Franklin Delano Roosevelt
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2008-07-24T10:12:32Z
Kelson
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/* Préparation à la guerre */
{{en travaux|Urban}}
{{voir homonymes|Roosevelt}}
{{Infobox Chef d'État
| nom=Franklin Delano Roosevelt
| image=Image:FDR_in_1933.jpg
| légende= Franklin D. Roosevelt en 1933
| titre=32{{e}} président des États-Unis
| élection={{date|8|novembre|1932}}
| réélection1={{date|3|novembre|1936}}<br />{{date|5|novembre|1940}}<br />{{date|7|novembre|1944}}
| début mandat1={{date|4|mars|1933}}
| fin mandat1={{date|20|janvier|1937}}
| début mandat2={{date|20|janvier|1937}}
| fin mandat2={{date|20|janvier|1941}}
| début mandat3={{date|20|janvier|1941}}
| fin mandat3={{date|20|janvier|1945}}
| début mandat4={{date|20|janvier|1945}}
| fin mandat4={{date|12|avril|1945}}
| naissance={{date|30|janvier|1882}}
| lieu naissance=[[Image:Flag of the United States.svg|20px]] [[Hyde Park (New York)|Hyde Park]], [[New York (État)|New York]]
| décès={{date|12|avril|1945}}
| lieu décès=[[Image:Flag of the United States.svg|20px]] [[Warm Springs (Géorgie)|Warm Springs]], [[Géorgie (État)|Géorgie]]
| profession=[[Juriste]]
| parti politique=[[Parti démocrate (États-Unis)|Parti démocrate]]
| viceprésident=[[John N. Garner|John Garner]] (1933–1941)<br/>[[Henry Wallace]] (1941–1945)<br/>[[Harry Truman]] (1945)
| prédécesseur=[[Herbert C. Hoover]]
| successeur=[[Harry S. Truman]]
| conjoint=[[Eleanor Roosevelt]]
| université= [[Université Harvard]]
| religion=[[Église épiscopale des États-Unis d'Amérique|Église épiscopale]]
| signature=[[Image:Franklin D. Roosevelt signature.gif|130px]]
| liste=[[Liste des présidents des États-Unis d'Amérique|Présidents des États-Unis d'Amérique]]
| emblême=[[Image:Seal Of The President Of The Unites States Of America.svg|125px]]
}}
'''Franklin Delano Roosevelt''' ({{phonétique|ˈrəʊzəvelt}}) ([[30 janvier]] [[1882]] – [[12 avril]] [[1945]]) est le trente-deuxième [[président des États-Unis]]. Il est élu pour quatre mandats commençant en 1933, 1937, 1941 et 1945. Il meurt avant la fin de ce dernier mandat.
Seul président à avoir été élu quatre fois (le nombre de mandats n'étant limité à deux que depuis [[1951]])<ref>[http://fr.wikisource.org/wiki/Constitution_des_%C3%89tats-Unis_d%27Am%C3%A9rique#XXIIe_amendement XXII{{e}} amendement]</ref>, Roosevelt est amené à conduire la lutte contre la [[Grande Dépression]], en mettant en œuvre le [[New Deal]] qui refonde pour une quarantaine d'années le pacte social américain, puis la politique des États-Unis pendant la [[Seconde Guerre mondiale]]. Critiqué et admiré, il laisse une très forte empreinte dans l'histoire du pays et du monde. Il réussit notamment à élaborer un nouveau mode de présidence, plus interventionniste et plus active<ref>Bernard Vincent (dir.), ''Histoire des États-Unis'', Paris, Champs Flammarion, 1997, {{ISBN|2080813765}}, p.198</ref>.
== Biographie ==
=== Origines familiales et jeunesse ===
[[Image:Fdrwithparents.jpg|thumb|200px|Franklin Roosevelt et ses parents en [[1899]]]]
[[Image:Franklin_Roosevelt_Secretary_of_the_Navy_1913.jpg|thumb|200px|Franklin Roosevelt à 31 ans ([[1913]]).]]
Franklin Delano Roosevelt est né le {{date|30|janvier|1882}} à [[Hyde Park (New York)|Hyde Park]], une localité de la vallée de l’[[Hudson (fleuve)|Hudson]] située à environ {{unité|160|km}} au nord de [[New York]]. Ses parents, James Roosevelt Sr. et Sara Ann Delano appartenaient à deux vieilles familles patriciennes de New York<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.39</ref>. Son père, un riche entrepreneur, avait des ancêtres [[Hollande|hollandais]] et sa mère des ancêtres [[France|franco]]-[[Luxembourg (pays)|luxembourgeois]]<ref>''Delanoye'' ou ''Delanoë'' devenu ''Delano''</ref>{{,}}<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.47</ref>. Son grand-père maternel, Warren Delano Jr., qui avait fait fortune dans le commerce de l’[[opium]] avec la [[Civilisation chinoise|Chine]], était un descendant de Philippe de La Noye, l’un des passagers du ''[[Mayflower]]'' qui accosta dans l'actuel [[Massachusetts]] en [[1620]]<ref>Patrick D. Reagan, ''Designing a New America: The Origins of New Deal Planning, 1890–1943'', 2000, p. 29</ref>{{,}}<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.47</ref>.
Franklin Roosevelt était fils unique ; il grandit sous l’influence d’une mère possessive<ref>''Eleanor and Franklin'', Lash (1971), p.111 et sq.</ref> et eut une enfance heureuse et solitaire<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.53-55</ref>. Il passait souvent ses vacances dans la maison familiale de l'île de [[Campobello]] située au [[Canada]]. Grâce à de nombreux voyages en [[Europe]], Roosevelt se familiarisa avec les langues allemande et française. Il reçut une éducation aristocratique<ref>D. Artaud, ''L'Amérique en crise. […]'', 1987, p.47</ref>, apprit à monter à cheval, pratiqua de nombreux sports comme le [[polo]], l’[[aviron]], le [[tennis]] et le [[tir]].
À l'âge de quatorze ans, il entra dans un établissement privé et élitiste, la [[Groton School]] dans le [[Massachusetts]]. Pendant ses études, il fut influencé par son maître, le révérend Endicott Peabody, qui lui enseigna le devoir chrétien de charité et la notion de service pour le bien commun<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.57</ref>. En [[1899]], Franklin Roosevelt continua ses études à [[Harvard]] où il résida dans la luxueuse Adams House. Il entra dans la [[fraternité]] [[Alpha Delta Phi]] et participa au journal étudiant ''[[The Harvard Crimson]]''. Il perdit son père qui mourut en [[1900]]. À cette époque, son cousin lointain et oncle par alliance [[Theodore Roosevelt]]<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.76</ref> accéda à la [[Président des États-Unis|présidence des États-Unis]] et devint son modèle politique. Il s'inscrivit au [[parti démocrate (États-Unis)|Parti démocrate]]. Il appartenait aussi à la [[franc-maçonnerie]]<ref>{{en}} {{lien web|url=http://www.mn-masons.org/Page1015.aspx|titre=Presidents of the United States who wre freemasons|éditeur=Grand Lodge of Minnesota|consulté le=09-07-2008}}</ref>.
En [[1902]], au cours d’une réception à la [[Maison Blanche]], Franklin Roosevelt fit la connaissance de sa future épouse [[Anna Eleanor Roosevelt]], qui était aussi la nièce du Président Theodore Roosevelt. Eleanor et Franklin Roosevelt avaient tous les deux pour ancêtre commun le Hollandais Claes Martenzen van Roosevelt<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.43</ref> qui débarqua à la [[Nouvelle-Amsterdam]] (future New York) dans les [[années 1640]]. Ses deux petits-fils, Johannes et Jacobus ont fondé les deux branches de la famille, celle de l’[[Oyster Bay (New York)|Oyster Bay]] et celle d’[[Hyde Park (New York)|Hyde Park]]. Eleanor et Theodore Roosevelt descendaient de la branche aînée, alors que Franklin Roosevelt était issu de la branche cadette, celle de Jacobus<ref name="5thcousins">{{en}} {{lien web | url = http://www.nps.gov/elro/who-is-er/q-and-a/q6.htm | titre = Question: How was ER related to FDR? | éditeur = The Eleanor Roosevelt Papers | consulté le = 29-07-2007}}</ref>. En [[1902]], Franklin Roosevelt entra à l’école de droit de l’[[université Columbia]] mais abandonna son cursus en [[1907]] sans diplôme. Il passa avec succès l’examen du barreau de l’[[État de New York]] et fut engagé dès [[1908]] dans un cabinet d’affaires prestigieux de [[Wall Street]], la Carter Ledyard & Milburn.
=== Vie de famille ===
[[Image:Franklin_D_Roosevelt_and_Eleanor_Roosevelt_1920.jpg|thumb|200px|Franklin et Eleanor Roosevelt en 1920]]
Franklin Roosevelt épousa [[Eleanor Roosevelt|Eleanor]] le {{date|17|mars|1905}} à [[New York]], malgré l’opposition de sa mère. Lors de la cérémonie, [[Theodore Roosevelt]] remplaçait le père défunt de la mariée, Elliott Roosevelt. Le jeune couple s’installa ensuite sur le domaine familial de Springwood à [[Hyde Park (New York)|Hyde Park]]. Alors que Franklin était un homme charismatique et sociable et sa femme était à cette époque timide, se tenait à l’écart des mondanités pour élever ses enfants :
* Anna Eleanor (1906–1975),
* James (1907–1991),
* Franklin Delano Jr. (3 mars 1909-7 novembre 1909),
* Elliott (1910–1990),
* Franklin Delano, Jr. (1914–1988),
* John Aspinwall (1916–1981).
Franklin Roosevelt eut plusieurs aventures amoureuses pendant son mariage : il entretint dès [[1914]] une liaison avec la secrétaire de son épouse, [[Lucy Page Mercer Rutherfurd]]. En septembre [[1918]], Eleanor trouva la correspondance écrite des amants dans les affaires de son mari. Elle menaça ce dernier de demander le [[divorce]]. Sous la pression de sa mère et de sa femme, Roosevelt s’engagea à ne plus voir Lucy Meyer et le couple sauva les apparences. Eleanore s’établit dans une maison séparée à Valkill, tout en continuant à voir son époux<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.135 et p.183</ref>.
Les enfants du couple ont mené quant à eux des existences tumultueuses : 19 mariages, 15 divorces et 22 enfants pour l’ensemble des cinq enfants. Les quatre fils ont participé à la [[Seconde Guerre mondiale]] comme [[officier]]s et ont été décorés pour leur bravoure au combat. Après le conflit, ils ont mené des carrières dans les affaires et la politique. Franklin Delano Roosevelt Jr. a représenté l’[[Upper West Side]] au [[Congrès américain|Congrès]] pendant trois mandats et James Roosevelt pour le 26{{e}} district de [[Californie]] pendant six mandats.
=== Débuts politiques (1910-1920) ===
Roosevelt n'aimait pas particulièrement sa carrière juridique et se tourna vers la politique à la première occasion. En [[1910]], il se présenta au poste de [[Sénat des États-Unis|sénateur]] démocrate pour le 26{{e}} district de l’État de New York<ref>District qui regroupait trois comtés : Dutchess, Columbia et Putnam : lire A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.80</ref>. Il fut élu et entra en fonction le {{date|1er|janvier|1911}} au Sénat d’[[Albany (New York)|Albany]]. Il prit rapidement la tête d’un groupe parlementaire de [[réformisme|réformistes]] qui s’opposait au clientélisme du [[Tammany Hall]], la « machine » politique du [[Parti démocrate (États-Unis)|Parti démocrate]] à [[New York]]. Roosevelt devint un personnage populaire parmi les démocrates de l'État et fut réélu le {{date|5|novembre|1912}} grâce au soutien du journaliste [[Louis Howe]]<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.91 et p.93</ref>, avant de démissionner le [[17 mars]] suivant. En [[1914]], il se présenta aux élections primaires pour le poste de sénateur mais fut battu par le candidat soutenu par le Tammany Hall, James W. Gerard.
[[Image:Breckinridgelong2.jpg|thumb|200px|14 juin 1914 : Roosevelt se trouve à droite de la photographie]]
En [[1913]], Roosevelt fut nommé Secrétaire-adjoint à la Marine par le président [[Woodrow Wilson]]<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.95</ref>{{,}}<ref>D. Artaud, ''L'Amérique en crise. […]'', 1987, p.47</ref> et travailla pour [[Josephus Daniels]], le [[Secrétaire à la Marine des États-Unis]]. Entre 1913 et [[1917]], il s’employa à développer la [[marine américaine]] et fonda la United States Navy Reserve. Pendant la [[Première Guerre mondiale]], Roosevelt fit preuve d’une attention particulière pour la marine et milita pour le développement des [[sous-marin]]s. Afin de parer aux attaques sous-marines allemandes contre les navires alliés, il proposa d’installer un barrage de mines en [[mer du Nord]], entre la [[Norvège]] et l’[[Écosse]]. En [[1918]], il inspecta les équipements navals américains en [[Grande-Bretagne]] et se rendit sur le front en France<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.102</ref>. Pendant sa visite, il rencontra [[Winston Churchill]] pour la première fois. Après l’[[armistice]] du 11 novembre 1918, il fut chargé de superviser la démobilisation et quitta son poste de Secrétaire-adjoint à la Marine en juillet 1920.
