Bataille de Krasnoi
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2008-07-21T21:03:51Z
Zetud
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{{Infobox Conflit militaire
| image = [[Image:Krasnoi.jpg|300px]]
| légende = ''Bataille de Krasnoi'', par [[Peter von Hess]]
| conflit = Bataille de Krasnoi
| guerre = [[Sixième coalition]]
| date = [[15 novembre|15]] - [[18 novembre]], [[1812]]<ref>Richard Brooks (éditeur), ''Atlas of World Military History''. p. 119</ref>
| lieu = [[Krasnoi]]
| issue = Victoire française controversée
| combattants1 = {{Empire français}}
| combattants2 = {{Russie impériale}}
| commandant1 = [[Napoléon Ier]]
| commandant2 = [[Mikhaïl Illarionovitch Golenichtchev-Koutousov]]
| forces1 = {{formatnum:42000}} réguliers <br/> {{formatnum:39000}} volontaires
| forces2 = {{formatnum:60000}} à {{formatnum:80000}} hommes
| pertes1 = {{formatnum:6000}} à {{formatnum:13000}} morts <br/> {{formatnum:20000}} à {{formatnum:26000}} prisonniers
| pertes2 = {{formatnum:5000}} hommes
| batailles = {{Sixième coalition}}
}}
La '''Bataille de Krasnoi''' est une série d'engagements militaires ayant eu lieu du [[15 novembre|15]] au [[18 novembre]] [[1812]] entre l'armée russe commandée par le général [[Mikhaïl Illarionovitch Golenichtchev-Koutousov|Koutousov]] et la [[Grande Armée (Premier Empire)|Grande Armée]] de [[Napoléon Ier]] qui subit de lourdes pertes lors de cette dernière phase de la retraite de Russie. Tandis que Napoléon tentait de faire progresser ses troupes dispersées pour les mettre hors de portée de l'ennemi, les armées du Tsar, tout en cherchant à éviter une bataille rangée, les harcelèrent par une série de manœuvres, d'embuscades et d'engagements.
L'apogée de l'affrontement survint lorsque le [[17 novembre]], une manœuvre d'intimidation de la Garde Impériale dissuada Koutousov de lancer l'assaut final. Si Napoléon sauva ainsi son armée de l'anéantissement complet à Krasnoï, ce fut au prix d'énormes pertes humaines, les commandants français ayant presque systématiquement été défaits au cours des quatre jours que dura l'engagement.
== Les forces convergent sur Krasnoi ==
==== La retraite de Smolensk ====
En quittant Moscou le [[18 octobre]], l'objectif de [[Napoléon Ier|Napoléon]] est de faire prendre à la [[Grande Armée (Premier Empire)|Grande Armée]] ses quartiers d'hiver au dépot de ravitaillement de [[Smolensk]], 430 kilomètres à l'Ouest. Durant les trois semaines qui suivent, la Grande Armée doit faire face aux privations, à la perte de moral, au relâchement de la discipline, le manque de chevaux<ref>{{Citation|''Plus de {{formatnum:30000}} chevaux périrent en peu de jours, notre cavalerie se trouva toute à pied, notre artillerie et nos transports se trouvaient sans bagages...''}} - Les bulletins françois, concernant la guerre en Russie... page 98</ref> et de ravitaillement et les incessantes attaques des [[Cosaques]] et des [[Francs-tireurs et partisans|partisan]]s. Les conditions s'aggravent particulièrement dès les deux premières semaines de novembre avec l'offensive du ''général Hiver'', le fameux ''hiver russe'' durant lequel la température descend bien en dessous de zéro degré<ref>{{Citation|''16 à 18 degrés au dessous de glace''}} - Les bulletins françois, concernant la guerre en Russie... page 98</ref>.
Tant bien que mal, l'armée française arrive à [[Smolensk]], le [[9 novembre]]. Avec les engagement qui suivirent le départ de Moscou: [[Bataille de Winkowo|Winkowo]], [[Bataille de Maloyaroslavets|Maloyaroslavets]], [[seconde bataille de Polotsk|Polotsk]], [[Bataille de Czaśniki|Czaśniki]] et [[Bataille de Viazma|Viazma]], seul 40% des troupes sont encore en état de combattre. Dans ces dramatiques conditions et Napoléon réalise que la position de [[Smolensk]] est intenable et choisi de poursuivre la retraite.
