Cantine 442685 31867197 2008-07-25T07:01:45Z Égoïté 312601 /* Liens externes */ [[Image:CMI canteen.JPG|thumb|Cantine universitaire à Chennai, [[Inde]]]] ==Étymologie== On admet généralement que cantine dérive directement de l'italien ''cantina''<ref>Cf. Ottorino Pianigiani, ''Vocabolario Etimologico della Lingua Italiana'', 1907 ([http://www.etimo.it/?term=cantina en ligne]).</ref>, signifiant cave, cellier. Le ''Robert historique'' d'[[Alain Rey]] affirme, par exemple, que cantine est ''emprunté (1680) à l'italien cantina « cave, cellier » (après 1250), dérivé de canto « angle » d'où « coin retiré, débarras »''<ref>Cf. A. Rey, T. I, 1992, p. 340 (cantine), 341 (canton) et 388 (chant).</ref>. [[Gilles Ménage (grammairien)|Gilles Ménage]] proposait comme origine ''canova''<ref>Cf. Littré, [http://francois.gannaz.free.fr/Littre/xmlittre.php?requete=cantine&submit=Rechercher en ligne].</ref> (cave) et [[Amédée Tardieu]], sous-bibliothécaire de l'Institut, le latin ''quintana''<ref>Probablement dans son [[Strabon]], de 1867-1880 ; cf. [http://www.sudoc.abes.fr/DB=2.1/SET=2/TTL=11/CLK?IKT=1&TRM=Tardieu,Ame%CC%81de%CC%81e sudoc].</ref>, lieu des camps romains où l'on vendait toutes sortes de choses. Hélène Cuvigny dément cette dernière hypothèse.<ref>Dans son [http://www.ifao.egnet.net/uploads/publications/corrigenda/IF904_corrigenda.pdf ''Corrigenda : Quintana, la femme métamorphosée en taxe''] à ''La Route de Myos Hormos'' (dans ''[[Institut français d'archéologie orientale|FIFAO]]'', 48, 2{{e}} éd. 2006, p. 691, n. 9 {{ISBN|2-7247-0340-5}}), elle note à propos du ''quintana'' de Suétone : ''Cette fonction de la ''via quintana'' ressort de Tite Live (41.2.11) et de Suétone (''Ner.'' 26) ; chez ce dernier, on voit comment ''quintana'' en vient par métonymie à signifier « marché » : dans sa jeunesse, Néron avait institué une quintana dans son palais même, où le butin de ses rapines nocturnes perpétrées à travers la ville était vendu aux enchères : ''quintana domi constituta, ubi partae et ad licitationem dividendae praedae pretium absumeretur''. L'éditeur de la ''CUF'' traduit astucieusement ''quintana'' « cantine », mot qui désigne, entre autres, un « endroit où l'on vend des boissons, de la nourriture, de menus objets aux membres d'une collectivité » (''[http://atilf.atilf.fr/ Trésor de la langue française]''). Mais l'étymologie de « cantine » ne remonte pas à ''quintana''.''</ref> [[Pierre Larousse]] indique que cantine vient de « canton »<ref>''[[s:Grand dictionnaire universel du XIXe siècle|Larousse du XIX{{e}} siècle]]'', 3, Paris, 1867, p. [http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k39790g/f294.CadresPage 290] (cantine) et [http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k39790g/f296.CadresPage 292] (canton).</ref> dont la signification primitive était celle de coin, d'angle. Le terme « canton » est d'origine germanique : on le trouve en [[Vieux haut allemand|ancien haut-allemand]] (''kant'' = coin, extrémité), en anglo-saxon (''cant''), en anglais (''cantle''), mais aussi en ancien [[provençal]] (''can'' = côté, bord), en italien (''canto'' ou ''cantone'' et ''cantina'') et en espagnol (''canton'' et ''cantina''). ==Définition== [[Image:Tranby house 55 gnangarra.jpg|thumb|Cantine à usage médical]] Le mot est attesté au {{XVIIe siècle}} comme une [[Malle (bagage)|malle]] à compartiments pour le transport de bouteilles et parfois de vivres. L'utilisation d'un tel mobilier est cependant plus ancien. Durant tout le Moyen Âge, nobles et marchands, très souvent sur les grands chemins, transportaient avec eux les ustensiles nécessaires à la vie matérielle – et notamment couteaux, petite vaisselle de table, coupes, épices, [[Cordial (homonymie)|cordiaux]] dans de petits flacons. Cette habitude d'emporter avec soi affaires et mobilier personnels a perduré à tel point que [[Eugène Viollet-le-Duc]] cite le cas d'un ''auguste personnage qui ne voyageait qu'avec son lit''... au {{XIXe siècle}}.