En 1920, la convention nationale du Parti démocrate choisit Franklin Roosevelt comme candidat à la [[vice-président des États-Unis|vice-présidence des États-Unis]], aux côtés du [[gouverneur]] de l’[[Ohio]] [[James M. Cox]]. Dans un discours prononcé à [[Butte (Montana)]] le {{date|18|août|1920}}, il mit en avant son rôle dans la rédaction de la [[constitution]] imposée à [[Haïti]] en 1915 : {{Citation|J’ai écrit moi-même la constitution de Haïti, et je pense que cette constitution est plutôt bonne<ref>Frank Freidel, ''Franklin D. Roosevelt. The Apprenticeschip'', Boston, Little, Brown and Company, 1954, p.81-82</ref>.}} Le ticket Cox-Roosevelt fut battu par le Républicain [[Warren Harding]] qui devint président. Après cet échec, il se retira de la politique et travailla à New York : il fut vice-président d’une société de vente par actions et directeur d’un cabinet d’avocats d’affaires<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.115</ref>.
=== « Traversée du désert » et maladie (1921-1928) ===
[[Image:Rooseveltinwheelchair.jpg|thumb|200px|L'une des rares photographies de Roosevelt en fauteuil roulant, dans sa propriété de Hyde Park]]
En [[août 1921]], pendant ses vacances à l'[[île Campobello]], Roosevelt contracta une maladie que l’on pensait être à l’époque la [[poliomyélite]]. Il en résulta une [[paralysie]] de ses membres inférieurs : il avait alors 39 ans. Il ne se résigna jamais à accepter la maladie, fit preuve de courage et d’optimisme<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.126</ref>. Il essaya de nombreux traitements : en [[1926]], il acheta une propriété à [[Warm Springs (Géorgie)|Warm Springs]] en [[Géorgie (État)|Géorgie]], où il fonda un centre d’[[hydrothérapie]] pour les patients atteints de la polio, le ''Roosevelt Warm Springs Institute for Rehabilitation'', qui est toujours en activité. Le jour de sa première investiture présidentielle, il reçut personnellement des enfants paralytiques<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.37</ref>. Pendant sa présidence, il participa à la création de la ''National Foundation for Infantile Paralysis''. Roosevelt cacha la dégradation de son état de santé pour pouvoir être réélu. En public, il marchait avec des attelles orthopédiques ou une canne ; en privé, il se déplaçait en [[fauteuil roulant]]<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.113 et p.179</ref>. Lors de ses apparitions publiques, il était soutenu par l’un de ses fils ou par un auxiliaire. Une étude de 2003 a démontré que Roosevelt n’était pas atteint par la polio mais par le [[syndrome de Guillain-Barré]]<ref>A.S. Goldman, [http://www.rsmpress.co.uk/jmb_2003_v11_p232-240.pdf ''What was the cause of Franklin Delano Roosevelt's paralytic illness?'']. J Med Biogr. 11: 232–240, 2003</ref>.
=== Roosevelt gouverneur de New York (1928-1932) ===
[[Image:Governor_Roosevelt_and_Al_Smith.jpg|thumb|200px|Le gouverneur Franklin Roosevelt posant aux côtés d'Al Smith ([[Albany (New York)|Albany]], [[État de New York|New York]], [[1930]]).]]
Roosevelt prit bien soin de rester en relation avec le Parti démocrate et s’allia avec le gouverneur [[Alfred E. Smith]], ancien gouverneur du [[New Jersey]]. Il se rapprocha du Tammany Hall et fut finalement élu gouverneur de l'[[État de New York]] à une courte majorité<ref>{{formatnum:24000}} voix d'avance sur 4,3 millions exprimées</ref> et dut cohabiter avec un [[New York State Legislature|Congrès]] à majorité républicaine<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.150 et p.153</ref>.
Il prit sa charge de gouverneur en [[1929]] et entama aussitôt une politique novatrice et audacieuse pour l'époque : il agit en faveur des campagnes ([[reboisement]], conservation du sol), établit des programmes sociaux comme l'office temporaire des secours d'urgance (''Temporary Emergency Relief Administration'')<ref>D. Artaud, ''L'Amérique en crise. […]'', 1987, p.48</ref>{{,}}<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.168</ref> qui accordait des aides financières directes aux [[chômeur]]s. Deux concepts forts, outre un remarquable [[pragmatisme]], dominent son action publique. Tout d'abord l'idée qu'il est souvent nécessaire de substituer la liberté collective à la liberté individuelle, mais aussi sa grande méfiance envers l'idée de concurrence sans contrainte ({{Citation|la coopération doit intervenir là où cesse la concurrence}} et celle-ci {{Citation|peut être utile jusqu'à une certaine limite mais pas au-delà}}). C'est ainsi qu'il réduisit la durée du temps de travail pour les femmes et les enfants, lança un programme d'amélioration des hôpitaux, des prisons et renforça l'autorité publique. Cette politique, surtout après le [[Krach de 1929]] de [[1929]], révéla toute son acuité devant l'absence de réaction du gouvernement d'[[Herbert Hoover]] à [[Washington, DC|Washington]] face à la [[crise économique]].
Ses détracteurs l'accusèrent d'être « [[socialiste]] », dans un sens péjoratif. Roosevelt fit en effet preuve d'une grande tolérance sur les thèmes de l'[[immigration]] et de la [[religion]], tolérance qui se manifesta par ses réserves sur la politique des quotas, sur la [[prohibition]] et sur les querelles internes au Parti démocrate entre [[Judaïsme|juifs]], [[Catholicisme|catholiques]] et [[Protestantisme|protestants]].
C'est à cette époque que Roosevelt commença à réunir une équipe de conseillers parmi lesquels [[Frances Perkins]] et [[Harry Hopkins]], en prévision de son élection au poste de président. Le principal point faible de son mandat fut la corruption de [[Tammany Hall]] à New York. Roosevelt fut réélu en [[1930]] contre le Républicain [[Charles Egbert Tuttle]] pour un deuxième mandat de gouverneur de l'État de New York.
La même année les [[Boy Scouts of America]] (BSA) lui décernèrent la plus haute distinction pour un adulte, la Silver Buffalo Award, en l’honneur de son engagement pour la jeunesse. Roosevelt soutint le premier [[Jamboree scout]] et devint président honoraire des BSA<ref>{{en}} {{lien web | auteur=Thomas P. Campbell | année =2003 | url =http://www.scoutingmagazine.org/issues/0303/d-wwas.html | titre =A Best Friend in the White House |éditeur =Boy Scouts of America | consulté le=08-12-2007 }}</ref>.
=== L'élection présidentielle de 1932 ===
{{loupe|Élection présidentielle des États-Unis d'Amérique 1932}}
Roosevelt remplaça le catholique [[Alfred E. Smith]] à la tête du Parti démocrate de New York dès 1928. La popularité de Roosevelt dans l’État le plus peuplé de l’Union fit de lui un candidat potentiel à l'élection présidentielle de 1932. Ses adversaires à l'investiture, [[Albert Ritchie]], le gouverneur du [[Maryland]] et [[W. H. Murray]], celui de l'[[Oklahoma]], étaient des personnalités locales et moins crédibles. [[John Nance Garner]], candidat de l’aile conservatrice du Parti, renonça à la nomination en échange du poste de vice-président, charge qu’il assuma jusqu’en [[1941]]. Roosevelt resta confronté à l'hostilité affichée du président du parti, [[John Raskob]], mais reçut le soutien financier de [[William Randolph Hearst]], de [[Joseph Patrick Kennedy|Joseph P. Kennedy]], de [[William G. McAdoo]] et d’[[Henry Morgenthau]].
L’élection présidentielle se déroula dans le contexte de la [[Grande Dépression]] et des nouvelles alliances politiques qui en découlaient. En [[1932]] Roosevelt avait récupéré physiquement de sa maladie, si ce n'est l'usage de ses jambes, et il n'hésita pas à se lancer dans une épuisante campagne électorale.
Dans ses nombreux discours électoraux, Roosevelt s’attaqua aux échecs du président sortant [[Herbert Hoover]] et dénonça son incapacité à sortir le pays de la crise. Il s’adressa en particulier aux pauvres, aux travailleurs, aux minorités ethniques, aux citadins et aux Blancs du Sud en élaborant un programme qualifié de ''New Deal'' (« nouvelle donne ») : il avait prononcé cette expression lors de la Convention démocrate de [[Chicago]] le {{date|2|juillet|1932}}<ref>Bernard Vincent (dir.), ''Histoire des États-Unis'', Paris, Champs Flammarion, 1997, {{ISBN|2080813765}}, p.199</ref>{{,}}<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.202</ref>{{,}}<ref>D. Artaud, ''L'Amérique en crise. […]'', 1987, p.5</ref>. Il développa surtout les questions économiques<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.214</ref> et proposa une réduction de la [[bureaucratie]] et une abolition partielle de la [[Prohibition]]. Le programme de Roosevelt n'obéissait à aucune [[idéologie]], bien qu'il fut d'inspiration [[social-démocratie|social-démocrate]] et [[keynésianisme|keynésienne]], et n'était pas précis quant aux moyens qui devraient être mis en œuvre pour aider les Américains les plus pauvres<ref>Bernard Vincent (dir.), ''Histoire des États-Unis'', Paris, Champs Flammarion, 1997, {{ISBN|2080813765}}, p.200</ref>{{,}}<ref>[[Denise Artaud]], ''L'Amérique en crise. Roosevelt et le New Deal'', Paris, Armand Colin, 1987, {{ISBN|2200371160}}, p.53</ref>.
[[Image:ElectoralCollege1932-Large.png|thumb|200px|Résultats électoraux de 1932]]
[[Image:Roosevelt_inauguration_1932.jpg|thumb|200px|Le couple présidentiel, le jour de l'investiture de Roosevelt]]
La campagne de Roosevelt fut un succès pour plusieurs raisons. Tout d'abord le candidat fit preuve de [[pédagogie]] et sut convaincre les Américains par ses talents d’[[orateur]]<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.216</ref>. Il parcourut près de {{formatnum:50000}} kilomètres à travers tout le pays pour convaincre ses électeurs<ref>D. Artaud, ''L'Amérique en crise. [...]'', 1987, p.55</ref>. De plus, Roosevelt avait mûri politiquement sous l'influence de personnalités comme [[Louis Howe]], l'un de ses associés, ou [[Josephus Daniels]], son ministre de tutelle à la Marine. Il ne faut pas négliger non plus le rôle des conseillers du gouverneur qu'il fut, tels [[Raymond Moley]], [[Rexford Tugwell]], [[Adolf Berle]], tous les trois chercheurs et universitaires, généralement de [[Université Columbia|Columbia]], pressentis par [[Samuel Rosenman]] le rédacteur des discours de Roosevelt. Ces hommes, avec [[Bernard Baruch]], un financier ancien chef du ''War Industries Board'' durant la [[Première Guerre mondiale]], ou encore [[Harry Hopkins]], son confident, vont constituer le fameux « ''[[Brain Trust]]'' » du président. Mais le succès de Roosevelt fut surtout du à l'extrême impopularité du président Hoover et de sa politique de « laisser-faire » ayant largement aggravé la crise de 1929.
Le {{date|8|novembre|1932}}, Roosevelt recueillit {{unité|57|%}} des voix<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.220</ref> et le [[Collège électoral]] lui est favorable dans 42 États sur 48<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.10</ref>. Le Congrès était acquis au Parti démocrate<ref>310 Réprésentants et 60 sénateurs sur 96 étaient démocrates en 1932 : D. Artaud, ''L'Amérique en crise. […]'', 1987, p.55 et A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.221</ref>. Les États de l’Ouest, du Sud et les zones rurales l’ont plébiscité. Les historiens et les politologues considèrent que les élections de 1932-1936 ont fondé une nouvelle coalition autour des Démocrates et le 5{{e}} système de partis<ref>Bernard Sternsher, « The Emergence of the New Deal Party System: A Problem in Historical Analysis of Voter Behavior », ''Journal of Interdisciplinary History'', Vol. 6, No. 1, été 1975, pp. 127-149</ref>.
