Michel Debré 15801 31831709 2008-07-23T20:26:51Z Jacques Ghémard 42284 /* Chronologies */ Personnalité de la France libre (Carte d'identité F.F.L. n° 23.269) {{Voir famille|Famille Debré}} {{Infobox Premier ministre de la France| image= | légende= | nom=Michel Debré | numéro=1 | parti= [[Union pour la nouvelle République|UNR]] | nomination=[[8 janvier]] [[1959]] | nommé par=[[Charles de Gaulle]] | mandat1=du [[8 janvier]] [[1959]] <br/>au [[14 avril]] [[1962]] | prédécesseur=[[Charles de Gaulle]] ([[président du Conseil]] | successeur=[[Georges Pompidou]] | fonction1=<small>Ancien maire d'Amboise, ancien sénateur et conseiller général d'[[Indre-et-Loire]] | fonction2=Ancien député de [[la Réunion]] | fonction3=[[Académicien]] (1988-1996)</small> | gouvernement(s)=[[Gouvernement Michel Debré]] | naissance=[[15 janvier]] [[1912]] | lieu naissance=[[Paris]] | décès=[[2 août]] [[1996]] | lieu décès=[[Montlouis-sur-Loire]], [[Indre-et-Loire]] | nature=[[Maladie de Parkinson]]| }} '''Michel Debré''', né à [[Paris]] le [[15 janvier]] [[1912]] et mort à [[Montlouis-sur-Loire]] le [[2 août]] [[1996]], était un [[Personnalité politique|homme politique]] [[France|français]] [[Gaullisme|gaulliste]]. Il fut le premier [[Premier ministre de France|Premier ministre]] de la [[Cinquième République]], dont il contribua à rédiger la [[Constitution de 1958|constitution]]. == Biographie == === Jeunesse, formation et débuts en politique === Michel Debré est le fils du professeur [[Robert Debré]], considéré comme le fondateur de la [[pédiatrie]] moderne. Petit-fils du rabbin Simon Debré, 1854-1939, il est sans doute le membre le plus éminent de la [[famille Debré]], une famille qui a donné à son pays plusieurs grands hommes, notamment des [[médecin]]s. Avec son épouse Anne-Marie, née Lemaresquier, Michel a lui-même quatre fils : * [[Vincent Debré]], né en [[1939]], directeur de sociétés. * [[François Debré]], né en [[1942]], journaliste. * [[Bernard Debré]], né en [[1944]], médecin [[Urologie|urologue]] et [[Personnalité politique|homme politique]], aujourd'hui député de [[Paris]]. * [[Jean-Louis Debré]], faux jumeau de Bernard, également homme politique, aujourd'hui président du [[Conseil constitutionnel (France)|Conseil constitutionnel]], et auparavant président de l'assemblée nationale. Michel Debré étudie à Paris au [[lycée Montaigne]], puis au [[lycée Louis-le-Grand]], obtient le diplôme de l'[[École libre des sciences politiques]] et devient docteur en [[droit]] à l'[[université de Paris]], et intègre également l'[[École nationale d'équitation]], à [[Saumur]]. Il est reçu à vingt-deux ans au concours de l'Auditorat au [[Conseil d'État (France)|Conseil d'État]]. Mobilisé en [[1939]] comme officier de cavalerie, il est fait prisonnier à [[Artenay]] en juin 1940 mais parvient à s'évader en septembre de cette année. Il rentre alors au Conseil d'État et se montre favorable au général [[Maxime Weygand]]. D'avril à octobre 1941, il est chargé de mission à la résidence général du [[Maroc]]. Il retourne de nouveau au Conseil, prête serment au maréchal [[Philippe Pétain]] et est promu en 1942 maître des requêtes par [[Joseph Barthélémy]], ministre de la Justice du [[régime de Vichy]]. Après l'invasion de la [[zone libre]], en novembre 1942, son maréchalisme disparaît. En février 1943, il s'engage dans la [[Résistance intérieure française|Résistance]], adhérant au réseau [[Ceux de la Résistance]] (CDLR). Pendant l'été 1943, il est chargé par le [[Charles de Gaulle|général de Gaulle]] d'établir la liste des [[Préfet français|préfets]] qui remplaceront ceux du [[régime de Vichy]] pour le jour de la [[Libération (histoire)|Libération]]. Il devient lui-même [[commissaire de la République]] à [[Angers]] en août [[1944]]. En [[1945]], de Gaulle le charge auprès du [[Gouvernement provisoire de la République française|Gouvernement provisoire]] d'une Mission de la réforme de la [[Fonction publique française|fonction publique]], dans le cadre de laquelle il crée l'[[École nationale d'administration (France)|École nationale d'administration]], dont l'idée avait été formulée par [[Jean Zay]] avant-guerre. Sous la [[Quatrième République]], Michel Debré adhère tout d'abord à l'[[Union démocratique et socialiste de la Résistance|UDSR]], puis au [[Parti républicain, radical et radical-socialiste|Parti radical-socialiste]] sur les conseils du [[Charles de Gaulle|général de Gaulle]] (''Allez au Parti radical, Debré. Vous y trouverez les derniers vestiges du sens de l'État''). Il rejoint ensuite le [[Rassemblement du peuple français]]. Il est sénateur d'[[Indre-et-Loire]], de 1948 à 1958. En 1957, il fonde ''[[Le Courrier de la colère]]'', journal défendant violemment l'Algérie française et appelant au retour du général de Gaulle au pouvoir. Debré écrit dans l'édition du 2 décembre 1957 : « Que les Algériens sachent bien que l'abandon de la souveraineté française en Algérie est un acte illégitime qui met ceux qui le commettent, ou s'en rendent complices, hors-la-loi et ceux qui s'y opposent, quel que soit le moyen employé, en état de légitime défense. » Cet appel explicite à l'insurrection a conduit ''a posteriori'' le socialiste [[Alain Savary]] à considérer que « Dans l'affaire de l'[[Organisation armée secrète|OAS]], les militaires ne sont pas les coupables, le coupable, c'est Debré. » [http://www.historia.presse.fr/data/thematique//76/07601601.html] ===[[Gouvernement Michel Debré|Son gouvernement]]=== Il devient Garde des Sceaux en [[1958]], dans le cabinet du général de Gaulle. Il y joue un rôle important dans la rédaction de la [[Constitution]] de la [[Cinquième République]]. Celle-ci acceptée, il inaugure la nouvelle fonction de [[Premier ministre de France|Premier ministre]] qu'elle prévoit, de [[1959]] à [[1962]]. Après le référendum du 14 avril 1962 approuvant les accords d’Évian, de Gaulle le remplace par Georges Pompidou. En novembre, à l’occasion des élections législatives qui ont suivi la dissolution de l’Assemblée Nationale, il tente de se faire élire député en [[Indre-et-Loire]]. Battu, il décide en mars [[1963]] de se présenter à nouveau à [[la Réunion]], une île qu'il a découverte avec le Président lors d'un voyage de moins de vingt-quatre heures le [[10 juillet]] [[1959]]. Ce choix surprenant s'explique par sa crainte de voir ce qui reste de l'empire colonial français suivre la voie empruntée par l'[[Algérie]], une indépendance dont il ne se console pas. Ainsi, Michel Debré prend acte de la fondation par [[Paul Vergès]] quelques années auparavant du [[Parti communiste réunionnais]], un mouvement qui réclame l'[[Autodétermination|autonomie]] de l'île et la suppression du statut de [[Département d'outre-mer|DOM]] et qui a organisé quelques jours auparavant de grandes [[manifestation]]s dans l'île. Il note par ailleurs que l'invalidation de l'élection du maire de [[Saint-Denis (Réunion)|Saint-Denis]] Gabriel Macé rend son poste accessible à l'opposition. Il prend la décision de briguer ce mandat. ===Sa politique réunionnaise=== Arrivé dans l'île en [[avril]], Michel Debré est élu député de la [[première circonscription de la Réunion]] le [[6 mai]] malgré l'opposition que suscite localement la mesure frappant les [[fonctionnaire]]s d'[[Outre-mer français|outre-mer]] qu'il a prise en [[1960]], l'[[ordonnance Debré]]. Soutenu par les [[socialiste]]s que l'autonomie rebute, il devient immédiatement le leader de la droite locale. Cet état de fait ne sera contesté par [[Pierre Lagourgue]] que durant la décennie suivante, mais Michel Debré est néanmoins élu au [[conseil régional de La Réunion]] pendant cette période<ref>« ''[http://www.regionreunion.com/fr/spip/IMG/pdf/20ans-2.pdf Catalogue]'' », [[Conseil régional de La Réunion|Région Réunion]], [[2003]].