<ref>Eugène-Emmanuel Viollet-le-Duc, ''Dictionnaire raisonné du mobilier français de l'époque carolingienne à la Renaissance'', Morel, Paris, 1871.</ref> Par extension, on va nommer cantine l'endroit même où se trouve ce coffre à flacons, et utiliser le même mot pour désigner la malle d'effets personnels des officiers en déplacement. {{Citation bloc|À toucher la table, une cantine métallique juchée sur quatre bois était ouverte, à demi pleine de bouquins et de cahiers. sur un pile, une machine à écrire portative. plus loin, dans un angle, une autre cantine était fermée au cadenas.<ref>Robert Le Roy, ''Méhariste au Niger Souvenirs sahariens'', Karthala, Paris, 1997</ref>}} Dès le {{XVIIIe siècle}}, la cantine est aussi le magasin de vente de [[tabac]], [[aliment]]s et [[boisson]]s aux soldats. [[Image:NAFFI Mobile Canteen No.750 beside the Brandenburg Gate.jpg|thumb|Cantine de l'armée US à Berlin]] À la moitié du siècle suivant, le terme désigne également ce même magasin dans une [[collectivité]] civile : [[hospice]], [[école]], [[prison]], etc. Au {{XXe siècle}}, la cantine indique à la fois et le magasin et le lieu où l'on mange – que ce restaurant relève de l'initiative individuelle ou [[restauration collective|collective]]. {{Citation bloc|Sur le port de Port of Spain, cet immense hangar abrite des dizaines de petites cantines où des cuisinières s'affairent quotidiennement à préparer tous les plats traditionnels de la cuisine populaire trinidadienne. Les cantines dessinent un « U » autour de la partie centrale de la salle qui sert de réfectoire, meublée de longues tables et de bancs en bois. Sorte de supermarché de la cuisine de ménage, on y choisit son plat en déambulant à la ronde, en posant quelques questions sur telle préparation ou recette et en jugeant du caractère plus ou moins appétissant des plats proposés. Il est tout à fait possible d'acheter son assiette de viande ou de poisson chez une cuisinière et de prendre ses légumes et sa boisson chez une autre. À l'origine, cette cantine, créée dans les années 1930, n'accueillait que les ouvriers du port. Progressivement, la réputation aidant, elle s'est ouverte à tout le monde et si on n'y voit pour l'heure qu'assez peu de touristes, on y croise autant de cols bleus que de cols blancs.<ref name = "Futé">Pierre Binczak, ''Petit Futé Trinidad et Tobago 2004/2005'', Nouvelles éditions de l'université, Paris. </ref>}} Magasin fixe ou ambulant (charrette, automobile, wagon ferroviaire), la cantine peut comprendre ou non une [[cuisine (pièce)|cuisine]]. {{Citation bloc|La ville est truffée de petits restaurants et ses trottoirs sont constamment jalonnés de vendeurs de rue qui proposent « rôtis » et « doubles » en poussant leur cantine sur des charrettes à roues.<ref name = "Futé"/>}} {{Citation bloc|Occasionnellement, les soldats américains sont transportés par des trains canadiens. Dans un cas, 500 soldats sont placés à bord d'un train militaire canadien. « Avant, ils n'avaient, pour toute nourriture, que des boîtes-repas ou de la nourriture qu'ils recevaient de la Croix-Rouge, le long de la voie, lorsque c'était possible. Ils ont été tout simplement ébahis de voir comment le Canada traitaient (sic) ses soldats. Lorsque les soldats américains ont quitté la voiture-cantine, après un repas copieux dans un environnement raffiné, un grand sergent a déclaré : 'Les gars, nous ne nous sommes pas engagés dans la bonne armée!' »<ref>Canada's National Railways: Their Part in the War d'Osborne Scott, Toronto, Canadian National Railways, 1921, p. 99. [http://collectionscanada.gc.ca/trains/enfants/h32-4060-f.html]</ref>}} Sur le plan social, la cantine est fréquentée depuis le plus jeune âge (à l'école maternelle) jusqu'aux dernières années de la vie (dans les maisons de retraite) ; on en trouve dans les entreprises, dans l'administration, dans les hôpitaux, les prisons, l'armée, les attractions touristiques... Sur le plan qualitatif, la cuisine traditionnelle avec des mets destinés à être consommés directement sur place