Le {{date|15|février|1933}}, Roosevelt échappa à un [[attentat]] alors qu’il était en voiture à [[Miami]] en [[Floride]]<ref>Frank Freidel, ''Franklin D. Roosevelt'', 1973, volume 3, pp.170–73</ref>. L’auteur des coups de feu était [[Joseph Zangara]]<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.24</ref>, un [[anarchisme|anarchiste]] d’origine italienne dont les motivations étaient d’ordre personnel. Il fut condamné à 80 ans de réclusion, puis à la [[peine de mort]], car le maire de [[Chicago]] [[Anton Cermak]] mourut des blessures reçues pendant l’attentat.
=== Présidence (1933-1945) ===
{{Loupe|Grande Dépression}}
Lorsque Franklin Roosevelt prit ses fonctions de Président de États-Unis le {{date|4|mars|1933}}, le pays était plongé dans une grave crise économique : {{unité|24.9|%}} de la population active, plus de 12 millions de personnes étaient alors au chômage<ref>Lester V. Chandler, ''America’s Greatest Depression 1929-1941'', New York, Harper and Row, 1970, p.24 et sq.</ref>{{,}}<ref>D. Artaud, ''L'Amérique en crise. […]'', 1987, p.27</ref> et deux millions d’Américains étaient sans-abri. Entre 1930 et 1932, 773 établissements bancaires firent faillite<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.20</ref>. Lors de son [[Inauguration Day|discours inaugural]], Roosevelt dénonça la responsabilité des banquiers et des financiers dans la crise ; il présenta son programme directement aux Américains par une série de discussions radiophoniques connues sous le nom de ''fireside chats'' (« causeries au coin du feu »)<ref>Leuchtenburg, (1963) ch 1, 2</ref>.
Le premier [[cabinet (États-Unis)|cabinet]] de l'administration Roosevelt comprenait une femme pour la première fois de l'histoire politique américaine : il s'agissait de [[Frances Perkins]], qui occupa le poste de [[Département du Travail des États-Unis|Secrétaire au travail]] jusqu'en juin [[1945]].
<br />
{{New Deal}}<br />
==== Premier mandat (1932-1936) ====
===== Le premier New Deal (1933-1934) =====
{{Loupe|New Deal}}
[[Image:Ccc pillow.jpg|thumb|200px|CCC]]
[[Image:NRA.jpg|thumb|200px|''Blue Eagle'', le symbole de la NIRA]]
[[Image:P img08eau.jpg|thumb|200px|Une œuvre subventionnée par la WPA, 1939]]
Au début de son mandat, Roosevelt prit de nombreuses mesures pour rassurer la population et redresser l’économie. Entre le 4 mars et le 16 juin, il proposa 15 nouvelles lois qui furent toutes votées par le Congrès<ref>D. Artaud, ''L'Amérique en crise. [...]'', 1987, p.65</ref>. Le premier New Deal ne fut pas une politique socialiste et Roosevelt gouverna plutôt au centre<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.215 et p.227</ref>. Entre le [[9 mars]] et le {{date|16|juin|1933}}, période de Cent Jours qui correspond à la durée de la cession du [[Congrès américain]], il fit passer un nombre record de projets de loi qui furent facilement adoptés grâce à la majorité démocrate, au soutien de sénateurs comme [[George Norris]], [[Robert F. Wagner]] ou [[Hugo Black]], mais aussi grâce à l’action de son ''[[Brain Trust]]'', ses conseillers issus pour la plupart de l'[[Université Columbia]]. Pour expliquer ces succès politiques, les historiens invoquent également la capacité de séduction de Roosevelt<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.241</ref> et son habileté à utiliser les médias.
Comme son prédécesseur [[Herbert Hoover]], Roosevelt considérait que la crise économique résultait d’un manque de confiance qui se traduisait par une baisse de la [[consommation]] et de l’[[investissement]]. Il s’efforça d’afficher son optimisme. Au moment des faillites bancaires du {{date|4|mars|1933}}, son [[discours d'investiture]], entendu à la radio par deux millions d'Américains, comportait cette déclaration restée célèbre : {{Citation étrangère|lang=en|The only thing we have to fear is fear itself}} ({{Citation|la seule chose que nous ayons à craindre, c’est la crainte elle-même}})<ref>Voir le texte en anglais dans Wikisource :[[s:en:Franklin Roosevelt's First Inaugural Address|Franklin Roosevelt's First Inaugural Address]].</ref>{{,}}<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.29</ref>{{,}}<ref>D. Artaud, ''L'Amérique en crise. [...]'', 1987, p.60</ref>. Le jour suivant, il décréta un congé pour les banques afin d’enrayer la panique causée par les faillites, et annonça un plan pour leur prochaine réouverture.
Roosevelt poursuivit le programme de Hoover contre le chômage placé sous la responsabilité de la toute nouvelle [[Federal Emergency Relief Administration]] (FERA). Il reprit également la [[Reconstruction Finance Corporation]] pour en faire une source majeure de financement des chemins de fer et de l’industrie. Parmi les nouvelles agences les plus appréciées de Roosevelt figure le corps de préservation civile ([[Civilian Conservation Corps]] - CCC -), qui embaucha {{formatnum:250000}} jeunes chômeurs dans différents projets locaux. Le Congrès confia de nouveaux pouvoirs de régulation à la [[Federal Trade Commission]] et des [[prêt hypothécaire|prêts hypothécaires]] à des millions de fermiers et de propriétaires. Le [[19 avril]], les États-Unis abandonnaient l’[[étalon-or]], ce qui eut pour effet de relancer l’économie.
Les réformes économiques furent entreprises grâce au [[National Industrial Recovery Act]] (NIRA) de 1933. Cependant la cour suprême le déclara anticonstitutionnel par une décision du {{date|27|mai|1935}}. Le NIRA établissait une planification économique, un salaire minimum et une baisse du temps de travail ramené à 36 heures hebdomadaires<ref>D. Artaud, ''L'Amérique en crise. […]'', 1987, p.91</ref>. Le NIRA instaurait plus de liberté pour les [[syndicat]]s.
Roosevelt injecta d'énormes fonds publics dans l’économie : le NIRA dépensa ainsi 3,3 milliards de dollars par l’intermédiaire de la [[Public Works Administration]] sous la direction de [[Harold L. Ickes|Harold Ickes]]. Le Président travailla avec le sénateur républicain [[George Norris]] pour créer la plus grande enterprise industrielle gouvernementale de l’histoire américaine, la [[Tennessee Valley Authority]] (TVA) : celle-ci permit de construire des barrages et des stations hydroélectriques, de moderniser l’agriculture et d’améliorer les conditions de vie dans la vallée du [[Tennessee (rivière)|Tennessee]]. En avril 1933, l'abrogation du [[Volstead Act]] qui définissait la [[prohibition]], permit à l’État de lever de nouvelles taxes. La ratification du 21{{e}} amendement par l’[[Utah]] le 5 décembre mit officiellement fin à la [[Prohibition]].
Roosevelt essaya de tenir ses engagements de campagne sur la réduction des dépenses publiques : mais il souleva l’opposition des [[vétéran]]s de la [[Première Guerre mondiale]] en diminuant leurs pensions. Il fit des coupes sévères dans le budget des armées ; il baissa le salaire et le nombre des fonctionnaires par l'[[Economy Bill]] le {{date|20|mars|1933}}<ref>D. Artaud, ''L'Amérique en crise. […]'', 1987, p.65-66</ref>. Il réduisit également les dépenses dans l’éducation et la recherche.
Le relèvement de l’agriculture fut l’une de ses priorités comme en témoigne le premier [[Agricultural Adjustment Administration]] (AAA) qui s’efforça de faire remonter les prix agricoles. Son action fut critiquée car elle imposait de détruire les récoltes alors que une partie de la population était mal nourrie<ref>D. Artaud, ''L'Amérique en crise. […]'', 1987, p.75</ref>. Le ''Farm Credit Act'' fut voté pour réduire l'endettement des agriculteurs.
À la suite des rigueurs de l’hiver 1933-1934, la [[Civil Works Administration]] fut fondée et employa jusqu’à 4,5 millions de personnes<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.267</ref> ; l'agence engagea des travailleurs pour des activités très diverses telles que des [[fouille archéologique|fouilles archéologiques]] ou la réalisation de [[peinture murale|peintures murales]]. Malgré ses réussites, elle fut dissoute après l’hiver.
===== Le deuxième New Deal et le ''Welfare State'' =====
[[Image:RooseveltSSAsigning.jpg|thumb|200px|Le Président Franklin Roosevelt signant le Social Security Act, le 14 août [[1935]]]]
[[Image:Dust Storm Texas 1935.jpg|thumb|200px|Tempête de poussière (''[[Dust Bowl]]'') au Texas en 1935]]
À partir de 1934, la politique de Franklin Roosevelt s’orienta à gauche avec la création de l’[[État-providence]] (''Welfare State'')<ref>L’expression est née dans les [[années 1940]], mais l’État-providence existait de fait dès 1934 aux États-Unis : lire l'article [[Protection sociale aux États-Unis d'Amérique]] et A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.261</ref>.
Les élections législatives de 1934 donnèrent à Roosevelt une large majorité aux deux chambres du Congrès. Le président put continuer ses réformes afin de relancer la consommation et de faire baisser le chômage. Cependant, le taux de chômage restait à un niveau très élevé (12,5 % en 1938<ref>Michael R. Darby, ''Three and a half million U.S. Employees have been mislaid: or, an Explanation of Unemployment, 1934–1941.'' Journal of Political Economy 84, no. 1 (1976): 1–16</ref>).
Le {{date|6|mai|1934}}, le Président crée l'Administration chargée de l'avancement des travaux ([[Works Progress Administration]])<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.283</ref>, dirigée par [[Harry Hopkins]]. Elle employa jusqu'à 3,3 millions de personnes en 1938<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.284</ref> sur des chantiers divers : réalisation de routes, de ponts, de bâtiments publics… Les professeurs enseignaient la langue anglaise aux immigrants, les acteurs jouaient des pièces de théâtre jusque dans les petites villes, les peintres comme [[Jackson Pollock]] recevaient des commandes. L'Administration nationale de la jeunesse ([[National Youth Administration]]) est fondée en juin 1935 pour faire baisser le chômage des jeunes et les encourager à faire des études.
L'Administration pour la réinstallation ([[Resettlement Administration]]), créée en avril 1935, est placée sous la direction de Rexford Tugwell pour réduire la pauvreté des agriculteurs. Elle est remplacée par l'Administration pour la sécurité agricole ([[Farm Security Administration]]) en 1937.
Le {{date|28|mai|1934}}, Roosevelt rencontra l’économiste anglais [[Keynes]]<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.276</ref>.
Le {{date|6|juin|1934}} le ''Securities Exchange Act'' permit la création de la [[Securities and Exchange Commission]] (Commission des titres financiers et des bourses) qui règlemente et [[contrôle des marchés financiers|contrôle les marchés financiers]]. Roosevelt nomma [[Joseph Patrick Kennedy|Jospeh P. Kennedy]], le père de [[John F. Kennedy]], comme premier président de la SEC.
Le [[Social Security Act]] prévoyait pour la première fois à l’échelon fédéral la mise en place d’une sécurité sociale pour les retraités, les pauvres et les malades. La loi sur les retraites fut signée le {{date|14|août|1935}}<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.280</ref>. Le financement devait reposer sur les cotisations des employeurs et des salariés pour ne pas accroître les dépenses de l'État fédéral<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.278</ref>.
Le sénateur [[Robert F. Wagner|Robert Wagner]] rédigea le [[Wagner Act]], qui fut ensuite adopté sous le nom de [[National Labor Relations Act]]. Cette loi signée le {{date|5|juillet|1935}} établissait le droit au niveau fédéral pour les travailleurs d’organiser des syndicats, d’engager des négociations collectives. Elle fondait le Bureau national des relations au sein du travail ([[National Labor Relations Board]]) qui devait protéger les salariés contre les abus des employeurs. Le nombre de syndiqués augmenta fortement à partir de ce moment.
