-attaque de la Garde impériale russe. Carte du Département d’histoire de l’[[Académie militaire]] des [[États-Unis]].]] La surprise est totale chez les Russes : les colonnes de [[Przybyszewski]] et de [[François Kolowrat|Kolowrat]] sont assaillies de flanc et en plein mouvement. Les divisions de [[Louis Charles Vincent Le Blond de Saint-Hilaire|Saint-Hilaire]] et de [[Dominique-Joseph René Vandamme|Vandamme]] chargent et s’enfoncent à l’arme blanche dans les rangs russes. Le massacre, d’une rare violence, ne dure que quelques minutes. Les Russes de Kollowrath sont culbutés, entraînant les soldats de Pryzbyszewski dans leur débandade. À 9 heures, les Français sont maîtres du plateau, au sommet duquel [[Nicolas Jean-de-Dieu Soult|Soult]] installe ses canons. [[Koutouzov]], voyant ses pires craintes se confirmer, prélève alors des unités de Langeron et de Doctorov pour reprendre Pratzen. Ces ordres provoquent ainsi dans la 1{{re}} et 2{{e}} colonne une véritable cohue entre les unités descendant du plateau et celles montant à l’assaut. Langeron envoie un de ses régiments à l’attaque : l’artillerie de [[Nicolas Jean-de-Dieu Soult|Soult]] le harcèle pendant qu’il remonte le plateau, creusant de larges trous dans les rangs serrés des Russes, puis une décharge de la mousqueterie de Saint-Hilaire force Langeron à abandonner. Pour aider [[Nicolas Jean-de-Dieu Soult|Soult]] Napoléon envoie [[Charles XIV Jean de Suède|Bernadotte]], jusque-là tenu en réserve, au nord du plateau tandis que la Garde Impériale est envoyée à Pratzen. Vers 11 heures, Koutouzov envoie toutes ses réserves reconquérir le plateau : il envoie les 4&nbsp;000 soldats de la garde à pied russe. Mais celle-ci, mal commandée et peu entraînée, part de trop loin et arrive essoufflée devant le [[4e régiment d'infanterie de ligne|4{{e}} régiment de ligne]] français. Commandés par [[Joseph Bonaparte|Joseph]], le frère aîné de Napoléon, les voltigeurs français prennent rapidement le dessus sur l’élite de l’armée russe et les poursuivent, la baïonnette dans les reins. Profitant de la faiblesse de cette unité qui n’aura pas le temps de se former en carré<ref> la disposition en carré de l’infanterie est la seule formation efficace contre la cavalerie : même encerclé, le carré de fantassins peut faire feu de tous les côtés tandis que des canons renforcent les angles de la formation. </ref>, Koutouzov envoie dix escadrons de cavalerie lourde. Le choc est brutal et après une vaine résistance des Français, les cavaliers russes s’emparent de l’aigle du régiment. Aussitôt, [[Jean Rapp|Rapp]] et ses 375 [[mamelouks]] de la cavalerie de la Garde chargent les Russes en criant : {{citation|Faisons pleurer les dames de Saint Pétersbourg}}. À un contre quatre, les Français se battent furieusement (un mamelouk revient à trois reprises apporter à l’Empereur un étendard russe ; à la 3{{e}} fois, Napoléon veut le retenir, mais il s’élance de nouveau et ne revient plus) et les chevaliers de la Garde de Constantin sont battus<ref> Leur chef, le colonel Repnine, fait prisonnier, est présenté comme « trophée » à Napoléon. </ref>. Avec l’échec de la Garde russe, la bataille est perdue pour les Alliés: l’armée est coupée en deux. Au sud, Langeron et Doctorov, isolés, battent en retraite tandis qu’au nord [[Pierre de Bagration|Bagration]] résiste aux assauts de [[Jean Lannes|Lannes]] et [[Joachim Murat|Murat]] <ref> Notamment la cavalerie d’Hauptoul et de [[Étienne Marie Antoine Champion de Nansouty|Nansouty]], sous le commandement du maréchal Murat. </ref> ; malgré de lourdes pertes, il bat en retraite en bon ordre. === L'hallali === [[Image:Battle of Austerlitz - Situation at 1400, 2 December 1805.gif|300px|thumb|right|A 14 heures, l’armée alliée est coupée en deux : Napoléon attaque l’aile sud de l’[[armée austro-russe]] sans se préoccuper de l’aile nord, provoquant la débandade à travers les étangs gelés de [[Menitz]] et [[Satschan]]. Carte du Département d’histoire de l’[[Académie militaire des États-Unis]].]] À 14 heures, Koutouzov étudie seul les voies de retraite, le tsar et tout l’état-major ayant déjà fui une heure plus tôt. Au centre, Kollowrath, la Garde russe et la cavalerie de [[Jean Népomucène Joseph de Lichtenstein|Lichtenstein]] sont en pleine déroute et retraitent vers l’est. Au sud, Napoléon ordonne à [[Nicolas Jean-de-Dieu Soult|Soult]] de quitter le plateau de Pratzen et de couper la retraite aux 1{{e}} et 2{{e}} colonnes russes, tandis que Davout fait pression à l’ouest et reprend Sokolnitz. A 15 heures 30, n’écoutant plus leurs officiers, 20&nbsp;000 Russes fuient en désordre <ref> Langeron décrit la panique des Russes : « Il faut avoir été témoin de la confusion qui régnait dans notre retraite (ou plutôt de notre fuite) pour s’en faire une idée. Il ne restait pas deux hommes d’une même compagnie ensemble […] les soldats jetaient leurs fusils et n’écoutaient plus leurs officiers, ni leurs généraux ; ceux-ci criaient, fort inutilement, et couraient comme eux. » </ref> et espèrent échapper à l’encerclement en traversant les marais et les étangs gelés proches des villages de Menitz et de Satschan. Mais sous leurs poids, la glace se rompt tandis que l’artillerie française tire à boulet rouge pour briser les derniers îlots de glace. Paniqués et gelés, 2&nbsp;000 Russes parviennent à regagner la rive où ils sont immédiatement faits prisonniers<ref> La question de l’enfouissement dans les étangs de Menitz des 10&nbsp;000 Russes a longtemps fait débat : Suchet, chargé par Bonaparte de vider les étangs de Menitz et de Satschan, ne trouva le 4 décembre que 36 canons, 138 chevaux et 3 cadavres ; mais il n’exclut pas que les villageois des alentours n’aient enterré précipitamment des centaines de noyés. </ref>. La victoire française est indiscutable. == Les conséquences == === Les pertes === Les Français comptent 1 305 morts<ref> Les archives impériales oscillent entre 1&nbsp;293 et 1&nbsp;533 morts </ref> et 6 500 blessés<ref> A chaque blessé, Napoléon offre 3 napoléons d’or, de 500 à 2&nbsp;000 francs aux officiers selon leurs grades et 3&nbsp;000 francs aux généraux </ref>. Ils ont récupéré 173 prisonniers (la plupart appartiennent à la division Friant ou à la division Legrand) et ont perdu un drapeau du 4e de Ligne : l’Empereur est particulièrement fâché de la perte de cet aigle impérial. Les alliés comptent 16&nbsp;000 morts et blessés et 11&nbsp;000 prisonniers<ref> [[Jean Tulard]], comme de nombreux historiens, pense que les Russes et les Autrichiens ont gonflé leurs pertes, afin d’impressionner leur créancier anglais </ref>. Ils déplorent également la perte de 45 drapeaux<ref> Napoléon remet ces drapeaux aux maires de Paris dans une cérémonie au château de Schönbrunn. Ils iront orner la cathédrale Notre-Dame de Paris pendant un mois avant d’être placés à la voûte de l’église Saint-Louis des Invalides. </ref> et de 185 canons<ref> Le bronze de ces canons sera employé pour fondre la colonne Vendôme à Paris. </ref>. === Conséquences militaires === [[Koutouzov]], qui a perdu son gendre [[Ferdinand von Tiesenhausen]], organise inlassablement la retraite de l’armée russe : celle-ci se regroupe dans la nuit et part pour [[Göding]] en franchissant la [[Morava (Moravie)|March]], une rivière large comme la [[Marne (rivière)|Marne]] servant