Louis Soutter 640915 30833521 2008-06-20T20:09:48Z Albins 62972 {{serie_peinture}} '''Louis Soutter''' est un [[artiste]] de nationalité [[suisse]], né à [[Morges]], près de Lausanne, le {{date|4|juin|1871}}, décédé à [[Ballaigues]], près de [[Vallorbe]], le {{date|20|février|1942}}. Par sa mère, Marie-Cécile Jeanneret-Piquet, il était parent de [[Le Corbusier]], tous deux étaient cousins issus de germains. == Biographie == Son père était pharmacien ; sa mère, musicienne, professeur de chant à l'École supérieure de jeunes filles de Morges, était une forte personnalité, aimant organiser des concerts dans leur maison et se produisant à ces occasions ; son frère aîné et sa soeur cadette étaient également musiciens. Le jeune Louis Soutter, élève brillant, était un garçon plutôt solitaire, de nature inquiète, rêveur, peut-être sujet à la dépression. Il commença des études d'ingénieur à l'Université de Lausanne, les interrompit pour étudier l'architecture à Genève, chez l'architecte [[L. Viollier]], puis chez un architecte de Morges. Sans doute l'importance de la musique chez ses parents, les concerts donnés dans leur maison furent-ils déterminants pour lui. En 1892, il choisit d'entamer une carrière musicale, il partit pour [[Bruxelles]] et devint l'élève du violoniste [[Eugène Ysaye]], au [[Conservatoire royal de Bruxelles]]. C'était, à Bruxelles, l'époque de l'[[Art nouveau]], du [[Groupe des XX]] dans la musique, dont Isaye était proche, celle du [[Symbolisme (art)|Symbolisme]] dans la littérature, la poésie, la philosophie, le théâtre, surtout dans les arts plastiques : la peinture symboliste était l'expression du monde intérieur, subjectif, elle s'adressait à l'esprit, à l'imagination, s'inspirait des [[mythologie]]s européennes, des légendes, des contes de fées, de la ''[[Bible]]'', elle opposait le vice à la vertu, se délectait de l'imaginaire, de l'au-delà, du mysticisme, de la mort. La Femme était perçue comme un être fascinant et mystérieux, pour certains hiératique, guerrière, vertueuse, idéalisée, pour d'autres dominatrice et s'adonnant à la luxure (par exemple la ''Pornocratès'' de [[Félicien Rops]]), perverse ([[Fernand Khnopff]] opposait néanmoins à cette perversité féminine la vertu et l'effacement de sa sœur), cruelle, d'une beauté fatale qui entraînait les hommes à leur perte et à la mort. Ce fut en 1893 que parut ''[[Salomé]]'' d'[[Oscar Wilde]], dans sa version originale française, dont la jeune héroïne, qui ordonna la décapitation de [[Iokanaan]] ([[saint Jean-Baptiste]]) fut immédiatement assimilée à une très jeune fille d'autant plus perverse et dangereuse qu'il était inconcevable qu'une adolescente le soit. Ce fut cet univers artistique, riche, effervescent, stimulant, que le jeune Louis Soutter découvrit à Bruxelles, et dans lequel il fut plongé. C'est à Bruxelles, en 1894, à Bruxelles, qu'il fit la connaissance d'une jeune Américaine, [[Madge Fursman]], élève d'Eugène Ysaye, excellente chanteuse également, qui deviendra sa femme. En 1895, Louis Soutter interrompit ses études musicales et s'installa à Lausanne pour y suivre les cours de dessin et de peinture, puis à Genève, dans l'atelier de [[Léon Gaud]]; à la fin de la même année, il s'établit à [[Paris]], afin de poursuivre ses études dans l'atelier de [[Jean-Paul Laurens]], de [[Jean-Joseph Benjamin-Constant]], à l'[[Académie Colarossi]]. De chacun de ces peintres Louis Soutter reçut un enseignement traditionaliste, académiste, en Suisse, peintures de la montagne, scènes rustiques, à Paris, grandes reconstitutions dramatiques, scènes de harem ou glorification du colonialisme. À Paris, il devint l'ami du céramiste américain, [[Artus van Briggle]], l'un des représentants de l'Art nouveau. Fiancé à Madge Fursman, il quitta l'Europe à la fin de l'année 1896, pour les [[États-Unis]]. Il songea à s'établir à [[Chicago]], y resta trois mois, puis il partit s'établir à [[Colorado Springs]], [[Colorado]], au pied des [[Montagnes Rocheuses]], ville en pleine expansion où vivaient les parents de Madge. Après son mariage avec Madge, en 1897, il devint le professeur de dessin et de peinture très apprécié de ses élèves, puis directeur du département des beaux-arts du [[Colorado College]]. Il y a peu de témoignages sur Louis Soutter et Madge, sur leur couple, sur leur vie sociale. Pendant les huit années que dura leur mariage, il fit plusieurs voyages en Europe, toujours seul. En 1903, Madge, sans doute très ambitieuse, ne supportant pas le caractère