Le deuxième New Deal fut attaqué par des démagogues tels que le [[Charles Coughlin|père Coughlin]], [[Huey Long]] ou encore [[Francis Townsend]]. Mais il suscita également l’opposition des démocrates les plus conservateurs emmenés par [[Al Smith]]. Avec l’[[American Liberty League]], ce dernier attaqua Roosevelt et le compara à [[Karl Marx]] et [[Lénine]]<ref>Albert Fried, ''Roosevelt and his Enemies'', Palgrave Macmillan, New Ed, 2001, {{ISBN|0312238274}}, pp. 120-123</ref>. Le [[27 mai]] 1935, la [[Cour suprême des États-Unis]] s'opposa à l’une des lois du [[New Deal]], donnant au gouvernement fédéral des pouvoirs sur les industriels. Elle décréta unanimement que le [[National Recovery Act]] (NRA) était inconstitutionnel car il donnait un pouvoir législatif au président. Ce fut un premier échec pour Roosevelt mais aussi pour le gouvernement fédéral face aux États et aux intérêts individuels. Le monde des affaires se montra également hostile au « type de la Maison-Blanche<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.287</ref>. » Enfin, Roosevelt était critiqué pour avoir creusé le déficit du budget fédéral, qui passe de 2,6 milliards de dollars en 1933 à 4,4 milliards de dollars en 1936<ref>Jim Potter, ''The American Economy Between the World Wars, New York, John Wiley and Sons, 1974, p.143</ref>.
Favorable à la [[retraite par répartition]], Roosevelt déclara à un journaliste qui lui suggérait de financer les retraites par l’impôt : {{citation|Je suppose que vous avez raison sur un plan économique, mais le financement n’est pas un problème économique. C’est une question purement politique. Nous avons instauré les prélèvements sur les salaires pour donner aux cotisants un droit légal, moral et politique de toucher leurs pensions […]. Avec ces cotisations, aucun fichu politicien ne pourra jamais démanteler ma [[sécurité sociale]].}}
==== Deuxième mandat (1936-1940) ====
===== Réélection =====
{{Loupe|Élection présidentielle des États-Unis d'Amérique 1936}}
Après quatre ans de présidence, l'économie a progressé mais reste encore fragile. En 1937, 7,7 millions d'Américains sont au chômage soit 14 % de la population active<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.315</ref>{{,}}<ref>D. Artaud, ''L'Amérique en crise. […]'', 1987, p.124</ref>. Aux élections présidentielles de novembre 1936, Roosevelt est confronté à un candidat [[Parti républicain (États-Unis)|républicain]] sans réelle envergure, [[Alfred Landon]], dont le parti est désuni. Il réussit à réunir sous sa bannière l'ensemble des forces opposées « aux financiers, aux banquiers et aux spéculateurs imprudents ». Cet ensemble électoral multi-ethnique, multi-religieux essentiellement [[urbain]] deviendra et est toujours le réservoir de voix du [[Parti démocrate (États-Unis)|Parti démocrate]]. Roosevelt est réélu pour un deuxième mandat. Sa victoire écrasante dans 46 [[État des États-Unis|États]] sur 48<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.299</ref>, obtenue avec un écart de 11 millions de voix<ref>Bernard Vincent (dir.), ''Histoire des États-Unis'', Paris, Champs Flammarion, 1997, {{ISBN|2080813765}}, p.197</ref>, contredit tous les [[sondage]]s et les prévisions de la presse. Elle indique un fort soutien populaire à sa politique de [[New Deal]] et se traduit par une majorité démocrate dans les deux Chambres du [[Congrès des États-Unis|Congrès]].
===== Politique intérieure =====
Par rapport à la période de son premier mandat, peu de grandes législations furent adoptées lors du second mandat. On citera ainsi l’[[United States Housing Authority]] qui faisait partie du [[New Deal]] ([[1937]]), un deuxième ajustement pour l’agriculture ainsi que le [[Fair Labor Standards Act]] (FLSA) de [[1938]] qui créa un [[salaire minimum]]. Lorsque l’économie se détériora à nouveau fin de l’année 1937, Roosevelt lança un programme agressif de stimulation de celle-ci en demandant au Congrès 5 milliards de dollars pour lancer des travaux publics dans le but de créer 3,3 millions d’emplois en 1938.
La [[Supreme Court of the United States|Cour suprême des États-Unis]] était l’obstacle principal à Roosevelt pour pouvoir réaliser ses programmes. Roosevelt étonna le Congrès en 1937 en proposant une loi lui offrant la possibilité de nominer cinq nouveaux magistrats<ref>Pusey, Merlo J. [http://www.americanheritage.com/articles/magazine/ah/1958/3/1958_3_24.shtml ''F.D.R. vs. the Supreme Court''], American Heritage Magazine, Avril 1958, Volume 9, Issue 3</ref>.
Cette demande fut accueillie par une large opposition comprenant même des membres de son propre parti dont le [[Vice-président des États-Unis|Vice-Président]] [[John Nance Garner]] car il semblait aller à l’encontre de la [[séparation des pouvoirs]]. Les propositions de Roosevelt furent ainsi rejetées. Des décès et des départs à la pension de membres de la Cour suprême permirent néanmoins à Roosevelt de nommer assez rapidement des magistrats avec peu de controverse. Entre 1937 et 1941, il nomina huit magistrats libéraux à la Cour suprême<ref>William E. Leuchtenberg, ''Franklin D. Roosevelt and the New Deal, 1932–1940'', Harper Perennial, New York, 1963, pp.231–39</ref>.
Le marché boursier connaît une rechute dans l'été 1937, la production s'effondre et le chômage grimpe à 19 % de la population active en 1938<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.316</ref>. En 1938, le Président réagit en demandant une rallonge financière au Congrès, en présentant une loi sur l'aide au logement, en aidant les agriculteurs (deuxième AAA en février 1938). Le {{date|25|juin|1938}} est votée la loi sur les salaires et la [[durée du travail]] (''Fair Labor Standards Act''). La durée hebdomadaire du travail est abaissée à 44 heures puis à 40 heures<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.318</ref>.
Roosevelt eut un vif soutien des [[Parti communiste des États-Unis|communistes américains]] et de l’union des syndicats qui étaient en forte croissance mais ceux-ci se séparèrent suite à des querelles internes en [[American Federation of Labor|AFL]] et en [[Congress of Industrial Organizations|CIO]] mené par [[John L. Lewis]]. Ces querelles affaiblirent le parti lors des élections de 1938 à 1946<ref>William E. Leuchtenberg, ''Franklin D. Roosevelt and the New Deal, 1932–1940'', Harper Perennial, New York, 1963, pp.239–43</ref>.
===== Oppositions =====
Le deuxième mandat de Roosevelt a été marqué par la montée des oppositions. Ces dernières s'exprimèrent d'abord dans les contre-pouvoirs, la cour suprême et le congrès, y compris dans les rangs démocrates, mais aussi dans les journaux où les [[caricature]]s et les éditoriaux n'hésitent pas à critiquer l'action présidentielle<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.294</ref>. La presse fait état des scandales qui touchent la famille du président<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.325</ref>. Les conservateurs l'accusent d'être trop proche des communistes et attaquent la WPA. Les groupuscules et leaders [[fascisme|fascistes]]; tels que le Front chrétien du [[Charles Coughlin|père Coughlin]], lancent une croisade contre le ''Jew Deal'' mais qui trouve peu d'écho<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.328</ref>.
Déterminé à surmonter l’opposition conservatrice chez les démocrates du Congrès (pour la plupart en provenance des [[Sud des États-Unis|États du sud]]), Roosevelt s’impliqua lui-même lors des [[primaires]] de 1938 en apportant son soutien aux personnes favorables à la réforme du New Deal. Roosevelt échoua en ne réussissant à déstabiliser qu’une seule personne, le démocrate conservateur de la ville de [[New York]]<ref>William E. Leuchtenberg, ''Franklin D. Roosevelt and the New Deal, 1932–1940'', Harper Perennial, New York, 1963</ref>.
Lors des élections de novembre 1938, les démocrates perdirent sept sièges au sénat et 71 sièges au Congrès. Les pertes se concentraient chez les démocrates favorables au New Deal. Lorsque le Congrès fut réuni en 1939, les républicains menés par le sénateur [[Robert Taft]] formèrent une coalition conservatrice avec les démocrates conservateurs du sud du pays ce qui empêchait Roosevelt de transformer ses programmes en lois. La loi de 1938 sur le [[salaire minimum]] fut ainsi la dernière réforme du New Deal à être entérinée par le Congrès<ref>William E. Leuchtenberg, ''Franklin D. Roosevelt and the New Deal, 1932–1940'', Harper Perennial, New York, 1963, ch. 11</ref>.
==== Bilan du New Deal ====
[[Image:FDRfiresidechat2.jpg|thumb|200px|Franklin Roosevelt utilisait souvent la radio pour expliquer sa politique aux Américains]]
Il n’y a aucune preuve que le New Deal eut une quelconque efficacité dans la lutte contre la crise, qui perdura jusqu’à ce que l’Amérique mobilise son économie pour la [[Seconde Guerre mondiale]]<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.337</ref>. Son succès est en revanche indéniable au niveau du social. La politique menée par le président Franklin Roosevelt a changé le pays par des [[réforme]]s et non par la [[révolution]]<ref name="Kaspi336">A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.336</ref>.
Sur le plan économique, la situation est meilleure qu'en 1933 : la production industrielle a retrouvé son niveau de 1929<ref name="Kaspi336"/>. En prenant comme base 100 la situation de 1929, le [[PNB]] en prix constants est de 103 en 1939, 96 pour le PNB/hab.<ref name="Kaspi336"/>. Cependant, le chômage est toujours massif : 17 % de la [[population active]] américaine est au chômage en 1939 et touche 9,5 millions de personnes<ref name="Kaspi336"/>. Ils reçoivent une allocation chômage, ce qui représente un progrès par rapport à l'avant New Deal. Notons enfin que la population active a augmenté de 3,7 millions de personnes entre 1933 et 1939<ref name="Kaspi336"/>.
Le New Deal inaugure en outre une période d'interventionnisme étatique dans de nombreux secteurs de l'économie américaine : bien qu'il n'y ait pas eu de [[nationalisation]]s comme dans la France du [[Front populaire (France)|Front populaire]], les agences fédérales ont développé leurs activités, employé davantage de [[fonctionnaire]]s issus de l'université<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.338-339</ref>. Les mesures du New Deal ont posé les bases de la future [[superpuissance]] américaine<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.340</ref>. Sur le plan politique, le [[pouvoir exécutif]] et le [[Cabinet (États-Unis)|cabinet présidentiel]] ont renforcé leur influence, sans pour autant faire basculer le pays dans la [[dictature]]. Roosevelt a su instaurer un lien direct avec le peuple, par les nombreuses conférences de presse qu'il a tenu, mais aussi par l'utilisation de la radio (« causeries au coin du feu ») et ses nombreux déplacements<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.341</ref>. Le New Deal a permis une démocratisation de la culture et la réconciliation des artistes avec la société. L'esprit du New Deal a impregné le pays : le cinéma et la littérature s'intéressent davantage aux pauvres et aux problèmes sociaux<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.343</ref>. La [[Works Projects Administration]] (1935) met en route de nombreux projets dans le domaine des arts et de la littérature, en particulier les cinq programmes du fameux [[Federal One]]. La WPA permit la réalisation de 1566 peintures nouvelles, 17744 sculptures, 108 099 peintures à l’huile et de développer l'enseignement artistique<ref>Alan Lawson, « The Cultural Legacy of the New Deal » dans Harvard Sitkoff, ''Fifty Years Later. The New Deal Evaluated'', Phildelphie, Temple University Press, 1985, p.163</ref>. À la fin du New Deal, le bilan est mitigé : si les artistes américains ont été soutenus par des fonds publics et ont acquis une reconnaissance nationale<ref>F. Martel, ''De la culture en Amérique'', 2006, p.111</ref>, cette politique culturelle est interrompue par la [[Seconde Guerre mondiale]] et la mort de Roosevelt.
==== Politique étrangère (1933-1941) ====
===== Entre isolationnisme et interventionnisme =====
[[Image:Quezon Roosevelt.jpg|thumb|right|200px|Le président Roosevelt accueille le président des Philippines [[Manuel Quezon]], à Washington DC.]]
Entre l'arrivée au pouvoir d'Adolf Hitler et l'entrée en guerre des États-Unis, Roosevelt dut prendre position sur les différentes questions internationales en tenant compte du Congrès et de l'opinon américaine. Il fut partagé entre l'[[Interventionnisme|interventionniste]] défini par le président Wilson et l'[[Isolationnisme américain|isolationniste]] qui consistait à tenir son pays en dehors des affaires européennes. La politique étrangère de Roosevelt fit l'objet de nombreuses controverses<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.349</ref>.
Franklin Delano Roosevelt connaissait bient l'Europe, l'Amérique latine et la Chine<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.350</ref>. Au début de sa carrière politique, il fut d'abord partisan de l'interventionnisme et soucieux de l'influence américaine à l'étranger : dans les années 1920, il était favorable aux idées wilsonniennes. En 1933, il nomme Cordell Hull Secrétaire d'État et celui-ci est contre le protectionnisme économique et le repli des États-Unis<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.353</ref>. Le {{date|16|novembre|1933}}, le gouvernement américain reconnaît officiellement l’[[Union des républiques socialistes soviétiques|Union soviétique]] et établit des relations diplomatiques avec ce pays.