de frontière entre la [[Moravie]] et la [[Hongrie]], puis il retourne en Russie via la [[Galicie]]. Langeron présente sa démission, Pryzbyszemski est ramené au rang de simple soldat tandis qu’Alexandre éloigne Koutouzov de l’armée en le nommant gouverneur de [[Kiev]]. Le [[3 décembre]], Napoléon envoie la cavalerie de Murat poursuivre les Russes<ref>« L’Empereur pense qu’à la guerre il n’y a rien de fait, tant qu'il reste à faire. Une victoire n’est pas complète, tant qu’on peut encore faire mieux » déclare [[Louis-Alexandre Berthier]] à Murat à cette occasion.</ref>, sans succès. === Conséquences politiques === Au soir du [[3 décembre]], Napoléon reçoit un émissaire de [[François Ier d'Autriche|François II]] : le [[Jean Ier de Liechtenstein|prince de Liechtenstein]]. Celui-ci demande l’arrêt des combats pour négocier la paix. Le lendemain, Napoléon et [[François Ier d'Autriche|François II]] se réunissent au Moulin Brûlé, à une vingtaine de kilomètres au sud d’Austerlitz. Les deux souverains conviennent d’un [[armistice]] et des principales conditions de paix autour d’un simple brasier. Ils s’entendent même sur la responsabilité du conflit : « Les Anglais sont des marchands de chair humaine » s’exclame l'empereur autrichien. Après une heure d’entrevue, Napoléon demande : « Votre Majesté me promet donc de ne me plus faire la guerre ? » et François II répond : « Je le jure et je tiendrai parole ». De retour à Vienne, acclamé par ses sujets, François II dit à l'ambassadeur français : « Croyez-vous, Monsieur, que votre Maître pourrait ainsi retourner à Paris, ayant perdu une bataille comme je l'ai perdue ? ». Le [[26 décembre]], l’Autriche signe le [[traité de Presbourg]]<ref> Aujourd’hui [[Bratislava]] </ref>. Elle perd 4 millions de sujets et la [[Vénétie]]<ref>Capitale pour son commerce à cause de la présence du seul port de l’Autriche : [[Venise]] </ref> ainsi que ses dépendances d’[[Istrie]] et de [[Dalmatie]]. En outre, elle doit donner ses territoires allemands, comme le [[Tyrol]], au profit de la [[Bavière]] et du [[Wurtemberg]]. La France a alors les mains libres pour réorganiser l’Allemagne : [[Bade]] devient un [[grand-duché]] tandis que la Bavière et le Wurtemberg un royaume. Ces trois États forment en juillet [[1806]] le noyau de la [[Confédération du Rhin]]. Le [[6 août]] [[1806]], François II renonce à son titre d’Empereur d’Allemagne <ref>Il devient alors le roi [[François Ier d'Autriche]]</ref>, et dissout le [[Saint Empire Romain Germanique]]. Enfin, l’Autriche paye une indemnité de 40 millions de [[florin]]s, soit un 1/7 de son revenu national. La [[Prusse]], effrayée par ce coup de tonnerre, signe, le [[16 décembre]], à [[Schönbrunn]], un traité d’échange de territoire favorable à la [[Prusse]]. Napoléon donne à la Prusse le [[Hanovre]], domaine du roi d’[[Angleterre]], contre les villes de [[Neuchâtel]], [[Clèves]] et [[Ansbach]]. À la nouvelle du désastre de l’armée alliée, le Premier ministre anglais [[William Pitt le Jeune|William Pitt]], responsable de la coalition, demanda à son valet de détacher la carte d’[[Europe]] accrochée au mur : « Roulez là, elle ne servira plus dans dix ans ». Et, sur ces paroles, il mourut. == La légende napoléonienne == === Le discours de l'empereur De notre camp impérial d’Austerlitz le 12 frimaire an 14. === {{citation_bloc|Soldats, je suis content de vous.