est souvent remplacée par une « [[cuisine de terminaison]] », une « [[cuisine d'assemblage]] » ou une « [[cuisine de composition]] », intégrant des produits élaborés en amont, précuits ou surgelés. ==Importance sociale== La cantine a joué un important rôle sur le plan social dès le {{s|XVIII|e}}. ===Cantine de l'armée=== [[Image:Sta-18eChass-cantine.jpg|thumb|Cantine à l'armée]] Au {{s|XVIII|e}}, un grand nombre de soldats boivent beaucoup d'[[Boisson alcoolisée|alcool]] et notamment, au [[Canada]] par exemple, du [[rhum]] de mauvaise qualité mais fortement alcoolisé (78% vol.) dans les tavernes des villes de [[garnison]] ou dans les cabarets ambulants qui suivent les régiments en marche. L'armée, en favorisant la création de « '''cantines régimentaires''' » où la [[bière]] coute moins cher que le rhum, tente de résoudre le problème. Les règlements vont devenir de plus en plus sévères, allant parfois jusqu'à la création de « '''cantines sèches''' » où l'alcool est totalement absent.<ref>[http://www.cmhg.gc.ca/cmh/fr/page_523.asp Patrimoine militaire canadien, annexe B La vie quotidienne des soldats et des officiers] et [http://www.lac-bac.gc.ca/premiereguerre/05180104/051801040303_f.html Bibliothèque et archives du Canada]</ref> Rien n'empêche cependant les militaires d'aller se désaltérer en ville... et l'alcoolisme reste l'un des problèmes majeurs de l'armée. L'importance des cantines ambulantes en temps de guerre n'est plus à démontrer sur le plan de la vie même des troupes ; son impact moral ne peut être non plus ignoré.<ref>Voir [[Bataille de Suomussalmi#Analyse|Démoralisation de l'ennemi]].</ref> ===Cantine de prison=== [[Image:A-Block at Alcatraz (2206096229).jpg|thumb|Prison d'Alcatraz]] La cantine de prison fournit – selon les époques, les lieux et les catégories de détenus – un complément apprécié de [[vivres]], [[boisson]]s, [[tabac]] (souvent de médiore qualité ) et objets de première nécessité, [[papier]], [[encre]], [[Plume (écriture)|plume]]s, [[journal|journaux]] ; selon les cas aussi (gestion par l'administration ou par un entrepreneur privé), les tarifs sont modérés<ref>Ramon de la Sagre, ''Voyage en Hollande et en Belgique'', Arthus Bertrand, Paris, 1839.</ref> ou non. La privation de cantine constitue donc une punition et, à ce titre, fait partie des instruments de gestion de la prison.<ref>Benjamin Nicolas Marie Appert, ''Bagnes, prisons et criminels'', Roux, Paris, 1836.</ref><br> Or la cantine de prison est parfois le seul lieu où les prisonniers peuvent échanger des informations ([[Évasion d'Alcatraz de 1962]])... ===Cantine d'entreprise=== [[Image:1915-1916 - Femme au travail dans une usine d'obus.jpg|thumb|Femmes à l'usine, 1915-1916]] La [[Révolution industrielle]] modifie le tissu et les habitudes sociales. Un certain nombre d'industriels, comme [[Georges Gaillard#Activité Sociale|Georges Gaillard]], [[Gustave Boël]], [[Ernest Solvay]] ou [[Grand-Hornu|Henri de Gorge]], tentent d'améliorer les conditions de vie des ouvriers et créent [[Cité ouvrière|cités ouvrières]], [[Coron (urbanisme)|corons]] ou simplement cantines. Au {{XIXe siècle}}, la cantine d'entreprise doit faire face aux habitudes culturelles : le [[repas]] de midi étant traditionnellement préparé par la [[femme au foyer]], nombre d’époux rentrent manger chez eux. Lorsque la femme est elle-même ouvrière, si elle obtient une pause de midi plus longue pour pouvoir rentrer à la maison accueillir la famille avec un repas chaud, elle ne peut que réchauffer des plats cuits à l'avance. Si elle ne peut retourner au [[Foyer (logement)|foyer]], l'homme doit se contenter d'un repas froid, de réchauffer lui-même la nourriture qu'il a emportée ou, si le budget du ménage le permet, d'aller à la cantine mais les ouvriers refusent généralement d'y manger. {{Citation bloc|En 1925 encore, chez [[Krupp]], seulement un quart environ des ouvriers fréquentaient les cantines.<ref>Alf Lüdtke (dir.), ''Histoire du quotidien'', Éd. de la Maison des sciences de l'homme, Paris, 1994.