rêveur et hypersensible de son mari, demanda le divorce aux torts de Louis Soutter. Celui-ci quitta définitivement les États-Unis en 1903 dans un état de grande détresse morale. Après son retour en Suisse, il parla très peu de Madge; il confia toutefois: « Ma femme était autoritaire, elle se servait de moi comme d'une machine à gagner de l'argent, et me rendait dépressif », « Elle m'exploitait: elle me faisait travailler le jour, puis participer ensuite à de longues soirées mondaines ». En 1906, son oncle, le Dr Jeanneret, le poussa à soigner sa santé physique et sa dépression, et grâce à lui, Louis Soutter fit un séjour d'une année dans la Clinique Sonnenfels, à Spiez (Berne). Son état s'étant amélioré, il put, en 1907, envisager une carrière de violoniste. Il entra dans l'Orchestre du Théâtre de Genève (qui deviendra l'[[Orchestre de la Suisse romande]]), mais son état rêveur et nerveux ne lui permit pas de se plier à la discipline de l'orchestre. Il fut engagé par l'Orchestre symphonique de Lausanne, puis par l'Orchestre de Genève, qu'il fut obligé de quitter en 1915. Après cela, il ne trouva de travail que dans les petits orchestres de stations touristiques. Excentrique, dépressif, ayant gardé de sa vie aux États-Unis le goût du luxe, des vêtements élégants et des beaux objets, gagnant peu, il faisait payer ses achats par sa famille; celle-ci, lassée, finit par le mettre sous la tutelle des autorités municipales de Morges, lesquelles autorités le mirent en pension contre son gré à l'Asile du Jura, à Ballaigues (Vaud), institution destinée à accueillir les vieillards sans revenus et incapables de subvenir à leurs besoins; il avait 52 ans, il y resta jusqu'à sa mort. Il y fut très malheureux, souffrant de promiscuité avec des vieillards indigents et incultes, ainsi que du traitement dégradant auquel il était parfois soumis. Il aimait la nature, il était bon marcheur, il trouva du réconfort à l'observer au cours de longues randonnées solitaires dans la campagne. Il se consacrait au violon lorsqu'il le pouvait, et au dessin qu'il n'avait sans doute jamais abandonné, dont il ne restait cependant que peu de témoignages. Par manque d'argent, il dessinait au crayon et à la plume dans des cahiers d'écolier (des esquisses, des dessins si peu conformes au bon goût traditionnel de l'époque qu'on les utilisait souvent pour allumer les poêles de la maison). C'est là sa période dite « des cahiers » (1923-1930). Grâce à son cousin [[Le Corbusier]] qui s'intéressait à son œuvre, à l'écrivain [[Jean Giono]], à des artistes célèbres en Suisse, tels que [[René Auberjonois]] et [[Marcel Poncet]], et à des amis, il acquit une petite notoriété. Il exécuta alors des dessins à l'encre, plus grands, plus élaborés, plus fouillés, c'est sa période dite « maniériste » (1930-1937). La première exposition de son oeuvre eut lieu en 1936, aux États-Unis, grâce aux démarches de Le Corbusier. Sa vue baissant, l'arthrose ayant atteint ses mains, il ne pouvait plus tenir un crayon ou une plume. Pour continuer à créer, il trempait ses doigts dans l'encrier ou la peinture. Il s'agit de sa période dite « peinture au doigt » (1937-1942). Il décéda à Ballaigues le [[20 février]] [[1942]], à 71 ans. == Œuvre == Louis Soutter est l'un des plus grands artistes suisses du XXe siècle. Son œuvre est immense, elle comprend des milliers de dessins et des peintures, dont la plupart ont disparu. Le critique d'art [[Michel Thévoz]] a répertorié environ 2850 dessins et quelques peintures. Il est, peut-être à tort, considéré comme faisant partie de l'[[Art Brut]]. [[Jean Dubuffet]] se posa en effet la question de savoir s'il devait le considérer comme appartenant à cette forme d'expression qu'il venait de définir. Certains, aujourd'hui, le pensent, d'autres pas. Dubuffet, lorsqu'il définit sa notion de l'Art Brut, avait englobé dans cette forme d'expression les artistes refusant d'entrer dans le système économique, dans la mercantilisation de l'art par l'intermédiaire des galeries, des musées, des critiques d'art, les artistes solitaires rejetant tout courant artistique, les prisonniers, et par extension, les malades, les enfants, les malades mentaux et tous ceux créant sans avoir jamais eu de formation artistique. Aujourd'hui, les avis sont partagés. Certains mettent Louis Soutter dans l'Art Brut, dont les créateurs, en effet sans culture artistique et s'exprimant de façon spontanée et inventive, sont souvent des malades mentaux, que le grand public associe