</ref>. Pour justifier la départementalisation de l'île survenue en [[1946]] et préserver ses habitants de la tentation indépendantiste, il met en œuvre une politique de [[Développement économique|développement]] axée sur la gestion de l'urgence [[Démographie|démographique]] et de la misère qu'elle engendre dans laquelle les observateurs ont reconnu l'attention accordée par son père [[Robert Debré|Robert]] aux questions sociales. Il fait ouvrir dans l'île le premier [[planning familial|centre d'orientation familiale]]. Il procède par ailleurs à la création de nombreuses cantines scolaires où il fait distribuer gratuitement du [[lait en poudre]] aux enfants, le ''lait Debré''. Il lutte personnellement pour obtenir de Paris la création d'un second [[Lycée en France|lycée]] dans le sud de l'île, au [[Le Tampon|Tampon]] : il n'y en alors qu'un seul à Saint-Denis pour plusieurs centaines de milliers d'habitants, le [[lycée Leconte-de-Lisle]]. Il développe également le [[Service militaire adapté]] créé par [[Pierre Messmer]]. Considérant que la démographie de l'île est une menace pour son développement, Michel Debré organise durant les [[années 1960]] la migration des Réunionnais vers la métropole. Il crée pour ce faire le [[BUMIDOM]] et le [[CNARM]]. Dans le même état d'esprit, il fait procéder au déplacement vers l'Hexagone de plus de 1 600 enfants réunionnais (entre 1963 et 1982) arrachés à leur famille en vue de repeupler certains départements métropolitains en cours de désertification, notamment la [[Creuse (département)|Creuse]] <ref name=Enfants> [http://reunion.rfo.fr/article1441.html Livre: Enfants Réunionnais en Exil], [[RFO]], 25 octobre 2007 </ref>. Au professeur Denoix qui s'insurgeait de ces pratiques, il répondit dans une lettre : « ''L'entreprise doit être poursuivie avec d'autant plus de constance qu'elle peut être combinée avec un admirable mouvement d'adoption que nous n'arrivons pas toujours à satisfaire.'' » Le 30 janvier 2002, Jean-Jacques Martial, un Réunionnais exilé en 1966, dépose plainte pour « enlèvement et séquestration de mineur, rafle et déportation » <ref name=Enfants/>. On lui reproche également d'avoir étouffé la [[Culture de la Réunion|culture réunionnaise]], notamment le [[maloya]]. Genre musical inspiré des pratiques des [[esclave]]s, il présentait en effet un profil désavantageux aux yeux de l'élu dans la mesure où il suscitait des sympathies autonomistes. ===Son retour sur la scène nationale=== Son engagement réunionnais n'empêche pas Michel Debré de se voir confier de nouveaux postes. Il hésite ainsi à se présenter en [[Alsace]] en [[1968]]. Il accepte surtout plusieurs portefeuilles ministériels, à commencer par celui de l'Économie et des finances. Il sera également aux Affaires étrangères puis à la Défense au début des [[années 1970]]. Bientôt, cependant, l'arrivée de [[Valéry Giscard d'Estaing]] à l'Élysée le rend moins indispensable. Candidat à l'[[Élection présidentielle française de 1981|élection présidentielle de 1981]], il ne recueille que 1,66 % des voix. Le [[24 mars]] [[1988]], il est élu au [[Liste des académiciens par fauteuil#Fauteuil 1|premier fauteuil]] de l'[[Académie française]], succédant au prince [[Louis de Broglie]] mort le [[19 mars]] [[1987]]. Sa réception officielle eut lieu le [[19 janvier]] [[1989]]. Après sa disparition, il fut remplacé, le [[20 mars]] [[1997]], par [[François Furet]], mort avant d'avoir pu siéger sous la Coupole, puis, le [[18 juin]] [[1998]], par [[René Rémond]]. Atteint de la [[maladie de Parkinson]] durant les dernières années de sa vie, il meurt le [[2 août]] [[1996]]. Il est enterré au cimetière