}} {{citation_bloc|Vous avez, à la journée d'Austerlitz, justifié tout ce que j'attendais de votre intrépidité ; vous avez décoré vos aigles d'une immortelle gloire. Une armée de 100&nbsp;000 hommes, commandée par les empereurs de Russie et d'Autriche, a été, en moins de quatre heures, ou coupée ou dispersée. Ce qui a échappé à votre fer s'est noyé dans les lacs. Quarante drapeaux, les étendards de la garde impériale de Russie, cent vingt pièces de canon, vingt généraux, plus de 30&nbsp;000 prisonniers, sont le résultat de cette journée à jamais célèbre. Cette infanterie tant vantée, et en nombre supérieur, n'a pu résister à votre choc, et désormais vous n'avez plus de rivaux à redouter. Ainsi, en deux mois, cette troisième coalition a été vaincue et dissoute. La paix ne peut plus être éloignée ; mais, comme je l'ai promis à mon peuple avant de passer le Rhin, je ne ferai qu'une paix qui nous donne des garanties et assure des récompenses à nos alliés.}} {{citation_bloc|Soldats, lorsque le peuple français plaça sur ma tête la couronne impériale, je me confiais à vous pour la maintenir toujours dans ce haut éclat de gloire qui seul pouvait lui donner du prix à mes yeux. Mais dans le même moment nos ennemis pensaient à la détruire et à l'avilir ! Et cette couronne de fer, conquise par le sang de tant de Français, ils voulaient m'obliger à la placer sur la tête de nos plus cruels ennemis ! Projets téméraires et insensés que, le jour même de l'anniversaire du couronnement de votre Empereur, vous avez anéantis et confondus ! Vous leur avez appris qu'il est plus facile de nous braver et de nous menacer que de nous vaincre.}} {{début_citation}}Soldats, lorsque tout ce qui est nécessaire pour assurer le bonheur et la prospérité de notre patrie sera accompli, je vous ramènerai en France; là, vous serez l'objet de mes plus tendres sollicitudes. Mon peuple vous reverra avec joie, et il vous suffira de dire, "J'étais à la bataille d'Austerlitz", pour que l'on réponde, {{guil|Voilà un brave }}<ref>[http://www.servicehistorique.sga.defense.gouv.fr/01decouverte/tresorsarchives/austerlitz/central_austerlitz.htm Des précisions sur la rédaction de cette lettre sont disponibles dans les Archives de la Défense Nationale] </ref>{{fin_citation}} === Récit de la bataille d'Austerlitz par un soldat, le cavalier Blanche === {{citation_bloc|L'empereur était immobile. Autour de lui, ses officiers d'État Major. Il levait le bras et le premier venait prendre les ordres et ainsi de suite. Vers le milieu de la journée et alors que la bataille battait son plein, lui descendit de cheval et se fit étendre une couverture. "La bataille est gagnée" dit-il, et il s'allongea. Il s'endormit tandis que le combat continuait de se dérouler.}} == Commémoration de la bataille == Les élèves officiers de l'[[École spéciale militaire de Saint-Cyr]] à [[Coëtquidan]] identifient par les lettres du nom « Austerlitz » chacun des dix mois de leur scolarité en commençant par octobre (A) (décembre est donc S, par exemple). Août et septembre sont respectivement nommés Z' et Z". De plus, ils célèbrent ainsi que les élèves de la Maison d'éducation de la [[Légion d'honneur]] de [[Saint-Denis (Seine-Saint-Denis)|Saint-Denis]] (93) la victoire française par une cérémonie tous les 2 S. Toutefois, le deux-centième anniversaire de la bataille n'a fait l'objet que d'une commémoration très limitée en [[France]]. La ville d'[[Slavkov u Brna|Austerlitz]], située en [[République tchèque]], a organisé le [[2 décembre]] [[2005]] une reconstitution de la bataille<ref>Voir le [http://www.austerlitz2005.com/fr/anniversaires/bicentenaire/ site du projet Austerlitz 2005].