</ref>}} Les femmes ouvrières qui font la journée continue<ref>cf [[Centre national de ressources textuelles et lexicales]] : « Journée continue. Journée de travail qui ne comporte qu'une interruption assez brève pour le déjeuner mais en contrepartie se termine plus tôt. "L'adoption de la « journée continue » nécessitera d'importants changements dans les habitudes (alimentaires), en particulier un petit déjeuner plus copieux et un dîner servi plus tôt (...). Pour aider à mettre au point cette « journée continue », il faut encore des cantines scolaires pour les enfants des femmes qui travaillent, des restaurants d'entreprises" (''Le Monde'', 21 janv. 1965 dans Gilb. 1971) »</ref> perçoivent assez positivement l’existence d’une cantine, mais les autres n’envisagent celle-ci que comme un pis-aller et non comme remplaçant le travail de cuisine. Elles ne prennent pas en compte le gain de temps des trajets et considérent le service collectif de repas comme un substitut de cuisine « vite-faite » qui ne peut remplacer leur propre pratique de « vraie » cuisine...<ref>Annie Dussuet, ''Logiques domestiques Essai sur les représentations du travail domestique chez les femmes actives de milieu populaire'', L'Harmattan, Paris, 1997.</ref> ===Cantine scolaire=== [[Image:Max Liebermann Kindervolksküche.jpg|thumb|Cuisine populaire pour enfants par [[Max Liebermann]]]] La cantine scolaire fut, au départ et dans les pays industralisés, une réponse à la nécessité sociale de préserver la santé des enfants nécessiteux. Elle exerce toujours cette fonction dans d’autres parties du [[monde]].<ref>Exemple : Pour lutter contre la [[malnutrition]] [[protéine|protéique]] grave chez les enfants de la Huancavelica, l’une des régions les plus pauvres du [[Pérou]], une cantine a été installée pour les enfants d’âge [[préscolaire]] et [[scolaire]]. [ftp://ftp.fao.org/docrep/fao/W9474t/W9474t07.pdf Document de la [[FAO]].]</ref> Les cantines permettent d’améliorer la [[nutrition]] et participent de ce fait à l’évolution positive d’un pays.<ref>[http://www.fao.org/docrep/003/X9800F/x9800f07.htm Liens entre la [[croissance économique]] et la nutrition, document de la [[FAO]]].</ref> En [[Afrique]], l’existence de cantines aide à la [[scolarisation]] des fillettes et, par conséquent, à l’[[Condition féminine|émancipation féminine]].<ref>[http://www.fao.org/sd/dim_kn2/kn2_041001a1_fr.htm Document de la [[FAO]]].</ref> Mais le continent africain manque de systèmes efficaces de [[restauration collective]] et la cantine n’y est pas forcément un service organisé : l’appellation « cantine scolaire » est parfois attribué à un ensemble de [[marchand]]s de rue qui offrent des possibilités de repas.<ref>[ftp://ftp.fao.org/docrep/fao/W3699T/W3699t03.pdf Cantine scolaire de Cotonou, document de la [[FAO]]].</ref> Comme au {{XIXe siècle}} en France<ref>Voir [[Mouy#Histoire|Mouy, 1894]]</ref>, c'est la présence d'une cantine scolaire et donc l'assurance d'un repas qui, dans bien des pays, incite les parents à envoyer l'enfant à l'école. Cependant le cout du transport, des fournitures et de la cantine doit être souvent compensé par le travail de l'enfant et celui-ci... peut empêcher la présence régulière aux cours.<ref>[[Travail des enfants#Faiblesse de la scolarisation et des politiques sociales|Travail des enfants]]</ref> De façon générale, la cantine scolaire permet à ceux qui ne peuvent rentrer chez eux, en raison du travail [[parent|parental]], d'avoir un repas chaud. Elle constitue aussi pour les élèves un lieu et un temps d'échange, de [[Wikt:sociabilité|sociabilité]] et de [[socialisation]]. [[Image:Philip Absolon. College Canteen.jpg|thumb|Cantine de collège par Philip Absolon]] La [[Wikt:modicité|modicité]] du repas<ref>Dans certains pays, la cantine est gratuite à l'école primaire et secondaire. Voir [[Système éducatif finlandais]]. </ref> impliquant des [[aliment]]s nourrissants mais bon marché, les plats proposés ne respectent pas forcément les principes [[diététique]]s ; aussi une [[législation]] est-elle intervenue dans les [[pays riche]]s. Cependant, si la nourriture servie aux élèves est aujourd’hui contrôlée sur le plan de l’[[hygiène]] et de l’équilibre diététique, rien n’empêche l’enfant de délaisser certains aliments au profit d’autres, car au {{s|XX|e}}, on est passé progressivement du service d’une nourriture identique pour tous au [[libre-service|self-service]] qui permet à chacun de préserver son [[Pratique alimentaire|régime alimentaire]] personnel en fonction de ses gouts, d'impératifs médicaux ou de convictions [[religieuses]] – ce qui provoque d’ailleurs parfois un vif débat entre ceux qui demandent l’introduction de plats [[casher]] ou [[halal]] et les tenants d’une [[alimentation]] générale qui vont parfois jusqu'à exclure de la cantine des élèves refusant de manger des mets non préparés selon leur code religieux.<ref>[[Mouvement contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples#Controverses|Prises de position du MRAP]].</ref> La cantine scolaire dépendant d'une municipalité a parfois été aussi un lieu de discrimination par l'interdiction d'enfants de nationalité étrangère.<ref>Voir [[Pierre Bernard (homme politique)|Montfermeil, 1988]] et [[Fédération des conseils de parents d'élèves#Exemple d'actions|Beaucaire (Gard), 1989]].</ref> La cantine scolaire aborde, surtout en [[Occident]], un nouveau rôle de dimension culturelle, celui d’''exemple'', car elle constitue l’un des rares lieux éducatifs sur le plan alimentaire. Elle doit développer une mission d’information diététique car l’enfant qui la fréquente n’y prend que 4 repas par semaine, soit 1/7« e » de ses repas hebdomadaires. Or l’alimentation des enfants et adolescents devient partout dans le monde un véritable enjeu de société et de santé publique. Mais cette dimension éducative se heurte encore aux impératifs économiques, comme aux États-Unis : {{Citation bloc|De nos jours, un repas d’écolier a toutes les chances d’être constitué de hamburgers Mc Donald’s ou de pizzas Domino’s, le tout arrosé d’un Coca géant. Et alors que les programmes d’[[éducation physique]] sont rognés pour des raisons budgétaires, le marché des cantines est octroyé à des [[chaîne]]s de [[fast-food]] comme McDonald’s, Domino’s ou Taco Bell.<ref> Jane Goodall, ''Nous sommes ce que nous mangeons'', Actes Sud, Arles, 2008 p.225</ref>}} D’autre part, avant même de parler diététique, la cantine doit aider parents et enseignants à informer l’enfant sur les produits de base. {{Citation bloc|Lors d’une tentative d’amélioration des repas de cantine au Royaume-Uni, les écoliers reçurent des [[pomme]]s ou des [[orange]]s entières, certains ne savaient pas ce que c’était, ils n’avaient jamais eu affaire à un [[fruit]] entier de leur vie.<ref>''idem'' p.228</ref>}} ===La cantine scolaire laïque française=== À Paris, [[Louise Michel]] crée une cantine en 1870 pour les élèves de l'externat qu'elle a fondé. L'an suivant, la [[Commune de Paris]] propose, parmi de nombreuses réformes, la gratuité de la cantine scolaire. En 1881, la loi "Jules Ferry" crée l'école laïque et obligatoire ; la ville de Paris offre aussitôt une aide alimentaire aux élèves pauvres de ses écoles. Selon l'âge des élèves et le type d'établissement scolaire, l'organisation de la « Restauration Hors foyer » (RHF) ou « Restauration Hors domicile » (RHD) incombe aujourd'hui aux municipalités, aux collectivités et/ou au ministère de l'Éducation Nationale. La cantine scolaire laïque française est dans la lignée du courant éducatif laïc clairement issu de la tradition de [[Condorcet]]<ref>[[Éducation populaire]]</ref> Mais au nom du principe de laïcité, et en fonction de la tendance politique, la cantine semble tenue ou non à offrir certains aliments<ref>Journal français [[Libération]], Mathieu Lindon, « La laïcité ou la mort », 5 juillet 2008 [http://www.liberation.fr/rebonds/chroniques/voxpopuli/337076.FR.php]</ref>, certains allant jusqu'à affirmer que « L’achat de produits à