d'[[Amboise]], commune dont il a été maire de [[1966]] à [[1989]]. === Décorations et hommages === * [[Légion d'honneur|Commandeur de la Légion d'honneur]] * [[Croix de guerre 1939-1945|Croix de Guerre 1939-1945]] * [[Médaille de la Résistance|Médaille de la Résistance avec rosette]] * Médaille de la France libre On trouve sur une place du chef-lieu de [[la Réunion]] surplombant la [[Rivière Saint-Denis]] une arche encadrant un portail ouvert sur laquelle est inscrite en son honneur une définition que Michel Debré avait faite de lui-même : {{citation|Créole un jour, créole toujours.}} Une [[Place (voie)|place]] a été inaugurée en son nom le [[9 juillet]] [[2006]] dans le [[6e arrondissement de Paris|6{{e}} arrondissement]] de [[Paris]]. [http://www.elysee.fr/elysee/elysee.fr/francais/actualites/deplacements_en_france/2006/juillet/inauguration_de_la_place_michel_debre.54905.html] ==Carrière politique== {{Infobox parlementaire français | nom=Michel Debré | photo= | naissance=[[15 janvier]] [[1912]] | décès=[[2 août]] [[1996]] | mandat=Sénateur [[1948]]-[[1958]]<br />Député [[1963]]-[[1988]] | début du mandat=1948 | circonscription=[[Indre-et-Loire]]<br />[[La Réunion|Réunion]] | groupe parlementaire=[[Gauche démocratique (France)|GD]] ([[1948]]-[[1958]])<br />[[Union pour la nouvelle République|UNR-UDT]] ([[1962]]-[[1967]])<br />[[Union pour la nouvelle République|UDVe]] ([[1967]]-[[1968]])<br />[[Union des démocrates pour la République|UDR]] ([[1968]]-[[1978]])<br />[[Rassemblement pour la République|RPR]] ([[1978]]-[[1988]]) | république=[[IVème République]]-[[Vème République]] }} ===Ses mandats électifs=== * Sénateur d'[[Indre-et-Loire]] de [[1948]] à [[1958]]. * Conseiller général d'[[Indre-et-Loire]] de [[1951]] à [[1970]]. * Conseiller municipal d'[[Amboise]] de [[1959]] à [[1966]]. * Député de [[la Réunion]] de [[1963]] à [[1988]]. * Maire d'[[Amboise]] de [[1966]] à [[1989]]. * Conseiller général d'[[Indre-et-Loire]] de [[1976]] à [[1992]]. * Député européen de [[1979]] à [[1980]]. ===Ses fonctions gouvernementales=== * Garde des Sceaux et Ministre de la Justice en [[1958]] et [[1959]]. * Premier ministre de [[1959]] à [[1962]]. * Ministre de l'Économie et des Finances du [[8 janvier]] [[1966]] à [[1968]]. * Ministre des Affaires étrangères en [[1968]] et [[1969]]. * Ministre de la Défense nationale en [[1969]] et [[1973]]. == Identité politique == === Patriote et souverainiste === Michel Debré est [[Patriotisme|patriote]] au sens où il place au-dessus de tout son attachement à la {{citation|France éternelle}}, la [[Patrie]], la [[Nation]] (il emploie les majuscules), dans une perspective très proche de celle de [[Charles de Gaulle|de Gaulle]]. Sa réflexion constitutionnelle vise à trouver le meilleur régime pour le peuple français, jusqu'à envisager, fût-ce rhétoriquement, l'hypothèse d'une restauration [[Monarchie|monarchique]]. Mais ce patriotisme s'accompagne d'un [[républicanisme]] également fervent : produit de l'enseignement républicain, Debré met sur le même plan aux fondements de sa pensée la nation et la république, celle-ci étant l'aboutissement et la réalisation de toutes les potentialités de celle-là. La différence avec de Gaulle est ici notamment générationnelle : vingt-deux ans les séparent, et Debré n'a jamais vécu une phase d'imprégnation [[Nationalisme|nationaliste]] comme de Gaulle dans les [[années 1900]]. Généralement considéré, non sans quelque raison, comme « [[Jacobinisme|jacobin]] », il montre une grande méfiance vis-à-vis des collectivités locales et de la [[décentralisation]], dans laquelle il voit la renaissance des anciennes provinces et la mise en péril de l'unité de l’État. À la [[Libération (histoire)|Libération]], voulant supprimer les [[Région française|régions]] créées par le [[régime de