Le nouveau but stratégique de la Grande Armée est désormais de gagner l'important dépot de [[Minsk]], encore plus à l'Ouest, pour y prendre les quartiers d'hiver. Ayant perdu le contact avec [[Mikhaïl Illarionovitch Golenichtchev-Koutousov|Kutuzov]] au cours des deux semaines précédentes, Napoléon croit à tort que l'armée russe est aussi affaiblie que l'armée française. Ne s'attendant pas à une offensive de la part des Russes, Napoléon commet l'erreur de reprendre la marche en petites unités et sur plusieurs jours, à partir du [[11 novembre]]. Ainsi, à l'approchent Krasnoi, les colonnes françaises s'étendent sur plus de 60 kilomètres et les unités ne sont pas en ordre de bataille.
Le [[14 novembre]], les corps de [[Józef Antoni Poniatowski|Poniatowski]] et [[Jean-Andoche Junot|Junot]] en tête de l'armée française, passent Krasnoi et continuent leur marche à l'Ouest vers [[Orsha]]. Le lendemain, [[15 novembre]], Napoléon, avec ses {{formatnum:16000}} hommes de la [[Garde impériale (Premier Empire)|Garde impériale]], arrive à son tour à Krasnoi où il pense rester quelques jours afin de permettre aux {{formatnum:6000}} hommes du IV{{e}}corps d'[[Eugène de Beauharnais|Eugène]], les {{formatnum:9000}} hommes du I{{er}} corps de [[Louis Nicolas Davout|Davout]], et les {{formatnum:8000}} hommes du III{{e}} corps de [[Michel Ney|Ney]], de le rejoindre pour poursuivre la retraite. Mais les hommes de ce derniers, qui constituaient l'[[Arrière-garde (militaire)|arrière-garde]], ne quittent [[Smolensk]] que le [[17 novembre|17]]. Près de {{formatnum:40000}} hommes marchent, désorganisés, entre, dans et autour de ces divisions.
==== La marche au sud de Koutousov ====
Évitant les régions économiquement dévastées par les précédentes campagnes, l'armée russe de [[Mikhaïl Illarionovitch Golenichtchev-Koutousov|Kutouzov]] suit les Français sur une route parallèle plus au Sud. À l'approche de Krasnoi, elle arrive en meilleur état que la Grande Armée.
Se fondant sur des renseignement fallacieux, [[Mikhaïl Illarionovitch Golenichtchev-Koutousov|Kutouzov]] estime que seul un tiers de l'armée française est en train de faire retraite sur la route de Krasnoi à [[Orsha]], et que Napoléon avec le gros de ses forces, marche beaucoup plus au nord. Il accepte donc le plan de son officier d'état-major, le colonel Toll, de marcher sur Krasnoi et d'anéantir ce qu'il considère comme une colonne française isolée.
Les Russes prennent position à Krasnio le [[15 novembre]] dès l'arrivée des {{formatnum:3500}} hommes de l'avant-garde d'[[Adam Ozharovsky|Ozharovsky]]. Dans la journée, {{formatnum:17000}} fantassins de [[Mikhail Andreyevich Miloradovich|Mikhail Miloradovich]] prennent position le long de la route de l'Est conduisant de Krasnoi à [[Smolensk]]. [[Mikhaïl Illarionovitch Golenichtchev-Koutousov|Kutouzov]], lui-même, gagne Krasnoi, le [[16 novembre|16]], avec {{formatnum:35000}} hommes.
Au total, [[Mikhaïl Illarionovitch Golenichtchev-Koutousov|Kutouzov]] a sous ses ordres {{formatnum:52000}} à {{formatnum:60000}} hommes, incluant une importante cavalerie et 500 canons. {{formatnum:20000}} [[cosaques]] irréguliers, harcèlent par petites unités les Français, tout le long des 6 kilomètres de la route de Krasnoi à Smolensk
== La déroute d'Ożarowski ==
[[Image:Ozharovsky.jpg|150px|thumb|Adam Ożarowski]]
Les premières actions ont lieu le [[15 novembre]], dans et autour de Krasnoi. Napoléon, qui commande personnellement {{formatnum:16000}} hommes de la [[garde impériale]], marche sur les hauteurs situées le long de la route, où sont postés les {{formatnum:17000}} hommes de [[Mikhail Andreyevich Miloradovich|Mikhail Miloradovich]]. Impressionné par l'ordre et de calme des unités d'élite de la Garde, ce dernier décide de ne pas les affronter mais de les bombarder à distance. Les canons russes n'empêchent cependant pas la Garde de poursuivre, sans grands dommage, vers Krasnoi.