Cependant, Roosevelt change rapidement de position sous la pression du Congrès, du [[pacifisme]] ou du [[nationalisme]] de l'opinion publique<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.360-366</ref>, et fait entrer les États-Unis dans une phase d'isolationnisme, tout en condamnant moralement les agressions des [[dictature]]s [[fascisme|fascistes]].
===== Politique de bon voisinage =====
{{Loupe|Politique de bon voisinage}}
Le président inaugure la « [[politique de bon voisinage]] » (''Good Neighbor policy'') avec l'[[Amérique latine]] et s'éloigne de la [[doctrine Monroe]] qui prévalait depuis [[1823]]. En décembre 1933, il signe la [[Convention de Montevideo]] sur les Droits et Devoirs des États, et renonce au droit d'ingérence unilatérale dans les affaires sud-américaines<ref>William E. Leuchtenberg, ''Franklin D. Roosevelt and the New Deal, 1932–1940'', Harper Perennial, New York, 1963, pp.203–210</ref>. En 1934, il fait abroger l'[[amendement Platt]] qui permettait à Washington d'intervenir dans les affaires intérieures de la République de Cuba<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.360-361</ref>. Les États-Unis abandonnent le [[protectorat]] sur [[Cuba]] issu de la Guerre contre l’[[Espagne]]. La même année, les ''[[Marines]]'' quittent [[Haïti]] et le Congrès vote la transition vers l’indépendance des [[Philippines]] qui ne sera effective que le {{date|4|juillet|1946}}. En 1936, c'est le droit d'intervention au [[Panama]] qui est aboli, mettant au fin au protectorat américain sur ce pays.
===== La neutralité américaine =====
Face aux risques de guerre en Europe, Roosevelt eut une attitude qui a pu paraître ambigüe : il s'évertua officiellement à maintenir les États-Unis dans la neutralité, tout en faisant des discours qui laissaient entendre que le Président souhaitait aider les démocraties et les pays attaqués.
Le {{date|31|août|1935}}, il signe la loi sur la neutralité (''Neutrality Act'') des États-Unis au moment de la [[seconde guerre italo-éthiopienne]] : elle interdisait les livraisons d'armes aux belligérants. Elle sera appliquée à la guerre entre l’[[Italie]] et l’[[Éthiopie]], puis à la guerre civile en [[Espagne]]. Roosevelt désapprouvait cette décision car il estimait qu'elle pénalisait les pays agressés et qu'elle limitait le droit du Président américain d'aider les États amis.
La loi de neutralité fut reconduite avec davantage de restrictions le {{date|29|février|1936}} (interdiction des prêts aux belligérants) et le {{date|1er|mai|1937}} (clause ''Cash and Carry'' - « payé – emporté » - qui autorisaient les clients à venir chercher eux-même les marchandises aux États-Unis et à les payer comptant<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.375 et 378</ref>.
En janvier 1935, Roosevelt proposa que les États-Unis participâssent au Tribunal permanent de justice internationale ; le Sénat, pourtant majoritairement démocrate, refusa d'engager le pays<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.370</ref>.
Face à l'isolationnisme du Congrès et à sa propre volonté d'intervenir qui brouillaient la politique étrangère américaine, Roosevelt déclara : {{Citation|Les États-Unis sont neutres, mais personne n'oblige les citoyens à être neutres.}} En effet, des milliers de volontaires américains ont participé à la [[guerre d'Espagne]] (1936-1939) contre les [[Franquiste]]s dans la [[brigade Abraham Lincoln]]<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.376</ref> ; d'autres se sont battus en Chine dans l'''[[American Volunteer Group]]'' qui formaient les « [[Les Tigres volants (escadrille)|Les Tigres volants]] » de [[Claire Chennault]] et plus tard les volontaires de la ''Eagle Squadron'' au sein de la [[Royal Air Force|RAF]] dans la [[bataille d'Angleterre]]. Lorsque la [[guerre sino-japonaise (1937-1945)]] se déclencha en 1937, l’opinion publique favorable à la [[République de Chine|Chine]] permit à Roosevelt d’aider ce pays de plusieurs façons<ref>William E. Leuchtenberg, ''Franklin D. Roosevelt and the New Deal, 1932–1940'', Harper Perennial, New York, 1963, ch.12</ref>.
===== Préparation à la guerre =====
En octobre 1937, à [[Chicago]], Roosevelt prononça un discours en faveur de la mise en quarantaine de tous les pays agresseurs qui seraient traités comme une menace pour la santé publique. En décembre [[1937]], au moment du [[massacre de Nankin]] en Chine, les avions japonais coulèrent la [[canonnière]] américaine [[USS Panay (PR-5)|Panay]] sur le [[Yang-tseu-Kiang]]<ref>Jacques Binoche, ''Histoire des États-Unis'', Paris, Ellipses, 2003, {{ISBN|2729814515}}, p.185</ref>. Washington obtint des excuses mais la tension monta rapidement entre les États-Unis et l'Empire du Soleil Levant. Le président américain fit publiquement part de son indignation face aux persécutions antisémites en Allemagne ([[nuit de cristal]], 1938)<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.381</ref>. Il rappelle son ambassadeur à Berlin. À partir de 1938, l'opinion américaine se rend compte que la guerre est inévitable et que les États-Unis devront y participer. Roosevelt prépare dès lors le pays à la guerre, sans entrer directement dans le conflit. Ainsi, il lança également en secret la construction de [[sous-marin]]s à long rayon d’action qui auraient pu bloquer l’expansionnisme du [[Japon]].
Lorsque la [[Seconde Guerre mondiale|Seconde Guerre mondiale]] se déclencha en septembre 1939, Roosevelt rejeta la proposition de neutralité du pays et chercha des moyens pour aider les pays alliés d’[[Europe]]. Il fit du {{date|11|octobre|1939}} le ''Pulaski Day'' en soutien des Polonais<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.394</ref>. Le {{date|4|novembre|1939}}, Roosevelt obtient l'abrogation de l'embargo automatique sur les armes et les munitions<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.393</ref>. Il commença aussi une correspondance secrète avec [[Winston Churchill]] pour déterminer le soutien américain au [[Royaume-Uni]]<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.395</ref>.
Pour se faire conseiller, Roosevelt se tourna vers [[Harry Hopkins]] qui devint son conseiller en chef en temps de guerre. Ils trouvèrent des solutions innovantes pour aider le [[Royaume-Uni]] comme par exemple l’envoi de moyens financiers à la fin de 1940. Le Congrès se ravisa petit à petit en faveur d’une aide aux pays attaqués et c’est ainsi qu’il alloua une aide en armements de 50 milliards de dollars à différents pays dont la [[République de Chine|Chine]] et la [[Russie]] entre 1941 et 1945. Contrairement à la [[Première Guerre mondiale|Première Guerre mondiale]], ces aides ne devaient pas être remboursées après la guerre. Toute sa vie, un des souhaits de Roosevelt était de voir la fin du [[colonialisme]] [[Europe|européen]]. Il se forgea d’excellentes relations avec Churchill qui devint Premier ministre du Royaume-Uni en mai 1940.
Au mois de mai 1940, l’Allemagne nazie envahit le [[Danemark]], la [[Norvège]], les [[Pays-Bas]], la [[Belgique]], le [[Luxembourg (pays)|Luxembourg]], et la [[France]] en laissant seul le Royaume-Uni face au danger d’une invasion allemande. Très vite, on se mit d’accord pour agrandir l’enveloppe des dépenses pour l’aide aux pays attaqués en sachant que le pays risquait d’entrer en guerre contre l'Allemagne à cause de cette aide. Roosevelt mis au pouvoir deux chefs républicains [[Henry L. Stimson]] et [[Frank Knox]] comme secrétaire de guerre et secrétaire de la Navy. La chute de [[Paris]] choqua l’opinion américaine et le sentiment d'isolationnisme tomba. Tout le monde se mit d’accord pour renforcer l’armée américaine mais certaines réticences à l’entrée en guerre eurent la dent dure encore un moment. Roosevelt demanda au Congrès de faire la première [[conscription]] de troupes en temps de paix du pays en septembre 1940<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.422</ref>. Il recommença en 1941. Roosevelt usa de son charisme pour que le public soit favorable à une intervention militaire du pays. Le pays devait devenir l’arsenal de la démocratie. Au mois d’août 1940, Roosevelt viola ouvertement l’acte de neutralité avec l’accord [[Destroyers for Bases Agreement]] qui devait donner 50 bateaux [[destroyer]]s des [[États-Unis]] au Royaume-Uni en échange de terres appartenant à ce pays dans les [[Mer des Caraïbes|Caraïbes]]. Cet acte fut précurseur des aides massives qui suivirent en mars 1941 envers le [[Royaume-Uni]], la [[République de Chine|Chine]] et la [[Russie]].
[[Image:Atlantic charter.jpg|thumb|right|200px|Rencontre entre Roosevelt et Churchill sur l'USS Augusta, à Argentia]]
Le {{date|29|décembre|1940}}, Roosevelt évoque dans un discours radiodiffusé la conversion de l'économie américaine pour l'effort de guerre : le pays doit devenir « l'arsenal de la démocratie » (''The Arsenal of Democracy''). Le {{date|6|janvier|1941}}, il prononce son discours sur les [[Quatre libertés]] présentées comme fondamentales dans son [[discours sur l'état de l'Union]] : la [[liberté d'expression]], de [[liberté de religion|religion]], de vivre à l'abri du [[besoin]] et de la [[peur]]. Le lendemain, le président crée le Bureau de la gestion de la production (''Office of Production Management'') ; d'autres organismes seront fondées par la suite pour coordonner les politiques : Bureau de l’administration des prix et des approvisionnements civils (''Office of Price Administration and Civilian Supply''), Bureau des priorités d’approvisionnement et des allocations (''Supplies Priorities and Allocation Board'') dès 1941 ; Service de la mobilisation de guerre (''Office of War Mobilization'') en mai 1943. Le gouvernement fédéral renforce ainsi ses prérogatives ce qui suscite des réactions parmi les Républicains, mais aussi dans le propre camp de Roosevelt : ainsi, en août 1941, le sénateur démocrate [[Harry Truman]] rend un rapport sur les gaspillages du de l'État fédéral<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.458</ref>.
Le programme ''[[Lend-Lease]]'' (programme prêt-bail en français) devait fournir les Alliés en matériel de guerre sans intervenir directement dans le conflit. La loi ''Lend-Lease'' fut signée le {{date|11|mars|1941}} et autorise le Président des États-Unis à « vendre, céder, échanger, louer, ou doter par d'autres moyens » tout matériel de défense à tout gouvernement « dont le Président estime la défense vitale à la défense des États-Unis. »
Le {{date|7|juillet|1941}}, Washington envoie quelque {{formatnum:7000}} marines en [[Islande]] pour empêcher une invasion allemande. Les convois de matériel à destination de l’Angleterre sont escortés par les forces américaines<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.417</ref>.
En août 1941, Roosevelt rencontre le [[Premier ministre du Royaume-Uni|Premier Ministre britannique]] [[Winston Churchill]] lors de la [[conférence de l'Atlantique]], tenue à bord d'un navire de guerre au large de [[Terre-Neuve]]. Les deux hommes signent la [[Charte de l'Atlantique]] le {{date|14|août|1941}}, qui reprend et complète le Discours des quatre libertés de Roosevelt, « entreprend de jeter les fondements d'une nouvelle politique internationale. »
Le {{date|11|septembre|1941}}, Roosevelt ordonne à son aviation d’attaquer les navires de l’[[Axe Rome-Berlin|Axe]] surpris dans les eaux territoriales américaines. Cinq jours plus tard, le [[service militaire]] obligatoire en temps de paix est instauré. Le {{date|27|octobre|1941}}, après le torpillage de deux navires de guerre américains par des sous-marins allemands, Roosevelt déclare que les États-Unis ont été attaqués. À la différence de la Première Guerre mondiale, les États-Unis ont eu le temps de se préparer au conflit<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.422</ref>. Il ne reste qu'à attendre l'étincelle qui déclenchera l'entrée en guerre : elle viendra du Japon et non de l'Allemagne nazie comme le pensait Roosevelt.