Vichy]] tout en modernisant la vieille organisation [[Département français|départementale]], il propose une refonte de l'[[administration territoriale de la France]] en quarante-sept départements issus de fusions ou de réarrangements. En [[1969]], il sera très critique vis-à-vis du [[Référendum sur la réforme du Sénat et la régionalisation|projet de régionalisation]], bien qu'il appellât à voter « Oui » par fidélité à de Gaulle. Il refuse en [[1982]] les [[Lois de décentralisation de 1982|lois de décentralisation]]. Qualifier Michel Debré de « [[Souverainisme|souverainiste]] » serait un anachronisme, mais le terme permet de montrer dans quelle famille politique se situeraient aujourd'hui ses idées. Il consacre dans ses mémoires de longs passages à la [[Histoire de l'Union européenne|construction européenne]], appelée la {{citation|supranationalité}}, qu'il rejette absolument dès lors qu'elle met en cause la [[souveraineté]] de la [[nation]] française. Il condamne en ces termes un amendement du Comité consultatif constitutionnel établissant la supériorité automatique des traités internationaux sur le droit interne:<ref>''Trois républiques pour une France. Mémoires'', tome 2 ''Agir (1946–1958)'', [[Albin Michel]], Paris, 1988, p. 384</ref> {{début citation}}À la ruse des supranationaux s’ajoute l'irréalisme de certains professeurs qui, avec leur théorie sur la hiérarchie des sources de droit, outre qu'ils se placent hors la tradition des légistes de France et qu'ils négligent le problème essentiel de la légitimité du pouvoir, manifestent une incompréhension totale du monde tel qu'il est. […] Ma colère éclate contre ces notables si peu au fait de l'histoire, des réalités du présent, des exigences de demain – bref, si peu conscients de la France éternelle.{{fin citation}} Debré est ainsi dans les [[années 1950]] un adversaire farouche du projet de [[Communauté européenne de défense]], qu'il contribue par ses discours au [[Conseil de la République]] à faire échouer. Il se réjouit également de la prise de distance de de Gaulle avec la [[Euratom|Communauté européenne de l'énergie atomique]] au profit de la bombe nucléaire française. Il s'opposera encore clairement, encore qu'avec un moindre écho et sans succès, à l'élection au [[suffrage universel]] du [[Parlement européen]], au motif qu'il ne reçoit et ne devrait recevoir aucune délégation de souveraineté. Il condamne à plusieurs reprises la primauté du [[droit communautaire]] comme une absurdité, voire comme une manifestation de {{citation|l'esprit vichyssois qui accepte que la France soit commandée par l'étranger}}.<ref>''Trois républiques pour une France. Mémoires'', tome 2 ''Agir (1946–1958)'', Albin Michel, Paris, 1988, p. 385</ref> === Gaulliste === Toute la carrière politique de Michel Debré est placée sous le signe de la fidélité au général [[Charles de Gaulle|de Gaulle]], qu'il rejoint à [[Londres]] en [[1943]] ; il est véritablement un « compagnon », pour reprendre le terme utilisé jusqu'aux [[années 1990]] pour désigner les membres du parti gaulliste. Il participe à la création du [[Rassemblement du peuple français]] (RPF), fait entendre la voix des [[Gaullisme|gaullistes]] au [[Conseil de la République]] entre [[1948]] et [[1958]] en tant que président du groupe des Républicains sociaux, et passe l'essentiel de la [[Quatrième République]] à demander le rappel du Général aux affaires. Pour la rédaction de la [[constitution de 1958]], il s'inspire directement du [[discours de Bayeux]], dans lequel de Gaulle a {{citation|magnifiquement décrit la Constitution telle qu'il l'estimait nécessaire au bien de la France}}:<ref>''Trois républiques pour une France. Mémoires'', tome 2 ''Agir (1946–1958)'', Albin Michel, Paris, 1988, p. 350</ref> [[parlement]] [[bicamérisme|bicaméral]] avec une chambre basse représentant les électeurs et une chambre haute la tempérant et représentant la {{citation|vie locale}} et les {{citation|grandes activités du pays}} ; prééminence du [[gouvernement]] dans l'élaboration de la [[loi]] ; renforcement des pouvoirs du [[Président de la République française|Président de la République]], {{citation|arbitre}} {{citation|placé au-dessus des partis}}, qui choisit les membres du gouvernement et dirige leur travail, peut prendre les pleins pouvoirs ou faire appel au peuple.