label religieux« cacher » ou « halal » par une administration publique est un délit pénal puisqu’une administration publique ne peut subventionner aucun culte ni directement, ni indirectement. »<ref>Alain Geoffroy, « Chance ou fléau, moi j'ai choisi.», 28 novembre 2007 [http://www.fn93.net/quotidien.php]</ref> ===L'organisation de la cantine=== En 2004, un [[Big Brother Awards]] est décerné à GIXEL (Groupement des industries électroniques) - Orwell Novlang, qui suggère que les méthodes [[biométrie|biométriques]] soient utilisées par les enfants, notamment pour déjeuner à la cantine. Autant dire que cela exprime bien la réticence de certains devant ce qui est considéré comme une menace contre la vie privée. En 2007, des écoles, comme l'école primaire de [[Saint-Médard-d'Eyrans]] utilisent des badges à puce pour la facturation de la cantine et de la garderie. Le débat n'est pourtant pas clos.<ref>Journal belge ''La Dernière Heure'', C. Bo, « Il ne faut pas "tout robotiser », 1{{er}} juillet 2008.[http://www.dhnet.be/infos/belgique/article/213341/il-ne-faut-pas-tout-robotiser.html]</ref> ===Rôle complémentaire=== En [[Wallonie]], la cantine a aussi constitué, au {{s|XX|e}}, un lieu de rassemblement et de convivialité – en-dehors des heures de repas – pour les travailleurs immigrés, et particulièrement pour les [[Italie|Italiens]] qui s'y retrouvaient le dimanche pour bavarder, jouer aux cartes ou aux boules (sorte de jeu de [[pétanque]]) et manger ensemble un plat de leur pays comme la [[pizza]].<ref>''Soumagne initiatives. Bulletin d'information de l'Echevinat des indépendants'', 7, Soumagne, juin 2008 ([http://www.soumagne.be/sites/modules_ntl/visiteur/soumagne2006/documents/soumagneinitiatives/soumagneinitiatives.pdf en ligne]).</ref> À [[Houdeng-Goegnies]], à proximité des [[ascenseurs à bateaux du Canal du Centre]], classés [[patrimoine mondial]] par l'[[UNESCO]], les usines [[Gustave Boël|Boël]] firent construire, peu après la [[Seconde Guerre mondiale]] des logements en matériaux robustes pour les travailleurs immigrés suite aux accords signés entre la [[Belgique]] et l'Italie. Cette « Cantine des Italiens » est aujourd'hui un [[musée]] de l’immigration italienne.<ref>[http://www.lalouviere.be/Decouvrir/Circuits.htm#La%20Cantine%20des%20Italiens Circuit touristique de [[La Louvière]]]</ref> En France, la cantine a inspiré [[Coluche]] pour le lancement des [[Les Restos du Cœur|Restos du Cœur]]. L'installation d'une cantine a parfois permis la survie d'une école ou la repopulation d'un village.<ref>Voir [[Villers-en-Arthies#Histoire|Villers-en-Arthies, 1990]].</ref> ==Réputation de la cantine== [[Image:Hospital food NY.jpg|thumb|Aliments pulvérisés et moulés pour ressembler à des tranches de boeuf et des petits pois ; ces derniers sont, en fait, de la purée de brocoli. Dans un hôpital de New York.]] Bien sûr pour le petit enfant, aller à la cantine c'est ne plus manger le repas préparé par le parent, c'est devoir parfois – ou souvent – se forcer à avaler des mets qu'on n'aime pas, c'est devoir changer d'habitudes alimentaires. Le côté affectif joue bien entendu, mais il ne peut justifier la mauvaise réputation qu'ont les cantines depuis des décennies. Une diététicienne de l'hôpital de [[Besançon]], Florence Schaller-Lanier, a évalué la qualité des repas cuisinés à la maison d’arrêt de [[Dijon]] : {{Citation bloc|Après plusieurs mois d’étude, les conclusions se résumaient en trois mots : monotonie, tristesse, carences. Les quantités, d’un point de vue calorique, se sont révélées satisfaisantes mais nous avons constaté une absence de diversité dans les menus, des carences importantes en vitamine C (insuffisance de fruits et légumes frais) et calcium (par manque de produits laitiers), une hygiène aléatoire.}} La mauvaise image de la cantine scolaire, ou autre, est principalement due à la monotonie et à la tristesse des repas qui furent proposés si longtemps : pâtes, boulettes, purée, petits pois, jambon, épinards... Une nourriture parfois rare, souvent lourde, voire indigeste, de la [[Wikt:ragougnasse|ragougnasse]], qui en a mené certains à la révolte.