Dans l'après-midi, sur la route près de Nikolino et Yeskovo, la garde impériale est harcelée par les [[Cosaques]] du général Orlov-Denisov. [[Denis Davidov]], chef des partisans russes et témoin oculaire de cette rencontre, a dépeint avec éloquence le comportement de la [[Garde impériale (Premier Empire)|Vieille Garde]] et de Napoléon.
:{{citation|''… Dans l'après midi, on a aperçu la vieille garde, entourant Napoléon… les soldats ennemis, tout en observant notre indiscipline mais tenant leurs fusils prêts, ont continué leur chemin sans se hâter… Comme un blocs de granit, ils semblaient invulnérables… Je n'oublierai jamais l'incroyable résolution de ces soldats, pour qui la menace de la mort est une expérience quotidienne et familière. Avec leurs grands chapeaux en peau d'ours, leurs uniformes bleus, leurs ceintures blanches, leurs panaches rouges, leurs épaulettes, ils ressemblaient à des pavots sur le champ de bataille enneigé… Colonne après colonne, nous dispersant avec leurs fusils et se moquant de notre dérisoire chevalerie… La [[Garde impériale (Premier Empire)|garde impériale]] avec Napoléon parmi eux traversèrent les rangs de nos [[Cosaques]] comme un navire de 100 canons aurait traversé une flottille de bateaux de pêche.''}}
Plus tard dans la journée, Napoléon et sa Garde entrent dans Krasnoi. Ses troupes chassent les escadrons de [[Cosaques]] d'[[Adam Ożarowski|Ożarowski]] qui défendaient la ville. Napoléon envisage alors rapidement de rester à Krasnoi quelques jours pour permettre au reste de son armée de se regrouper.
Peu après minuit, Napoléon repère les feux de camps des 3500 Cosaques d'Ozharovsky près de Kutkovo, au sud de Krasnoi. La position est dangereusement isolée de l'armée principale de Kutouzov. Napoléon envoie la [[Garde impériale (Premier Empire)|Jeune Garde]] dans une attaque surprise contre le cantonnement Russe, qui n'est protégé que par des piquets. L'opération est d'abord confiée au général [[Jean Rapp|Rapp]], mais au dernier moment, Napoléon le remplace par le général [[François Roguet|Roguet]]. Celui-ci divise ses troupes en trois colonnes et entame une silencieuse marche sur le camp d'Ozharovsky. Les Russes sont pris par surprise et malgré une farouche résistance, sont totalement mis en déroute. Pas moins de la moitié sont tués ou capturés. Les autres jettent leurs armes dans le lac voisin et fuient vers le sud. Manquant de cavalerie, [[François Roguet|Roguet]] n'est cependant pas en mesure de les poursuivre.
== La défaite d'Eugène ==
==== Les attaques de Miloradovich ====
[[Image:Andrea Appiani 003.jpg|150px|right|thumb|Eugène de Beauharnais]]
[[Image:Miloradovich.jpg|150px|left|thumb|Mikhail Andreyevich Miloradovich]]
Le lendemain, 16 novembre, est un meilleur jour pour les Russes. Les soldats de Miloradovich coupent la route menant à Krasnoi et infligent de lourdes pertes au IV{{e}} corps d'[[Eugène de Beauharnais]] qui perd {{formatnum:2000}} hommes, soit un tiers de son effectif, ainsi que le train des bagages et son artillerie. Eugène n'est sauvé de l'anéantissement total que parce [[Mikhaïl Illarionovitch Golenichtchev-Koutousov|Koutousov]], qui redoute que les escarmouches ne se transforment en bataille rangée, ordonne à [[Mikhail Andreyevich Miloradovich|Miloradovich]] de limiter ses attaques et de repositionner ses troupes plus près de l'armée principale à Shilova. L'assaut finale de [[Mikhail Andreyevich Miloradovich|Miloradovich]] étant reportée au lendemain, les Cosaques se contentent donc de continuer à harceler les Français.