===== L'attaque japonaise et l'entrée en guerre =====
{{Loupe|Attaque de Pearl Harbor}}
[[Image:CongressRoosevelt1941.jpg|thumb|200px|Roosevelt s'adresse au Congrès américain le 8 décembre 1941]]
[[Image:Franklin Roosevelt signing declaration of war against Japan.jpg|thumb|200px|Le président américain Roosevelt signant la déclaration de guerre contre le Japon]]
[[Image:Franklin_Roosevelt_signing_declaration_of_war_against_Germany.jpg|thumb|200px|Franklin Delano Roosevelt le {{date|11|décembre|1941}} signant la [[déclaration de guerre]] contre l'[[Allemagne]]]]
Le {{date|26|juillet|1941}} : nationalisation des forces militaires [[philippines]], encore sous contrôle américain, et nomination du général [[Douglas MacArthur]] en charge du théâtre Pacifique. Les relations avec le Japon commencent à se détériorer.
En mai 1941, Washington accorda son soutien à la Chine par l’octroi d’un [[prêt-bail]]. Suite au refus du Japon de se retirer de l'Indochine et de la Chine, à l'exclusion du [[Manchukuo]], les États-unis, la Grande-Bretagne et les [[Pays-Bas]] décrétèrent l’embargo complet sur le [[pétrole]] et l’[[acier]] ainsi que le gel des avoirs japonais sur le sol américain<ref>Roland H. Worth, Jr., ''No Choice But War: the United States Embargo Against Japan and the Eruption of War in the Pacific'', Jefferson, North Carolina, McFarland, 1995, {{ISBN|0786401419}}</ref>.
Le {{date|7|décembre|1941}}, les forces japonaises bombardent [[Pearl Harbor]] à Hawaii, la plus grande [[base navale]] américaine dans l'[[océan Pacifique]]<ref>Pierre Vallaud, ''Témoins de l’Histoire. La Seconde Guerre mondiale, plus de 500 documents inédits'', éditions Acropole, Paris, 2002, {{ISBN|2735702308}}, p.211</ref>. L'attaque fit {{formatnum:2403}} morts et {{formatnum:1178}} blessés<ref name="Vallaud216">Pierre Vallaud, ''Témoins de l’Histoire. La Seconde Guerre mondiale, plus de 500 documents inédits'', éditions Acropole, Paris, 2002, {{ISBN|2735702308}}, p.216</ref>. De nombreux navires et avions de guerre furent anéantis.
Les Japonais firent une déclaration de guerre officielle mais à cause de divers contretemps, elle ne fut présentée qu'après l'attaque. Le [[8 décembre]] 1941, le président Roosevelt déclara à la radio : {{Citation|Hier, 7 décembre 1941, une date qui restera dans l'Histoire comme un jour d’infamie, les États-Unis d'Amérique ont été attaqués délibérément par les forces navales et aériennes de l'empire du Japon}}<ref>P. Vallaud, ''Témoins de l’Histoire'', 2002, p.217 ; Pour le discours en anglais voir l’article sur Wikipédia en anglais {{en}} [[:en:Infamy Speech|Infamy Speech]] et [[s:en:Pearl Harbor speech|wikisource]]</ref>.
Le [[Congrès des États-Unis|Congrès américain]] déclara la guerre au Japon à la quasi unanimité et Roosevelt signa la déclaration le jour même.
Le [[11 décembre]], l’[[Allemagne]] et l’[[Italie]] déclarent la guerre aux États-Unis.
Avec la loi sur la [[conscription]] du [[20 décembre]] 1941, la mobilisation s'élargit à tous les Américains entre 20 et 40 ans<ref>Jean-Michel Lacroix, ''Histoire des États-Unis'', PUF, Paris, 2006, {{ISBN|2130554776}}, p.388</ref>. Le [[22 décembre]] 1941 débuta la [[conférence Arcadia]] au cours de laquelle [[Winston Churchill|Churchill]] et Roosevelt décidèrent d'unir leurs forces contre l'Allemagne nazie. La [[Déclaration des Nations unies]] du {{1er janvier}} 1942 prévoyait la création de l'[[Organisation des Nations unies|ONU]]. L'entrée en guerre des États-Unis marquait un tournant dans la mondialisation du conflit.
Une thèse très controversée affirme que Roosevelt était au courant de l'attaque et qu'il laissa faire pour provoquer l'indignation de la population et faire entrer son pays dans la guerre. Cette théorie fut d'abord avancée par les officiers déchus par les commissions d'enquête : [[Husband Kimmel]] se dit victime d'un complot visant à cacher la responsabilité du gouvernement et de l'état-major. Il diffusa cette idée dans ses ''Mémoires'' parues en [[1955]]. Cette thèse fut ensuite reprise par les adversaires de Roosevelt et de sa politique extérieure<ref>A. Kaspi, « Pearl Harbor : une provocation américaine ? », dans ''L'Histoire'', n°101, juin 1987, p.37</ref>. Plus tard, plusieurs historiens américains, tels que Charles Beard et Charles Tansill<ref>A. Kaspi, ''Roosevelt'', 1997, p.436</ref> ont essayé de prouver l'implication du président.
Les faits cités à l'appui de cette théorie sont notamment l'absence supposée providentielle des trois porte-avions en manœuvre le jour de l'attaque et qui n'ont pas été touchés, le fait que les nombreux messages d'avertissement aient été ignorés et enfin les négligences locales. Certains soupçonnent le gouvernement américain d'avoir tout fait pour ne recevoir la déclaration de guerre japonaise qu'après le bombardement. Les partisans de cette thèse sont convaincus que Roosevelt a poussé les Japonais à la guerre tout au long des [[années 1930]] afin de convaincre le peuple américain partisan de la [[neutralité]].
Il est cependant difficile d'imaginer que Roosevelt ait laissé détruire autant de bâtiments de la marine juste pour engager son pays dans la guerre. En effet, la valeur tactique des [[porte-avions]] était méconnue en 1941, même si d'évidence, compte-tenu des investissements réalisés, les Japonais et les Américains fondaient de gros espoirs sur cette nouvelle unité marine. C'était encore le [[cuirassé]] qui faisait figure de navire principal dans les flottes de guerre et même l'amiral Yamamoto envisageait la confrontation finale entre les deux pays sous la forme d'un combat entre cuirassés. Dès lors, tout officier au courant de l'attaque aurait fait en sorte de protéger les cuirassés qui seraient alors partis au large en sacrifiant les porte-avions.
Par conséquent, rien ne permet d’affirmer que Roosevelt était au courant de l'attaque sur Pearl Harbor<ref>P. Vallaud, ''Témoins de l’Histoire'', 2002, p.212</ref>{{,}}<ref>Howard Zinn, Frédéric Cotton (trad.), ''Une histoire populaire des États-Unis, de 1492 à nos jours'', Paris, Agone, 2002, {{ISBN|2910846792}}, p.466</ref>, même s'il fait peu de doute qu'il a accumulé les actes contraires à la neutralité durant les [[années 1930]]. Cependant, les sanctions économiques visaient avant tout les Allemands<ref name="Michel339">Henri Michel, ''La Seconde Guerre mondiale'', Omnibus, Paris, 2001, {{ISBN|2258056039}}, p.339</ref> et le président américain donnait la priorité au théâtre d’opération européen comme le montre par exemple la [[conférence Arcadia]], et la guerre contre le Japon ne fut jamais sa première priorité.
Si Roosevelt et son entourage étaient conscients des risques de guerre provoqués par la politique de soutien au Royaume-Uni, à l'URSS et à la Chine, il n'y a pas d'indication qu'il ait souhaité l'attaque de Pearl Harbor. Le désastre fut provoqué par la préparation minutieuse des Japonais, par une série de négligences locales et par des circonstances particulièrement défavorables aux Américains.
=== Troisième mandat (1940-1944) ===
==== Les élections de 1940 ====
{{loupe|Élection présidentielle des États-Unis d'Amérique 1940|Élection présidentielle des États-Unis d'Amérique 1944}}
[[Image:Roosevelt Truman Wallace.jpg|thumb|De gauche à droite : Franklin D. Roosevelt, Harry S. Truman et Henry Wallace. (novembre 1944)]]
La tradition d'une limite maximale de deux [[Mandat politique|mandats]] présidentiels était une règle non écrite mais bien ancrée depuis que [[George Washington]] déclina son troisième mandat en 1796. C'est ainsi que [[Ulysses S. Grant]] et [[Theodore Roosevelt]] furent attaqués pour avoir essayé d'obtenir un troisième mandat (non consécutif) de président. Franklin Delano Roosevelt coupa pourtant l'herbe sous les pieds des [[Secrétaire d'État|secrétaires d'État]] [[Cordell Hull]] et [[James Farley]] lors de l'investiture [[Parti démocrate (États-Unis)|démocrate]] aux nouvelles élections. Roosevelt se déplaça dans une convention de [[Chicago]] où il reçut un fervent support de son parti. L'opposition à FDR était mal organisée malgré les efforts de James Farley. Lors du meeting, Roosevelt expliqua qu'il ne se représenterait plus aux élections sauf s'il était plébiscité par les délégués du parti qui étaient libres de voter pour qui ils souhaitaient. Les délégués furent étonnés un moment mais ensuite la salle cria {{Citation|Nous voulons Roosevelt... Le monde veut Roosevelt !}} Les délégués s'enflammèrent et Roosevelt fut nommé par 946 voix contre 147. Le nouveau nominé pour la vice-présidence était [[Henry A. Wallace]], un intellectuel libéral qui devint plus tard Secrétaire à l'Agriculture<ref>Burns 1:408–15, 422–30; Freidel (1990) 343–6</ref>.
Le candidat républicain, [[Wendell Willkie]], est un ancien membre du Parti démocrate qui avait auparavant soutenu Roosevelt. Sa plate-forme électorale n'est pas véritablement différente de son adversaire. Dans sa campagne électorale, Roosevelt mit en avant son expérience au pouvoir<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.407</ref> et son intention de tout faire pour que les [[États-Unis]] restent à l'écart de la guerre. Roosevelt remporta ainsi l'[[Élection présidentielle des États-Unis d'Amérique 1940|élection présidentielle des États-Unis d'Amérique de 1940]] avec {{unité|55|%}} des votes et une différence de 5 millions de suffrages<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.412</ref>. Il obtint la majorité dans 38 des 48 [[État des États-Unis|états]] du pays à l'époque. Un déplacement à gauche de la politique du pays se fit sentir dans l'administation suite à la nomination de [[Henry A. Wallace]] comme [[Vice-président des États-Unis|vice-président]] en lieu et place du conservateur [[Texas|texan]] [[John Nance Garner]] qui était devenu un ennemi de Roosevelt après 1937.
==== Roosevelt et la guerre ====
[[Image:FDR conference 1944 HD-SN-99-02408.JPEG|thumb|200px|Roosevelt en conférence avec le général MacArthur, les amiraux Chester Nimitz et W. D. Leahy(1944)]]
Si dans les institutions américaines, le président est le chef des armées, Roosevelt ne se passionnait pas pour les affaires strictement militaires. Il délégua cette tâche et plaça sa confiance dans son entourage, en particulier [[George Marshall]] et [[Ernest King]]<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.468-471</ref>. Une agence unique de renseignements fut mise en place en 1942 (''Office of Strategic Services'') qui sera remplacée par la [[CIA]] en 1947. Le président créa par la suite l’''Office of War Information'' (Bureau de l’information de guerre) qui mit en place une propagande de guerre et surveilla la production cinématographique<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.479</ref>. Il autorisa le [[FBI]] à utiliser les écoutes téléphoniques pour démasquer les espions<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.480</ref>. Le [[6 janvier]] 1942, Roosevelt annonce le [[Programme de la Victoire]] qui prévoit un effort de guerre important (construction de chars, avions)<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.456</ref>.
Enfin, Roosevelt s'intéressa au [[projet Manhattan]] pour fabriquer la [[bombe atomique]]. En 1939, il fut averti par une lettre d'[[Albert Einstein]] que l'[[Allemagne]] [[Nazisme|nazie]] travaillait sur un projet équivalent<ref>{{en}} [http://www.atomicarchive.com/Docs/Begin/Einstein.shtml Lettre d'Einstein au Président Roosevelt]</ref>. La décision de produire la bombe fut prise en secret en décembre 1942. En août 1943, à Québec, fut signé un accord anglo-américain de coopération atomique<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.483</ref>. Selon le [[Secrétaire à la Guerre des États-Unis|Secrétaire à la Guerre]] [[Henry Stimson]], Roosevelt n’a jamais hésité sur la nécessité de la bombe atomique<ref>Henry Stimson, ''Faut-il recommencer la guerre ?'', Paris, L’Elan, 1949, p.408</ref>. Mais ce fut son successeur [[Harry Truman]] qui prit l'initiative des bombardements nucléaires d'[[Hiroshima]] et [[Nagasaki]], plusieurs mois après la mort de Roosevelt.