en général aux seuls malades mentaux, tels que [[Adolf Wölfli]] et [[Aloïse Corbaz]]. D'autres considèrent que Louis Soutter est un grand artiste qui ne fut pas aidé par sa famille dans sa détresse et sa dépression, qui fut rejeté par la société bourgeoise et bien-pensante de la Suisse où il était né, qui put, malgré son quasi-enfermement, à 52 ans, à Ballaigues, rompre avec l'[[Académisme]] qui lui avait été enseigné, bouleverser ce qu'il avait appris et enseigné à Colorado Springs, et inventer une expression personnelle. Sorte d'électron libre, il créa une œuvre artistique libérée de toute influence, profondément humaine, pénétrée par le désir de la beauté, la peur de la laideur, d'abord une observation naïve ou sarcastique de la vie, dans laquelle il introduisait la nature et le monde qui l'entouraient, puis une vision mêlant en plus une architecture fantastique, des personnages de romans, des thèmes bibliques, dantesques, des souvenirs de sa vie passée, enfin des êtres humains, toujours plus nus, angoissés et déchirés. Louis Soutter, dans son œuvre, a donné une place très importante à la Femme, un être féminin à deux visages, représenté au début dans sa sensualité, sa plénitude et sa générosité, puis, le temps passant pour l'artiste, une beauté dangereuse, fatale, persécutrice, progressivement enlaidie par une haine incompréhensible, d'une laideur terrifiante à la fin — quatorze ans de création d'une extrême richesse malgré la simplicité des moyens techniques qu'il avait gardés, le crayon, la plume et l'encre. Lorsqu'il eut presque perdu la vue, il « dessina » avec la peinture et le doigt. === Période 1903-1923 === === Période des « cahiers », 1923-1930 === === Période « maniériste », 1930-1937 === === Période de la « peinture au doigt », 1937-1942 === == Bibliographie == * Ernest Manganel, René Berger, René Auberjonois, Le Corbusier, ''Soutter'', Éditions H. L. Mermod, Lausanne, 1961 * Jean Dubuffet, ''Asphyxiante culture'', Jean-Jacques Pauvert éditeur, 1968 * Michel Thévoz, ''Louis Soutter'', Éditions Rencontre, Lausanne, 1970 * Le Corbusier, Ernest Manganel, ''Louis Soutter, 30 Dessins des « Cahiers »'', catalogue, Galerie L'Entracte, Lausanne, 1972 * ''Louis Soutter'', catalogue, rétrospective au Musée cantonal des Beaux-Arts, Lausanne, 1974 * Michel Thévoz, ''Louis Soutter ou l'écriture du désir'', Éditions L'Âge d'Homme, Lausanne, coll. Catalogues raisonnés d'artistes suisse 4/I de l'Institut suisse pour l'étude l'art, Zürich, 1974 * Jean-Baptiste Mauroux, Georges Haldas, ''Louis Soutter, peintre visionnaire et proscrit'', Éditions Adversaires, Genève, 1975 * Michel Thévoz, ''Louis Soutter, Catalogue de l'œuvre'', Éditions L'Âge d'Homme, Lausanne, coll. Catalogues raisonnés d'artistes suisse 4/II de l'Institut suisse pour l'étude l'art, Zürich, 1974 * Mario De Micheli, Viana Conti, Hermann Hesse (textes parus in ''Neue Zürcher Zeitung'', Zürich, 1961), ''Louis Soutter (1871-1942)'', catalogue, Edizioni Galleria Matasci Tenero (Suisse), 1987 * Annette Ferrari, André Kuenzi, ''Louis Soutter'', catalogue, Fondation Pierre Gianadda, Martigny, 1990 * Hervé Gauville, Valère Novarina, ''Louis Soutter, Si le soleil me revenait'', catalogue, Centre Culturel Suisse à Paris et Société Nouvelle Adam Biro, Paris, 1997 * Jörg Zutter, Friehelm Mennekes / Arnulf Rainer, Jean Dubuffet, ''Louis Soutter, Fingermalerein 1937-42'', catalogue, Galerie Karsten Greve, Köln, 1998 * Hartwig Fischer, Pierre Estoppey, Michel Thévoz, Le Corbusier, Lucienne Peiry, René Auberjonois, Heinz Holliger, Jean Dubuffet, Jean Giono, Jean Starobinsky, Paul Nizon, ''Louis Soutter 1971-1942'', catalogue, Kunstmuseum Basel, Musée cantonal des Beaux-Arts et Collection de l'Art Brut, Lausanne, Hatje Cantz Verlag, Ostfildern-Ruit (Allemagne), 2002 * Michel Thévoz, Anne-Marie Simond, ''Louis Soutter, Crayon, plume & encre de Chine'', Éditions du Héron, Lausanne, 2002 == Liens externes == * [http://www.jcbourdais.net/journal/03mai05.php ''Journal'', Jean Claude Bourdais] * [http://www.editions-du-heron.com/2_parutions_bx_livres_soutter_coffret_couverture.htm#hautsoutteretui ''Louis Soutter, Crayon, plume & encre de Chine'', Éditions du Héron, Lausanne, 2002] {{Portail|histoire de l'art|peinture|Suisse}} {{DEFAULTSORT:Soutter, Louis}} [[Catégorie:Peintre suisse]] [[Catégorie:Artiste suisse]] [[Catégorie:Naissance en 1871]] [[Catégorie:Décès en 1942]] [[Catégorie:Personnalité vaudoise]] [[Catégorie:Art brut]] [[pms:Louis Soutter]] [[ru: Сутер, Луи]]