==== Koutousov à Shilova ====
Plus tôt dans la journée, l'armée principale de Koutousov arrive enfin à moins de 8 kilomètres de Krasnoï et prend position autour des villages de Novoselki et Chilova, plutôt que d'attaquer immédiatement.
Ce soir-là, sous la pression de ses subordonnés qui veulent en finir avec les Français, [[Mikhaïl Illarionovitch Golenichtchev-Koutousov|Koutousov]] accepte de passer à l'offensive, mais il commande fermement de ne porter l'attaque que le lendemain à la lumière du jour.
Le plan russe prévoit trois attaques. [[Mikhail Andreyevich Miloradovich|Miloradovich]]doit rester à l'Est, près de Yeskovo, et attaquer les IV{{e}} corps de [[Eugène de Beauharnais|Eugène]] et le I{{er}} corps de [[Louis Nicolas Davout|Davout]]. L'armée principale se sépare en deux groupes à Novoselki et Chilova. Le prince [[Dmitriy Vladimirovich Galitzine|Galitzine]] avec {{formatnum:15000}} soldats avancera directement au nord à travers Ouvarovo. [[Alexander Petrovich Tormasov|Tormasov]], avec {{formatnum:20000}} soldats encerclera Krasnoï par l'ouest en marchera à travers Koutkovo à Dobroïe, où il devra couper la route de retraite des Français vers Orcha. La colonne volante d'Ojarovsky agira indépendamment à l'Ouest et au Nord de Krasnoï.
Le 17 novembre, peu après 13h00, Koutouzov apprend de prisonniers que Napoléon restera à Krasnoï, et n'en sortira pas, comme Koutouzov l'avait prévu, ce qui le fait douter du bien-fondé d'une offensive de l'armée russe.
== La feinte de la Garde ==
==== Davout en danger ====
À 15h, les {{formatnum:9000}} hommes du I{{er}} corps de Davout quittent leur bivouac près de Rzhavka et se hâtent vers Krasnoi. Les rapports de la défaite d'Eugène, le jour précédent, sont tellement consternantes que Davout estime nécessaire d'abandonner son projet initial d'attendre le III{{e}} corps de [[Michel Ney|Ney]], qui n'a toujours pas quitté [[Smolensk]].
Miloradovich, reçoit la permission de reprendre son attaque par un massif barrage d'artillerie sur Davout près de Yeskovo. Dans la panique, les troupes françaises commencent à fuir par la route, se qui en fait des proies pour les attaques d'infanterie et de cavalerie des Russes. Le III{{e}} corps est bientôt menacé d'anéantissement.
==== Le pari de Napoléon ====
La situation de Davout, et le douloureux évènement de la journée précédente, alertent Napoléon sur les périls qui menacent la Grande Armée. L'attente de Ney et de Davout à Krasnoi n'est plus possible. Une attaque déterminée de Koutouzov serait la fin de la Grande Armée. Atteindre Orsha, 45 kilomètres à l'Ouest, avant les Russes, pour y trouver quelque approvisionnement est désormais le seul objectif des troupes françaises affamées.
Dans ce moment critique, Napoléon sent que pour la première fois depuis ces dernières semaines, c'est lui qui a l'initiative. Selon les écrits de Caulaincourt:
:{{Citation|''La tournure des évènements, qui bouleversaient tous les calculs de l'Empereur… auraient submergé tout autre général. Mais l'Empereur était plus fort dans l'adversité, et devenait plus obstiné quand le danger semblait imminent.''}}
Immédiatement, avant la tombée du jour, Napoléon prépare sa [[Garde impériale]] pour feindre un offensive contre Miloradovich et le gros de l'armée russe. L'artillerie de la Grande Armée est rassemblée comme pour le combat, et la Garde se met d'elle-même en colonnes d'attaque. Napoléon fait le pari que cette manœuvre inattendue dissuadera les Russes d'attaquer Davout.