</ref>. Seule la ministre de la Défense, [[Michèle Alliot-Marie]], a assisté aux cérémonies officielles de reconstitution, dans un contexte marqué en France par la remise en cause du rôle de [[Napoléon Ier]] de l'[[esclavage]] dans les [[colonies]] (qu'il avait rétabli) et par les [[Émeutes de 2005 dans les banlieues françaises|émeutes]] qui venaient d'agiter les [[banlieue]]s françaises à l'automne de la même année [[2005]]. == Notes == <references/> == Références == [[Image:Austerlitz cropped.jpg|250px|right|thumb|Lithographie russe représentant la [[Bataille des Chevaliers-Gardes]] de [[Repnine]] à Austerlitz]] === Bibliographie === *''Austerlitz'' - Pierre Miquel - éditions Albin Michel *''Les batailles de Napoléon'' – éditions Trésor du Patrimoine *''Napoléon Bonaparte'' – éditions Larousse *''Atlas historique de l’épopée napoléonienne'' – éditions Argus Konstam *''Napoléon à Austerlitz'' - Jean-Pierre Défieux - Le premier jeu de guerre publié en France, 1977, Jeux Descartes 1978 === Liens externes === * [http://www.vialupo.com/austerlitz 1805 - 2005 Bicentenaire de la Bataille d’Austerlitz] La bataille et son souvenir *http://members.tripod.com/~shadojak/milhis.html#grandarm%e9{{e}},1805 *http://www.histwar.fr/recits-historiques/16/bataille-austerlitz *http://www.lebibs.free.fr/austerl.htm *http://www.ameliefr.club.fr/Austerlitz.html *http://archiv.radio.cz/francais/osobnosti/udalost.phtml?cislo=12 * [http://www.servicehistorique.sga.defense.gouv.fr/01decouverte/tresorsarchives/austerlitz/central_austerlitz.htm Les archives du Ministère de la Défense Nationale détiennent la correspondance de Napoléon] * [http://www.vialupo.com/austerlitz Austerlitz: la bataille des trois empereurs] === Pour aller plus loin === *''La guerre et la paix'' - Léon Tolstoï - raconte les guerres napoléoniennes de l'année 1805, notamment la bataille d'Austerlitz, dans le tome 1 == Voir aussi == * [[Histoire de France]] * [[Napoléon Ier|Napoléon Bonaparte]] * [[Première coalition]] * [[Deuxième coalition]] * [[Troisième coalition]] * [[Liste des batailles des guerres de la Révolution et du Premier Empire]] * [[Liste des unités françaises ayant participé à la bataille d’Austerlitz]] * [[Liste des unités russes et autrichiennes ayant participé à la bataille d’Austerlitz]] === Œuvres d’art === {{commons|Battle of Austerlitz}} La bataille est le sujet d’un grand nombre d’œuvres. Outres les ouvrages purement militaires, on peut citer : * la commande de dix-huit tableaux de mars 1806<ref>Emmanuel de Waresquiel. ''La figure de Napoléon dans la bataille à travers trois générations de peintres, de Gérard à Meissonier''. Cahiers du CEHD n° 24, 2005 ISBN 2-11-094731-4, p 205</ref>, dont ''La bataille d’Austerlitz'' du baron Gérard {{Epopée}} {{Portail|Histoire militaire|Tchéquie|Révolution française}} {{DEFAULTSORT:Austerlitz}} [[Catégorie:Bataille des guerres napoléoniennes]] [[Catégorie:Campagne d'Autriche (1805)]] [[Catégorie:Bataille d'Autriche]] [[Catégorie:Bataille de Russie]] [[Catégorie:Bataille de 1805]] {{Lien AdQ|en}} {{Lien AdQ|he}} {{Lien AdQ|ro}} [[ar:معركة أوسترليتز]] [[bg:Битка при Аустерлиц]] [[cs:Bitva u Slavkova]] [[da:Slaget ved Austerlitz]] [[de:Schlacht bei Austerlitz]] [[en:Battle of Austerlitz]] [[eo:Batalo ĉe Slavkov]] [[es:Batalla de Austerlitz]] [[et:Austerlitzi lahing]] [[fi:Austerlitzin taistelu]] [[he:קרב אוסטרליץ]] [[hu:Austerlitzi csata]] [[id:Pertempuran Austerlitz]] [[it:Battaglia di Austerlitz]] [[ja:アウステルリッツの戦い]] [[ka:აუსტერლიცის ბრძოლა]] [[ko:아우스터리츠 전투]] [[lb:Schluecht vun Austerlitz]] [[lmo:Bataja de Austerlitz]] [[lt:Austerlico mūšis]] [[nl:Slag bij Austerlitz]] [[no:Slaget ved Austerlitz]] [[pl:Bitwa pod Austerlitz]] [[pt:Batalha de Austerlitz]] [[ro:Bătălia de la Austerlitz]] [[ru:Битва под Аустерлицем]] [[sk:Bitka pri Slavkove]] [[sl:Bitka pri Austerlitzu]] [[sr:Битка код Аустерлица]] [[sv:Slaget vid Austerlitz]] [[vi:Trận Austerlitz]] [[zh:奥斯特里茨战役]]