<ref>Voir Auguste Angellier#Biographie|Auguste Angellier</ref> L'obligation de manger « toute son assiette » est aussi difficilement acceptable – sauf lorsqu'on aime ça à en mourir.<ref>Dans [[Takeru Kobayashi]] : « Les concours de « plus gros mangeur » étaient très populaires à la télévision japonaise jusqu'à ce qu'un adolescent de 14 ans ne meure d'excès alimentaire à la cantine de son école en 2002 ». </ref> Les gens ont également mis en doute la qualité nutritionnelle des aliments ou... leur origine, comme l'exprime si clairement [[Pierre Perret]]<ref>Dans ''C'est bon pour la santé'', 1972.</ref> : ::Je comprends pas maman que ça t'affole ::Ça qu'on mange à la cantine de l'école ::Ils l'on bien précisé tout est pulvérisé ::Traité piqué aseptisé ça peut pas nous peser ::Crois-moi qu'avec toutes ces vitamines ::Le chlorate et la pénicilline ::Qu'y a dans les épinoches ::Et les chipolatas ::Y a pas un astibloch ::Qui viendrait y faire sa casbah ::(...) ::Question de la bidoche y a rien à redire ::Tout ce qui est pas au granulé on le vire ::Le directeur est formel ::Y dit que ça serait mortel ::Si tout d'un coup comme ça on bouffait des trucs naturels ::Tout ce qui est douteux y fait le sacrifice ::Il l'envoie aux vioques dans les hospices ::Ça part dans les casernes aux cuisines des prisons ::Ça y a suffit d'une fois qu'ça y a fait crever ses cochons Pour certains, la cantine est aussi [[synonyme]] de [[pauvreté]] : À Saint Louis de Bourdon, « le service de la cantine est considéré par la Soeur directrice comme un don, c'est-à-dire une action caritative, car c'est surtout avec le « manger sinistré » donné par les organismes d'assistance alimentaire comme le [[CARE]] (Centre américain de nutrition) que les autres écoles arrivent à faire fonctionner leur cantine. Cela a un sens péjoratif pour les enfants issus de familles aisées. La Cantine est considérée comme une « oeuvre de charité » pour les populations pauvres et non comme un service social nécessaire au bon fonctionnement de l'établissement. »<ref>Louis Auguste Joint, ''Système éducatif et inégalités sociales en Haïti: Le cas des écoles catholiques'', L'Harmattan, Paris, 2007</ref> La cantine toutefois a aussi de bons côtés : [[Image:A salad that will be served to a detainee at the U.S. detention facility at Guantanamo Bay, Cuba.jpg|thumb|Salade pour détenu au [[Camp de Guantanamo]], Cuba]] ::Je préfère manger à la cantine ::Avec les copains et les copines ::Et même si la viande est dure comme du caoutchouc ::Au moins je suis sur de rigoler un bon coup ::(...) ::À la maison on ne peut pas manger avec les doigts ::C'est défendu de jouer aux billes avec les petits pois ::Ce n'est pas marrant d'être à table ! ::À la cantine on se bagarre avec la confiture ::On s'en met plein les mains, plein les habits, plein la figure ::Et quand y'en a un qui rouspète, on lui fait manger son assiette<ref>[[Carlos]], ''La cantine'', paroles et musique de Jim Larriaga, 1973.</ref> Et même d'excellents aspects : l'actrice [[Barbara Schulz]] apprécie le homard servi à la cantine de la production américaine ''French Kiss'', les repas du [[Château de l'Empéri|lycée de l'Empéri]] sont réputés, etc. Étant donné « l’existence de risques de déséquilibre alimentaire plus importants pour les élèves qui ne déjeunent jamais à la cantine et pour ceux qui grignotent, à midi ou en dehors des repas »<ref>Cerin, ''Bulletin de liaison trimestriel destiné aux professionnels et aux bénévoles impliqués dans la prise en charge et l’aide aux populations démunies. n° 7'', octobre 1999 [http://www.cerin.org/upload/ED924667AE77FE7C7A884D404D1714D6/ALIM%20ET%20PRECA%207.pdf]</ref>, on peut considérer que la cantine, toutes réputations confondues, va continuer longtemps encore de jouer son rôle social. ==La cantine dans l'argot et dans les jargons== * La cantine de caserne est nommée le « tapis de grives ».