Simultanément, les restes du IV{{e}} corps d'Eugène poursuivent leur marche à l'ouest de Krasnoi, pour sécuriser la route de retraite vers Orcha.
Napoléon espère repousser les Russes juste assez longtemps pour recevoir les renforts de Davout et de Ney, et reprendre immédiatement sa retraite avant de présenter son flanc à Kuotouzov dans son déplacement vers Orsha.
==== Sortie de la Garde ====
À 17h, {{formatnum:11000}} soldats de la Garde sortent de Krasnoi pour sécuriser le terrain aux abords de la ville vers l'Est et le Sud-Est. Tandis qu'une colonne de {{formatnum:5000}} hommes se déplace le long de la route de Smolensk, une autre de {{formatnum:6000}} hommes de la Jeune Garde dirigée par Roguet, marche au sud de la route vers Uvarovo. Le flanc gauche de la Jeune Garde est protégé par un bataillon d'élite des grenadiers de la Vieille Garde. Selon le terme de Ségur {{citation|''ils formaient un carré comme une forteresse.''}} Sur le flanc droit de ces colonnes se trouve le reste de la cavalerie de la Garde. La direction générale de l'opération est confiée au maréchal Mortier.
Sa canne à la main, Napoléon se place à la tête des grenadiers de la Vieille Garde, en déclarant
:{{Citation|''J'ai joué assez longtemps à l'Empereur! Il est grand temps de jouer au général!''}}
Face à la détermination de la Garde, Les Russes concentrent leurs colonnes d'infanterie, appuyées par toute la puissance de l'artillerie.
N'ayant pas assez de canons pour riposter, la Garde est malmenée par la puissance de feu de l'ennemi. Comme le décrit Ségur:
:{{citation|''Les bataillons russes et les positions d'artilleries barraient l'horizon sur les trois côtés - à l'avant, sur notre droite, et derrière nous.''}}
La réaction de Koutouzov à la sortie des Français est la plus rapide, la plus inattendue et la plus controversée: Malgré l'écrasante supériorité numérique des ses troupes, il annule l'offensive prévue. Les Russes passent le reste de cette journée, à distance de la Garde, hors de portée des fusils et des baïonnettes françaises, se contentant de les canonner à distance.
==== Combats près d'Uvarovo ====
[[Image:Louis nicolas davout.jpg|150px|thumb|Louis Nicolas Davout]]
Le peu de combat rapproché, qui a lieu ce jour-là se déroule durant la matinée et en début d'après-midi autour d'Uvarovo, où la garde impériale attaque le village pour couvrir le repli de Davout vers Krasnoi.
Uvarovo, occupé par deux bataillons d'infanterie de Galitzin, ne constitue qu'un faible avant-poste. et les Russes en sont rapidement chassés. Koutouzov ayant interdit à Galitzin de renforcer ses troupes, celui-ci réplique par un dévastateur barrage d'artillerie qui fait payer un lourd tribut à la Jeune Garde.
Afin de masser autant de forces que possible derrière Galitzin, Koutouzov ordonne à Miloradovich de changer sa position à l'Ouest, et de rejoindre les lignes de Galitzin. Les corps de Galitzin et Tormasov ayant déjà fusionné, l'essentiel de l'armée russe constitue une puissante position défensive. Si la décision de réaligner les troupes de Miloradovich est remarquable, celui-ci n'en perd pas moins, une fois de plus, l'occasion d'en finir avec Davout.
Pendant ce temps, au Nord, les troupes de Davout, harcelées par des nuées de Cosaques, qui ne font aucune sérieuse tentative pour les arrêter, commencent à arriver à proximité de Krasnoi. L'artillerie russe cause de nombreuses victimes dans les rangs du I{{e}} corps. La plus grande partie du train de bagages de Davout est perdue, mais de nombreux fantassins ont la vie sauve est sauve, et se rassemblent autour de leurs chef à Krasnoi.
Peu après, le général Bennigsen, second en âge après Koutousov, ordonne à Galitzin de reprendre Uvarovo. L'attaque de deux régiments de cuirassiers de Galitzin est repoussée par la contre-attaque simultanée d'une colonne de [[voltigeur]]s de la Garde qui forme le carré. Cependant, l'attaque suivante des Russes, perfore le carré français, et bientôt la plupart des voltigeurs français sont tués ou capturés. Une deuxième ligne, qui tente de les soutenir, tombe sous une puissante canonnade.