==== La question juive ====
Dès 1936, Roosevelt avait dénoncé l’oppression et les lois de Nuremberg<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.489</ref>. Pourtant, il considérait également qu'il ne pouvait intervenir directement dans les affaires internes de l'Allemagne<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.490</ref>. Il ne fit pas pression sur le Congrès pour augmenter l'accueil des réfugiés juifs.
Pendant la guerre, le président américain n'a pas cherché à aider les Juifs d'Europe, considérant que le principal objectif devait être l'écrasement du régime nazi<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.492</ref>. Malgré la pression des Juifs américains, de sa femme et de l'opinion publique américaine, le président ne dévia pas de cette opinion. Il ne fut pas mis au courant des projets de bombardements d’Auschwitz ou des voies ferrées<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.494</ref>.
==== Roosevelt et ses alliés ====
{{Loupe|Conférences inter-alliées}}
[[Image:Tehran Conference, 1943.jpg|thumb|200px|right|Conférence de Téhéran - Staline, Roosevelt et Churchill - Téhéran 1943]]
[[Image:Yalta_summit_1945_with_Churchill,_Roosevelt,_Stalin.jpg|thumb|200px|right|Conférence de [[Yalta]], 1945]]
[[Image:FDR on quincy.jpg|thumb|200px|Roosevelt et le [[Abd al-Aziz ben Abd al-Rahman Al Saoud|roi Abdulaziz]], à bord du ''Quincy'' (février 1945)]]
Roosevelt fut l'un des principaux acteurs des [[conférences inter-alliées]] et tenta d'y défendre les intérêts des États-Unis tout en faisant des compromis<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.472-475</ref>. En 1942, il donna la priorité au front européen tout en contenant l'avancée japonaise dans le Pacifique. Il subit la pression de Staline qui réclamait l'ouverture d'un second front à l'ouest de l'Europe, alors que Churchill n'y était pas favorable et préférait la mise en œuvre d'une stratégie périphérique.
Roosevelt eut le grand mérite, bien que l'implication de son pays dans cette guerre ait résulté avant tout de l'attaque japonaise, d'orienter prioritairement la riposte américaine en direction de l'Europe, une fois le conflit équilibré sur le front du Pacifique par la [[Bataille de Midway|victoire aéronavale des Îles Midway]].
Son évaluation à sa juste mesure de l'énormité du danger hitlérien et de la nécessité d'empêcher l'URSS de sombrer justifiait certes ce choix. Mais il dut néanmoins pour l'imposer surmonter les préférences post-isolationnistes de la majorité des Américains pour lesquels l'ennemi principal était le Japon.
C'est ainsi que fut mise sur pied une vigoureuse entrée en ligne des États-Unis aux côtés des Britanniques, d'abord vers l'Afrique du Nord par l'[[opération Torch]], puis vers l'Europe par les débarquements successifs en Italie et [[Bataille de Normandie|en France]].
À la [[Conférence d'Anfa]] ([[Casablanca]], janvier 1943), Roosevelt obtint d'exiger la reddition sans condition des puissances de l'Axe. Les Alliés décidèrent d'envahir la l'Italie. Les [[11 août|11]]-[[24 août]] 1943, Roosevelt et [[Winston Churchill|Churchill]] se rencontrent au Canada pour préparer le débarquement en France prévu au printemps 1944. Au cours de la [[conférence de Téhéran]] (novembre 1943), plusieurs décisions majeures furent prises : organisation d'un débarquement en Normandie, rejet par Staline et Roosevelt du projet britannique d’offensive par la Méditerranée et les Balkans. Sur le plan politique, Staline accepta le principe de la création d'une organisation internationale, proposé par Roosevelt. Les Trois Grands s'entendirent également sur le principe d'un démembrement de l’Allemagne. Ils ne fixèrent pas précisément les nouvelles frontières de la Pologne, car Roosevelt ne voulait pas heurter les millions d'Américains d’origine polonaise. Entre le [[1er juillet|1{{er}}]] etle [[22 juillet]] 1944, les représentants de 44 nations se réunissent à [[Bretton Woods]] et créent la [[Banque mondiale]] et le [[Fonds Monétaire International]]. La politique monétaire de l’après-guerre sera fortement affectée par cette décision. À la [[conférence de Dumbarton Oaks]] (août-octobre 1944), Roosevelt réussit à imposer un projet auquel il tenait beaucoup : les Nations Unies.
C'est à l'initiative de Roosevelt que se tint de la [[conférence de Yalta]] en février 1945<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.574</ref>. Le président arriva dans la station balnéaire de Crimée très fatigué et malade<ref>Buhite, Sherwood, Cyrus L. Sulzberger, ''Such a Peace. Roots and Ashes of Yalta'', New York, A Giniger Book, Continuum, 1982</ref>. Il dut faire d'importantes concessions à l'URSS car il avait besoin de Moscou pour vaincre les Japonais<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.476</ref>. Roosevelt faisait alors confiance à Staline<ref>A. Conte parle de la « candeur de l'Occident » (in : ''Yalta ou le partage du monde'', R. Laffont, 1964, p. 364) et A. Fontaine de « l'espoir insensé qu'il (i.e. Roosevelt) nourrissait de voir la patrie du socialisme s'associer à la garantie d'un ordre international dont celle du capitalisme aurait été pour longtemps le véritable leader. » (in : ''La Guerre froide 1917-1991'', Éditions de la Martinière, 2004, p. 87)</ref>. « Si je lui donne (i. e. à Staline), estima-t-il, tout ce qu'il me sera possible de donner sans rien réclamer en échange, noblesse oblige, il ne tentera pas d'annexer quoi que ce soit et travaillera à bâtir un monde de démocratie et de paix. »<ref>cité par A. Fontaine dans ''Le Monde'' du 5 février 1990</ref>.
Les Alliés reparlèrent également de l'ONU et fixèrent le droit de veto du conseil de sécurité, le projet auquel tenait beaucoup Roosevelt. Ils se sont entendu sur la tenue d'élections libres dans les États européens libérés, l’entrée en guerre de l'Union soviétique contre le Japon après la défaite de l'Allemagne, la division de l'Allemagne en zones d'occupation, le déplacement de la Pologne vers l'ouest
Après la conférence de Yalta, Roosevelt s'envola pour l'Égypte et rencontra le roi [[Farouk Ier d'Égypte|Farouk]] ainsi que l'empereur d'Éthiopie [[Hailé Sélassié Ier]] à bord de l'USS Quincy. Le 14 février, il s'entretint avec le [[Abd al-Aziz ben Abd al-Rahman Al Saoud|roi Abdulaziz]], fondateur de l'Arabie Saoudite.
==== Roosevelt et la France ====
[[Image:Roosevelt and Giraud.gif|thumb|200px|Franklin D. Roosevelt et le général Henri Giraud à Casablanca (janvier 1943)]]
De la situation complexe de la France pendant la Seconde Guerre mondiale, Roosevelt écrivit à Churchill qu'elle était leur « mal de tête commun<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.504</ref>. » Sa politique étrangère fut largement contestée et soumise aux pressions du Département d'État et par ses diplomates [[William Leahy|Leahy]] et [[Robert Murphy|Murphy]]. Dans un premier temps, le président américain garda des contacts diplomatiques avec l'État français : il pensait ainsi éviter que la flotte française ne tombe aux mains des nazis et avoir des renseignements sur la France. Il refusait de reconnaître l'autorité et la légitimité de Charles De Gaulle. Au début de 1942, il s'opposait à ce que la [[France libre]] participassent aux Nations unies avant les élections en France<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.516</ref>. Dès 1941 pourtant, une partie des Américains protesta contre la complaisance du Département d’État envers le régime de Vichy<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.513</ref>. La presse américaine était également favorable à la France libre<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.515-516</ref>.
Mais en avril 1942, le retour de Laval au pouvoir entraîne le départ ambassadeur américain<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.504</ref>. Washington ouvre alors un consulat à Brazzaville. Mais la méfiance vis-à-vis de De Gaulle ne se dissipe pas : pour le département d’État, le personnage n'est qu'« apprenti-dictateur » et Roosevelt est persuadé que les gaullistes divulgueront les opérations secrètes des armées alliées<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.518</ref>. Roosevelt soutint successivement [[François Darlan]] puis [[Henri Giraud (général)|Henri Giraud]], malgré leur maintien du [[Situation politique en Afrique libérée (1942-1943)|Régime de Vichy en Afrique libérée (1942-43)]], et qu'il tenta de bloquer l'action du [[Comité français de la Libération nationale]] d'Alger, puis de placer la France libérée sous occupation militaire américaine ([[Allied Military Government of Occupied Territories|AMGOT]]).
De Gaulle ne fut mis au courant du débarquement en Normandie qu'à la dernière minute. Roosevelt reconnaît le GPRF qu'en octobre 1944. La France n'est pas invitée à la conférence de Yalta. Churchill insiste pour que la France soit en charge d'une zone d'occupation de l'Allemagne. Mais le président américain se rend compte que De Gaulle est l'homme qui contrera la menace communiste en France<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.538</ref>. Profondément anticolonialiste, il souhaitait que l'Indochine française soit placée sous la tutelle des Nations unies, mais il dut finalement abandonner cette idée sous la pression du Département d'État, des Britanniques et de De Gaulle<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.539</ref>.
==== Les États-Unis pendant la guerre ====
Sur le plan économique, Roosevelt prit des mesures contre l'inflation et pour l'effort de guerre. Dès le printemps 1942, il fit accepter la loi du ''General Maximum'' visant à augmenter l'impôt sur le revenu, à bloquer les salaires et les prix agricoles pour limiter l'inflation. Cette politique fiscale fut renforcée par le ''Revenue Act'' en octobre 1942. La conversion de l'économie se fit rapidement : entre décembre 1941 et juin 1944, les États-Unis produisirent {{formatnum:171257}} avions et {{formatnum:1200}} navires de guerre<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.461</ref>, ce qui entraîna la croissance du [[complexe militaro-industriel]]. Cependant, les produits de consommation courante et d'alimentation furent insuffisants, sans que la situation soit aussi importante qu'en Europe<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.462</ref>. Une [[économie mixte]], alliant [[capitalisme]] et intervention de l'État fut mise en place pour répondre aux nécessités de la guerre. Sur le plan social, les campagnes connurent un exode rural et une surproduction agricole. Les Afro-américains du Sud migrèrent vers les centres urbains et industriels du Nord-Est. Dans le monde ouvrier, la période fut agitée par de nombreuses grèves à cause du gel des salaires et de l'une augmentation de la durée du travail. Le chômage baissa à cause de la mobilisation et le taux d'emploi des femmes progressa<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.465</ref>.
Les discriminations à l'égard des Afro-américains persistèrent jusqu'au sein de l'armée, malgré l'ordre exécutif 8802 qui les interdisaient dans les usines de défense nationale<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.467</ref>. Après l'attaque de Pearl Harbor, le sentiment anti-japonais prit de l'ampleur. C'est dans ce contexte que {{formatnum:110000}} Japonais et citoyens américains d'origine japonaise<ref>Jean-Michel Lacroix, ''Histoire des États-Unis'', PUF, Paris, 2006, {{ISBN|2130554776}}, p.389</ref> furent rassemblés et surveillés dans des camps d'internement (''War Relocation Centers''). Le [[14 janvier]] 1942, Roosevelt signe un décret de [[fichage]] des Américains d’origine italienne, allemande et japonaise qu’on soupçonne de connivence avec l’ennemi. Le [[décret présidentiel 9066]] du [[19 février]] 1942 fut signé par Roosevelt et concerna l'ouest du pays où se concentraient les populations japonaises, regroupés dans des camps surveillés.
Le [[7 novembre]] 1943, Franklin Roosevelt est de nouveau candidat avec le support de la quasi-totalité de son parti. Il est de nouveau opposé à un candidat républicain, [[Thomas Dewey]], dont la plate-forme n'est pas en contradiction totale avec la politique de Roosevelt<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.501</ref>. Ce dernier, malgré son âge et sa fatigue, mène campagne en demandant aux Américains de ne pas changer de pilote au milieu du gué. Roosevelt est réélu pour un quatrième mandat avec une courte majorité de {{unité|54|%}} ({{formatnum:25602505}} voix) mais plus de {{unité|80|%}} du vote du collège électoral (432 mandats).
=== Mort de Roosevelt ===
[[Image:Franklin_Roosevelt_funeral_procession_1945.jpg|thumb|200px|Les funérailles de Franklin Delano Roosevelt à Washington DC, le [[14 avril]] [[1945]].]]