<ref>Citations tirées de [[Charles de Gaulle]], [[Discours de Bayeux]], 16 juin 1946</ref> Malgré son admiration pour de Gaulle, Debré prend cependant soin de distinguer l'homme et le régime, et réfute, parfois avec indignation – et trente ans après –, les accusations des antigaullistes selon laquelle la constitution de 1958 avait été taillée pour de Gaulle et ne lui survivrait pas. Il considère même que la [[Cohabitation (politique)|cohabitation]] étaient envisagée dès la fondation du régime:<ref>''Trois républiques pour une France. Mémoires'', tome 2 ''Agir (1946–1958)'', Albin Michel, Paris, 1988, p. 368</ref> {{début citation}}Lorsque la majorité de l'Assemblée nationale n'est pas issue du même mouvement électoral que celui qui a élu le Président de la République, les pouvoirs du Premier Ministre, en fait, augmentent considérablement car il est l'expression de la majorité du Parlement, en face de laquelle le Président de la République ne peut que s'incliner ou dissoudre.{{fin citation}} === Libéral et réformateur === Bien que réputé [[Jacobinisme|jacobin]], Michel Debré s'est toujours déclaré, avec insistance, « libéral ». Il ne faut cependant pas comprendre cette revendication à l'aune du « [[libéralisme]] » au sens de la [[philosophie politique]] : Debré accorde peu de confiance au [[régime parlementaire]], et affirme tout au long de sa carrière la nécessité de l'autorité de l'[[État]]. Il montre cependant, dès les [[années 1930]], une sensibilité particulière pour les questions [[Économie|économiques]], et regrette qu'elles occupent une place trop réduite dans la formation des élites politiques françaises. La nationalisation de l'[[École libre des sciences politiques]] et la création des [[Institut d'études politiques|instituts d'études politiques]] en [[1945]] est censée corriger cette insuffisance. Ce « libéralisme » est à comprendre dans un pays où être libéral et jacobin n'est pas contradictoire. Le libéralisme français a historiquement hésité, ainsi que l'a montré par exemple [[Lucien Jaume]],<ref>Voir par exemple [[Lucien Jaume]], ''L'Individu effacé ou le paradoxe du libéralisme français'', [[Fayard (édition)|Fayard]], Paris, 1997</ref> entre deux grandes tendances, l'une fondée sur l'[[individualisme]] dans la lignée de [[Benjamin Constant]], qui échoue, et l'autre sur le recours à l'État et la primauté de l'[[intérêt général]] dans la lignée de [[François Guizot]], un {{citation|libéralisme d'État}} (Jaume), qui l'emporte. C'est dans cette dernière tendance que s'inscrit Debré. Michel Debré s'est attaché à moderniser l'État et les institutions lorsque le besoin s'en faisait sentir. Mécontent du système de recrutement de la [[Fonction publique française|haute fonction publique]], où chaque [[Liste des ministères français|ministère]] organisait son propre concours, il élabore ainsi en [[1945]] le projet d'[[École nationale d'administration (France)|École nationale d'administration]], qu'il crée et dont il contribue à recruter la première promotion. Il réforme également la [[Organisation juridictionnelle (France)|Justice]] en [[1958]]. == Ouvrages == * ''La Mort de l'État républicain'', [[Gallimard]], Paris, [[1947 en littérature|1947]] * ''Projet de pacte pour une union d'États européens, [[1950 en