Non loin de là, un autre accrochage a lieu, où la division Néerlandaise de la Vieille Garde est chassée d'une position défensive avec des pertes massives, principalement dues aux tirs d'artillerie. Roguet tente de la soutenir en attaquant les batteries d'artillerie russe avec la Garde du {{1er}} régiment d'infanterie légère, mais cette offensive a été atomisée par les tirs et les charges de la cavalerie russes. Seulement cinquante soldats et onze officiers du {{1er}} d'infanterie légère survécurent à cette rencontre.
==== Retraite de Napoléon ====
Autour de 11h, comme la garde impériale, malgré de lourdes pertes, tient bon près Uvarovo, Napoléon reçoit des rapports affirmant que les troupes de Tormasov sont prêtes à marcher sur l'Ouest de Krasnoi. Cette nouvelle, conjuguée aux nombreuses pertes de la Jeune Garde, décide Napoléon à abandonner son idée de résister assez longtemps pour permettre au III{{e}} corps de Ney arriver à Krasnoi. Si Koutouzov choisi d'attaquer, la Grande Armée sera encerclée et détruite. Napoléon ordonne aussitôt à la vieille garde de se replier sur Krasnoi, puis de rejoindre le IV{{e}} corps d'Eugène, à l'Ouest vers Liady et [[Orsha]]. La Jeune Garde, à son point de rupture, reste près de Uvarovo, pour être relevée peu après par les troupes de [[Louis Nicolas Davout|Davout]] réorganisées à Krasnoi.
La décision de Napoléon semble ne pas avoir été facile à prendre. Ségur décrit les hésitations de l'Empereur comme suit:
:{{citation|''Ainsi, le 1er Corps a été sauvé, mais dans le même temps, nous avons appris que notre arrière-garde était à la rupture de sa résistance à Krasnoi, que [[Michel Ney|Ney]] n'avait probablement pas encore quitté [[Smolensk]], et que nous devions abandonner toute idée de l'attendre. Mais finalement, comme tout semble perdu, il décide de ce qu'il faut faire. Il appelle Mortier, le prend à part, et lui dit :"Il n'y a pas une minute à perdre! L'ennemi traverse de tous les côtés. Koutouzov peut atteindre [[Liady]], même [[Orsha]] et le [[Dniepr]] avant moi. Je dois passer rapidement, à la Vieille Garde d'occuper le passage. Davout va vous soulager. Ensemble, vous devez essayer de tenir Krasnoi jusqu'à la tombée de la nuit. Ensuite, vous me rejoindrez". Le cœur lourd avec le désespoir d'avoir à abandonner le malheureux Ney, il se retire peu à peu du champ de bataille, entre dans Krasnoi où il fait une brève halte, puis prend le chemin de Liady.''}}
Précédée par une foule de civils fugitifs, le IV{{e}} corps sort de Krasnoi par l'Ouest. Peu de temps après la Vieille Garde bouche la route d'Orsha avec des charriots.
Pendant ce temps, près de Uvarovo la capacité de résistance de la Jeune Garde diminue rapidement, et Mortier ordonne la retraite avant que les troupes restantes ne soit encerclés et détruites. Comme à l'exercice et parfaitement disciplinée, la Garde se retourne et reprend le chemin de Krasnoi, affrontant au passage un terrible barrage d'artillerie.
Le [[17 novembre]] fut probablement la plus sanglante journée de la Jeune Garde. Seulement {{formatnum:3000}} hommes sur les {{formatnum:6000}} qu'elle comptait encore survécurent aux bombardements russes d'Uvarovo.
La retraite de la Jeune Garde n'a pas pris fin avec son arrivée à Krasnoi. Mortier et Davout redoutaient tellement une attaque de Koutouzov qu'ils rejoignent immédiatement le flot des soldats et des charriots en route vers Liady. Seule une faible [[Arrière-garde (militaire)|arrière-garde]] commandée par le général Friedrich est laissée à Krasnoi.