Lors de son discours devant le congrès le 1er mars 1945, Roosevelt apparut amaigri et vieilli ; il partit pour [[Warm Springs]] le 30 mars pour prendre du repos avant la conférence des Nations Unies. Le {{date|12|avril|1945}}, il s'écroula se plaignant d'un terrible mal de tête alors qu'[[Elizabeth Shoumatoff]] était en train de peindre son portrait. Il mourrut dans l'après-midi à l'âge de 63 ans d'une [[hémorragie cérébrale]].
Lucy Mercer Rutherfurd, l'ancienne maîtresse du président, était présente aux côtés de Roosevelt et partit rapidement pour éviter le scandale<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.596</ref>. Eleanore Roosevelt prit le premier avion pour se rendre à Warm Springs.
Le corps du président fut transporté en train jusqu'à la capitale : des milliers de personnes se rassemblent le long de la voie ferrée pour lui rendre hommage. Le cercueil est déposé à la Maison Blanche puis dans la maison familiale de Hyde Park. Les fils de Franklin Roosevelt étant mobilisés, ils n’ont pas pu assister à la cérémonie funèbre sauf Elliott. Le président fut enterré dans le [[Franklin D. Roosevelt National Historic Site]].
La mort de Roosevelt souleva une grande émotion dans le pays et à l'étranger. Son état de santé avait été caché par son entourage et par les médecins de la Maison Blanche. Roosevelt était président depuis plus de 12 ans, une longévité jamais égalée par aucun président américain. En URSS, le drapeau soviétique fut bordé de noir et les dignitaires assistèrent à la cérémonie à l’ambassade<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.594</ref>. Staline pensait que le président américain avait été empoisonné<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.596</ref>. Le président du conseil italien décréta trois jours de deuil<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.594</ref>. En Allemagne, la nouvelle rendit Goebbels joyeux, on ne connaît pas la réaction d’Hitler<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.595</ref>.
Conformémement à la constitution américaine, le vice-président [[Harry Truman]] devint le 33{{e}} président des États-Unis alors qu'il avait été tenu à l’écart des décisions politiques et qu'il ne s'était pas rendu à Yalta. Truman dédia la cérémonie du 8 mai 1945 à la mémoire de Roosevelt.
== Caractère ==
Les traits principaux du caractère de Roosevelt se révèlent à l'époque de sa première campagne présidentielle : son optimisme<ref>D. Artaud, ''L'Amérique en crise. [...]'', 1987, p.50</ref>, renforcé par la gravité de sa maladie et sa volonté de s'en remettre, son exigence vis-à-vis de lui-même mais aussi de ses collaborateurs. C'est un personnaage intuitif et un charmeur, toujours souriant<ref>D. Artaud, ''L'Amérique en crise. [...]'', 1987, p.51</ref> et savait répondre avec humour aux critiques<ref>D. Artaud, ''L'Amérique en crise. […]'', 1987, p.128</ref>. Roosevelt était doué pour la communication et capable d' éloquence, moins en meeting qu'en petits comités d'où l'incontestable succès de ses causeries « au coin du feu » (''fireside chat'') auprès des Américains. C'est aussi un calculateur capable de ne pas s'embarrasser de trop de sentiments pour parvenir à ses résultats, souvent égoïste et attaché à son indépendance<ref>D. Artaud, ''L'Amérique en crise. [...]'', 1987, p.50</ref>. Selon son [[Secrétaire d'État]] à l'Intérieur, [[Harold Ickes]] :
« ''Vous êtes quelqu'un de merveilleux, mais vous êtes un homme avec lequel il est difficile de travailler.(…) Vous ne parlez jamais franchement même avec les gens qui vous sont dévoués et dont vous connaissez la loyauté''. »
Franklin Roosevelt avait le sens de l'opinion<ref>D. Artaud, ''L'Amérique en crise. [...]'', 1987, p.48</ref>. Avec sa voix chaude et mélodieuse<ref>D. Artaud, ''L'Amérique en crise. [...]'', 1987, p.48</ref>, il savait s'adresser au public ainsi qu'aux journalistes. Devenu président des États-Unis, ses décisions étaient motivées par un souci de pragmatisme<ref>D. Artaud, ''L'Amérique en crise. [...]'', 1987, p.50</ref> et une obsession de la démocratie, comme en témoigne sa méfiance à l'égard de De Gaulle. Il était profondément religieux<ref>D. Artaud, ''L'Amérique en crise. […]'', 1987, p.126</ref>.
== Anecdotes ==
[[Image:FDR_and_Fala_at_table.jpg|thumb|200px|Franklin D. Roosevelt et Fala]]
F.D. Roosevelt est le seul président à avoir été élu quatre fois. Il le restera car un [[Constitution des États-Unis d'Amérique#XXIIe amendement|amendement à la Constitution]] limitant le nombre de mandats à deux a été voté en 1951.
Lorsqu’il est élu président Roosevelt ne fait pas partie de la classe politique de Washington, il n’a jamais été élu au Congrès des États-Unis mais les généalogistes ont montré qu’il avait des liens familiaux avec onze autres présidents américains ainsi qu’avec [[Winston Churchill]]. Il fait partie des huit présidents morts pendant leur mandat.
En 1939, Roosevelt devient le premier président à apparaître à la télévision. Il utilisa aussi beaucoup la radio. Il n'aimait guère le théâtre et collectionnait les timbres postes<ref>[[Frédéric Martel]], ''De la culture en Amérique'', Paris, Gallimard, 2006, {{ISBN|2070779319}}, p.102</ref>.
== Héritage et hommages ==
[[Image:FDR_memorial.jpg|thumb|200px|Mémorial Franklin Delano Roosevelt]]
Selon un classement dressé par des historiens pour le magazine ''The Atlantic Montly'', il est le troisième Américain le plus influent de l'Histoire, derrière [[Abraham Lincoln|Lincoln]] et [[George Washington|Washington]]<ref>« Abraham Lincoln, l'Américain le plus influent de l'Histoire », dans ''[[Le Monde]]'' du 22/11/2006, {{Lire en ligne|lien=http://www.lemonde.fr/web/depeches/0,14-0,39-28904966@7-37,0.html}}</ref>. Cependant, Roosevelt est considéré comme le plus grand président américain du XX{{e}} siècle<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.602</ref>.
Roosevelt resta un modèle dans la deuxième moitié du XX{{e}} siècle. Eleanor Roosevelt continua d'exercer son influence dans la politique américaine et dans les affaires mondiales : elle participa à la conférence de San Francisco et défendit ardamment les droits civiques. De nombreux membres de l'administration Roosevelt poursuivirent une carrière politique auprès de [[Harry S Truman|Truman]], [[John F. Kennedy|Kennedy]] et [[Lyndon B. Johnson|Johnson]].
Truman essaya de marcher dans les pas de son prédécesseur en lançant le ''[[Fair Deal]]''. Mais c'est le président Johnson qui fut le plus rooseveltien des présidents et il aimait comparer sa politique sociale au New Deal<ref>A. Kaspi, ''Franklin Roosevelt'', Fayard, 1988, p.606</ref>.
L'héritage de Roosevelt a été considérable sur la vie politique américaine : il consacre la fin de l’isolationnisme, la défense des libertés et le statut de superpuissance des États-Unis. Mais Roosevelt fut également très contesté à la fois par les Républicains et la Nouvelle Gauche qui estimait que le New Deal n'avait pas été assez loin.
La maison natale de Roosevelt est classée [[National historic site]] et abrite la [[Franklin D. Roosevelt Presidential Library and Museum|bibliothèque présidentielle]]. La résidence de Warm Springs ([[Little White House]]) est un musée géré par l'état de Géorgie. La villa de vacances de [[Campobello|Campobello Island]] est administré par le Canada et les Etats-Unis ([[Roosevelt Campobello International Park]]). Elle est accessible par le [[Franklin Delano Roosevelt Bridge]].
Le [[Franklin Delano Roosevelt Memorial|Roosevelt Memorial]] se trouve à Washington D.C., juste à côté du [[Jefferson Memorial]]. De nombreuses écoles portent le nom du président, ainsi qu'un [[USS Franklin D. Roosevelt (CV-42)|porte-avions]]. A Paris, il existe une station de métro ([[Franklin D. Roosevelt (métro de Paris)|Franklin D. Roosevelt]] à son nom.
Le portrait de Franklin Roosevelt apparaît sur la pièce de 10 cents.
[[Monaco]] a émis plusieurs timbres d'hommage pendant la seconde moitié des [[années 1940]]. L'un d'eux représente Roosevelt devant sa collection de [[timbre postal|timbres-poste]]. Or, ce timbre comporte une [[timbre erroné|erreur]] : la main qui tient les [[brucelles]] a été dessinée dotée de six doigts.
Le réservoir situé derrière le [[barrage Grand Coulee]] dans l'[[état de Washington|état américain de Washington]] est appelé « lac Franklin Delano Roosevelt », qui présida à l'achèvement de l'ouvrage.
Roosevelt est un des dirigeants de la civilisation américaine dans le jeu [[Civilization IV]] avec George Washington.
== Bibliographie ==
* ''Sur la bonne voie'' (On our way). [Par] Franklin D. Roosevelt, Président des États-Unis. Traduit de l’anglais par Pierre Dutray. – Paris, Denoël et Steele, 1934. In-8° (20,5 cm), 261 p.[Biblioth. historique, CHEFF : 8° 9499]
* ''Regards en avant'' (Lookink forward). [Par] F. D. Roosevelt, Président des États-Unis. Traduit de l’anglais par Henri de Maublanc ; préface de Marcel Chaminade. – Paris, Denoël et Steele, 1933. In-8° (19,5 cm), 250 p. [Biblioth. historique, CHEFF : 8° 8479]
=== Ouvrages en langue française ===
* [[Raoul Aglion]], ''De Gaulle et Roosevelt'', Paris, La Bruyere, [[1998]], ASIN 2840143054
* [[Denise Artaud]], ''L'Amérique en crise. Roosevelt et le New Deal'', Paris, Armand Colin, 1987, {{ISBN|2200371160}}
* [[Michal Bernard]], ''Roosevelt, du New Deal à Yalta'', [[Genève]], Famot, [[1974]], ISBN B0000DP37R
* [[André Béziat]], ''Franklin Roosevelt et la France (1939-1945): La diplomatie et l'entêtement'', Paris, L'Harmattan, [[2000]], {{ISBN|2738460704}}
* [[Sabine Forero-Mendoza]], ''Franklin Roosevelt'', Paris, Hatier, [[2002]], ASIN 2218736527
* [[André Kaspi]], ''Franklin Roosevelt'', Paris, Fayard, [[1994]], {{ISBN|2213022038}}
* [[Einaudi Mario]], ''Roosevelt et la révolution du New Deal'', Paris, Armand Colin, [[1961]], ISBN B0000DNHBL
* [[Alan Posener]], ''Franklin Delano Roosevelt'', Rowohlt Taschenbuch Verla, [[1999]], ASIN 3499505894
=== Biographies en anglais ===
* [[Roy Jenkins]], [[Arthur M. Schlesinger]], ''Franklin Delano Roosevelt'', Times Books, 2003
* [[Frank Freidel]], ''Franklin D. Roosevelt : A Rendezvous with Destiny'', Back Bay Books, 1991, {{ISBN|0316292613}}
* [[Conrad Black]], ''Franklin Delano Roosevelt: Champion Of Freedom'', {{ISBN|1586482823}}
* [[Brenda Haugen]], ''Franklin Delano Roosevelt: The New Deal President'', Compass Point Books, 2006, {{ISBN|0756515866}}
== Voir aussi ==
=== Notes ===
{{Références | colonnes=2}}
===Articles connexes===
* [[Franklin D. Roosevelt (métro de Paris)]]
===Liens externes===
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}}
* {{fr}} [http://www.junobeach.org/f/3/can-pep-usa-roosevelt-f.htm Biographie sur le site de Juno Beach]
* {{en}} [http://www.whitehouse.gov/history/presidents/fr32.html Biographie sur le site de la Maison Blanche]
* {{en}} [http://www.fdrlibrary.marist.edu/fdrbio.html Biographie sur le site de la bibliothèque présidentielle de Roosevelt]
* {{en}} [http://americanhistory.about.com/od/franklinroosevelt/p/pfdroosevelt.htm American History]
* {{en}} [http://www.acitytour.com/washingtondc/galerie-7.html Photos du Franklin D. Roosevelt Memorial à Washington DC]
* {{en}} [http://www.archive.org/search.php?query=mediatype%3Aaudio%20AND%20collection%3Apresidential_recordings%20AND%20%2Fmetadata%2Fsubject%3A%22Franklin%20D.%20Roosevelt%22 Archives audios] (discours et conférences)
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