<ref name = "argot">Francisque-Michel, ''Études de philologie comparée sur l'argot et sur les idiomes analogues parlés en Europe et en Asie'', Firmin Didot Frères, fils et Cie, Paris, 1856.</ref> * La cantine de prison est le « tapis de malades ».<ref name = "argot"/> * « Cantine », ou encore « cantoche », est le terme souvent utilisé par les écoliers et adolescents pour désigner la [[restauration scolaire]]. * La cantine de l'[[École normale supérieure]] s'appelle le « pot ». * Dans le vocabulaire de la [[marine]], la cantine commune pendant l'armement ou le désarmement d'un [[navire]] s'appelle la « cayenne ». * Dans le vocabulaire de l' [[armée]], la cantine pour les militaires du rang dans une [[caserne]] s'appelle l' « ordinaire ». * La « Grande Cantine » est l'un des principaux sommets du [[Massif de la Lauzière]]. ==Métier dérivé== [[Image:Fenton - vivandiere.jpg|thumb|Cantinière du régiment des Zouaves, 1855]] Le cantinier est d'abord celui qui porte la cantine (coffret), puis celui qui tient la cantine et vend boisson et nourriture, enfin celui qui s'occupe de la cantine (réfectoire). Dans l'armée, la cantinière est l'épouse du cantinier ou la femme (obligatoirement mariée en France) qui exerce la fonction de cantinier. Dans le régiment français en parade, la cantinière marche derrière la musique menée par le tambour-major et quelques pas en avant de l'état-major, ce qui indique bien son importance dans l'armée. C'est aussi, généralement, une femme courageuse et compatissante. {{Citation bloc|La cantinière a pour suivre les troupes une petite charrette, attelée d'un ou deux chevaux ; c'est dans cet équipage que, lors des manœuvres, elle se rend sur le terrain. Pendant le ''repos'', elle débite aux officiers et aux soldats son tabac et ses liqueurs. En campagne, elle se dévoue pour son régiment ; plus d'une fois, au fort de la bataille, on l'a vue aller de rang en rang porter la goutte aux soldats, et braver la mitraille pour aller donner un peu d'eau aux blessés. Elle ne compte pas, ces jours-là, elle ne vend pas, elle donne.<ref>[[Émile Gaboriau]], ''Le 13{{e}} hussards. Types, profils, esquisses et croquis militaires à pied et à cheval'', Paris, E. Dentu, 1861.</ref>}} La cantinière a été choisie par [[Bertolt Brecht]] comme exemple de mère de condition sociale modeste confrontée aux calamités qu'impose toute guerre – voir [[Mère Courage et ses enfants]]. ==Voir aussi== * [[Cafétéria]] * [[Cambuse]] * Folklore : [[Nieppe#Folklore et tradition|la géante Miss Cantine]] * [[Guédille]] * [[Hollywood Canteen]] * [[Külliye]] * [[Popotes roulantes]] * [[Diététique#Restaurants d'entreprise et scolaires|Restaurants d'entreprise et scolaires]] * [[Restaurant universitaire]] * [[Restauration collective]] * [[Restauration scolaire]] * [[Sainte-Jamme-sur-Sarthe]] ==Liens externes== * [http://agriculture.gouv.fr/IMG/pdf/cantines.pdf Brochure d'information du ministère français de l'agriculture] * [http://www.favv-afsca.be/home/press/doc07/2007-03-01_ecoles_fr.pdf Conformité à la réglementation belge] * [http://desencyclopedie.wikia.com/wiki/Cantine Caricature de la cantine dans la Désencyclopédie] ==Sources== {{Wiktionnaire}} * ''Soumagne initiatives. Bulletin d'information de l'Echevinat des indépendants'', 7, Soumagne, juin 2008 ([http://www.soumagne.be/sites/modules_ntl/visiteur/soumagne2006/documents/soumagneinitiatives/soumagneinitiatives.pdf en ligne]). * [[Centre national de ressources textuelles et lexicales]]. * Alain Rey (dir.), ''Dictionnaire historique de la langue française'', Paris, 1992. * Émile Littré (dir), ''[[Dictionnaire de la langue française (Littré)|Dictionnaire de la Langue Française par E. Littré de l’Académie française]]'', Paris, 2{{e}} éd. 1873. * Pierre Larousse, ''[[Grand dictionnaire universel du XIXe siècle]]'', Paris, 1866-1877. == Notes et références == {{Références|colonnes =2}} [[Catégorie:Meuble]] [[Catégorie:Salle]] [[Catégorie:Type de restaurant]] {{Portail|gastronomie}} [[en:Canteen]] [[simple:Canteen]]