==== Koutouzov retarde la poursuite ====
[[Image:Kutuzov1.jpg|150px|thumb|Mikhaïl Illarionovitch Golenichtchev-Koutousov]]
Pourtant pendant plusieurs heures, Miloradovich et Galitzin ne sont pas autorisées à attaquer Krasnoi.
À 14h, convaincu que les Français sont en pleine retraite et n'ont pas l'intention de résister à l'avance de ses troupes, Koutouzov permet enfin à Tormasov de commencer un mouvement enveloppant, de l'Ouest par Kutkovo, vers le Nord jusqu'à Dobroye. Cela prend à Tormasov deux heures pour arriver à destination. La possibilité d'encercler et détruire la Grande Armée était passée.
Vers 15h, les troupes de Galitzin s'engouffrent comme un torrent dans Krasnoi. L'[[Arrière-garde (militaire)|arrière-garde]] de Friedrich est submergée.
Simultanément, sur la routes de Liady, les Français rencontre un petit détachement d'Ozharovsky et Rosen. Dans un extraordinaire cafarnaeum d'explosions, de wagons renversés, de fugitifs paniqués, Napoléon prend chemin d'Orsha, protégé par les troupes de Cobert et [[Marie Victor Nicolas de Fay de La Tour-Maubourg|La Tour-Maubourg]], qui tiennent les Russes à distance
Le dernier évènement de la journée a lieu dans Dobroye, lorsque le train de bagages du I{{er}} corps, et les effets personnelles de Davout, tombent aux mains des [[Cosaques]]. Parmi le butin capturé, les Russes s'emparent d'une armure de guerre, une pléthore de cartes du Moyen-Orient, d'Asie centrale et de l'Inde, et le bâton de maréchal de Davout<ref>L'ambigu - page 687</ref>.
À la tombée de la nuit, du 17, Koutouzov et {{formatnum:70000}} soldats occupent Krasnoi et ses environs. Le maréchal Ney, qui n'a quitté [[Smolensk]] que le matin même et progresse sur Krasnoi ne se doute pas encore que la Grande Armée n'en est plus à attendre l'arrivée de son III{{e}} corps.
== 18 novembre: l'anéantissement de Ney ==
[[Image:Michel ney.jpg|150px|thumb|Michel Ney]]
À 15h, le [[18 novembre]], III{{e}} corps de [[Michel Ney|Ney]] de trouve au contact de Miloradovich, qui a envoyé {{formatnum:12000}} hommes sur une colline surplombant le profond ravin de la [[Losmina]]. Ney a encore {{formatnum:8000}} soldats et {{formatnum:7000}} volontaires sous son commandement<ref>{{formatnum:7000}}à {{formatnum:8000}} hommes plus des trainards que les canons de Platov ont remis en route. Selon Antoine Eugène de Genoude dans son Histoire de France - Page 410</ref>.
Estimant que Davout est toujours à Krasnoi, directement derrière les colonnes de Miloradovich, Ney rejete une offre de reddition honorable, et tente de se frayer un chemin à travers les rangs ennemis. Les troupes françaises réussissent à percer les deux premières lignes d'infanterie russe. La troisième ligne cependant contre-attaque. Un témoin oculaire à cet engagement, le général anglais Sir [[Robert Thomas Wilson|Robert Wilson]], décrit la scène de la façon suivante:
:{{citation|''Quarante pièces de canon, vomirent simultanément leurs flammes et versairent leur funeste douche sur les assaillants français. La plupart des Russes criant à l'avance, leur "huzza", avait surgi baïonnette au canon, et sans un tir de fusil. Une courte lutte sanguinaire, s'ensuivit, l'ennemi ne pouvant tenir tête et fut chassés vers le bas du ravin. Le sommet et les pentes de la colline étaient couverts de Français morts ou mourants, toutes les armes russes étaient ruisselantes de sang et les blessés, dans leur état désespéré imploraient "la mort", comme la plus grande pitié qui pourrait leur être administrée''}}
La terrible défaite du III{{e}} corps est si complète que le chevaleresque Miloradovich fait à Ney une autre proposition de reddition. Encore une fois, Ney refuse de se soumettre, et avec {{formatnum:2000}} rescapés<ref>Ayant choisi {{formatnum:4000}} hommes d'élite il se sépara du reste de sa division, se mit en marche à la tombée de la nuit... Histoire de France - Page 410</ref> - tout ce qui reste de son armée - parvient à s'échapper, poursuivis dans la forêt par les [[Cosaques]] de [[Matveï Platov|Platov]].
Pendant les deux prochains jours, Ney et son petit parti de braves, tentent de se tenir hors de portées des attaques cosaques, marchant à l'Ouest par des sentiers à la recherche de l'armée de Napoléon. Les éléments et les Cosaques réduisent bientôt son contingent à seulement 800 survivants.
Le [[20 novembre]], Ney et Napoléon se retrouvèrent enfin près d'Orsha. Pour les troupes françaises complètement démoralisées, cet évènement fut considéré comme l'équivalent émotionnel d'une grande victoire<ref>{{Citation|''Ney n'avait pas couru dans cette occasion la moitié des dangers personnels auxquels il s'était si valeureusement exposé à Elchingen, mais l'action la plus simple paressait héroïque dans la situation désespérée où nous étions.''}} - Vie politique et militaire de Napoléon - page 190</ref>.
À Krasnoi, le tempérament d'acier de Ney, face à la défaite lui valut d'être immortalisé dans les annales de l'histoire militaire. Napoléon lui décernant désormais le titre de "Brave des braves."
== Conséquences ==
Le total des pertes françaises à Krasnoi est estimé entre {{formatnum:6000}} et {{formatnum:13000}} morts et blessés et {{formatnum:20000}} à {{formatnum:26000}} disparus ou prisonniers. Parmi eux se trouvait [[Jean-Victor Poncelet]], le futur inventeur de la géométrie projective. Les Français perdirent également près de 200 pièces d'artillerie et une très grande partie de leur train. Les pertes Russes sont estimées à moins de {{formatnum:5000}} mort ou blessés.
Napoléon ramena avec lui 75% des combattants des I{{er}} et IV{{e}} corps de la garde impériale, gardant ainsi l'espoir d'utiliser ces hommes comme un noyau autour duquel il pourrait reconstruire son armée l'année suivante.
Il ne reste plus à Napoléon que {{formatnum:30000}} hommes et 25 canons et plus de cavalerie.<ref>Histoire abrégée des traités de paix, entre les puissances de l'Europe... - page 170</ref>
Krasnoi est une victoire russe, mais la jugeant très insuffisante, le Tsar [[Alexandre Ier de Russie|Alexandre I{{er}}]] était furieux contre Koutouzov lorsqu'il appris du vieux maréchal que l'armée française n'était pas totalement anéantie. Néanmoins, en raison de l'immense popularité de Koutouzov dans l'aristocratie russe, Alexandre lui concéda la victoire et le titre de ''Prince de Smolensk''.
==Notes==
<references />
== Sources ==
* {{Traduction/Référence|en|Battle of Krasnoi}} dans sa version du 10 décembre 2007
* Histoire abrégée des traités de paix, entre les puissances de l'Europe ... - De Frédéric Schoell - 1818
* Histoire politique et militaire du prince Eugène Napoléon, vice-roi d'Italie - de Frédéric Guillaume de Vaudoncourt - 1828
* L'ambigu - De Jean-Gabriel Peltier - 1813
* Histoire de France - abbe Antoine Eugène de Genoude - 1848
* Considérations sur les grandes opérations de la compagne de 1812, en ... - Nīkolaĭ Aleksandrovīch Okunev - 1842
* Vie politique et militaire de Napoléon - Antoine Henri de Jomini - 1827
* Les bulletins françois, concernant la guerre en Russie, pendant l'année 1812 - de France, Sovereign (1799-1814 : Napoleon I - 1813
{{Epopée}}
{{Portail|Russie|histoire militaire}}
{{DEFAULTSORT:Krasnoi, bataille de}}
[[Catégorie:Campagne de Russie]]
[[Catégorie:Bataille des guerres napoléoniennes]]
[[Catégorie:Bataille de Russie]]
[[Catégorie:Bataille de 1812]]
[[cs:Bitva u Krasného]]
[[en:Battle of Krasnoi]]
[[it:Battaglia di Krasnoi]]
[[pl:Bitwa pod Krasnym]]
[[ru:Сражение под Красным]]