littérature|1950]] * ''Ces princes qui nous gouvernent'', [[Plon]], Paris, [[1957 en littérature]] * ''Une certaine idée de la France'', entretien avec [[Alain Duhamel]], [[Fayard (édition)|Fayard]], Paris, [[1972 en littérature|1972]] * ''Une politique pour la Réunion'', Plon, Paris, [[1974 en littérature|1974]] * ''Le Pouvoir politique'', avec [[Jean-Louis Debré]], [[Seghers]], Paris, [[1976 en littérature|1976]] * ''Le Gaullisme'', avec Jean-Louis Debré, Plon (''Tribune libre''), Paris, [[1977 en littérature|1977]], {{ISBN|2259003303}} * ''Français, choisissons l'espoir'', Albin Michel, Paris, [[1979 en littérature|1979]], {{ISBN|2-226-00777-6}} * ''Lettre ouverte aux Français sur la reconquête de la France'', [[Albin Michel]], Paris, [[1980 en littérature|1980]], ISBN 2-226-01075-0 * ''Peut-on lutter contre le chômage ?'', Fayard, Paris, [[1982 en littérature|1982]], {{ISBN|2-213-01190-7}} * ''Trois républiques pour une France. Mémoires'', avec la collaboration d'[[Odile Rudelle]], Albin Michel, Paris, [[1984 en littérature|1984]]–[[1994 en littérature|1994]], 5 volumes *# ''Combattre'', 1984, {{ISBN|2226020667}} *# ''Agir (1946–1958)'', [[1988 en littérature|1988]], {{ISBN|2226033424}} *# ''Gouverner (1958-1962)'', 1988, {{ISBN|2226034579}} *# ''Gouverner autrement (1962–1970)'', [[1993 en littérature|1993]], {{ISBN|2226062076}} *# ''Combattre toujours (1969-1993)'', [[1994 en littérature|1994]], {{ISBN|2226075364}} * ''Entretiens avec le général de Gaulle (1961–1969)'', Albin Michel, Paris, 1993, {{ISBN|2226066608}} * ''Entretiens avec Georges Pompidou (1971–1974)'', Albin Michel, Paris, [[1996 en littérature|1996]], {{ISBN|2226084878}} == Anecdotes == L'humoriste [[Coluche]] a raillé dans son sketch ''[http://michbuze.club.fr/lavache/coluche_ancien_combattant.htm L'Ancien Combattant]'' (1975) l'image un rien austère de l'ancien Premier ministre, en l'imaginant en [[:wikt:boute-en-train|boute-en-train]] lors des banquets des commémoration militaires : {{citation|T'entends un bouchon qui saute : c'est Debrééé ! Y en a un qui ronfle pendant le discours de [[André Malraux|Malraux]] : c'est Debrééé ! Y en a un qui s'met un entonnoir pour faire rigoler les copains, dites-le avec moi : ''[avec le public]'' C'est Debréééé ! Alors, j'invente rien, tout le monde le dit…}} == Références et sources == === Voir aussi === * [[:Catégorie:Famille Debré]] * [[Gouvernement Michel Debré]] * [[Souveraineté]] === Bibliographie === * [[Anne Duménil]], ''La Formation des idées politiques et constitutionnelles de Michel Debré (1934–1946)'', mémoire de [[diplôme d'études approfondies]] en histoire du {{XXe siècle}} à l'[[Institut d'études politiques de Paris]] sous la direction de [[Serge Berstein]], 1994 * [[Gilles Gauvin]], ''Michel Debré et l'île de la Réunion'', [[L'Harmattan]], Paris, 1996, {{ISBN|2-7384-4834-8}} * [[Frédéric Rouvillois]], « Se choisir un modèle : Michel Debré et le parlementarisme anglais en 1958 », ''[[Revue française d'histoire des idées politiques]]'', n° 12, août-décembre 2000, pp. 347–366 * [[Patrick Samuel]], ''Michel Debré. L'architecte du Général'', préface d'[[Alain Peyrefitte]], [[Franel]], Suresnes, 2000, {{ISBN|2-921843-41-2}} * [[Simon Braillon]], ''Michel Debré et l'Algérie (1945–1962). Un républicain dans la crise'', mémoire de [[maîtrise]] d'histoire à l'[[Université de Lille III|Université Charles-de-Gaulle – Lille III]] sous la direction de [[Robert Vandenbussche]], 2004 * [[Serge Berstein]], [[Pierre Milza]], [[Jean-François Sirinelli]] (direction), ''Michel Debré, Premier ministre (1959–1962)'', actes du colloque organisé au [[Sénat (France)|Sénat]] les 14, 15 et 16 mars 2002 par le [[Centre d'histoire de Sciences Po|Centre d'histoire de l'Europe du {{S-|XX|e}}]], [[Presses universitaires de France]], Paris, 2005, {{ISBN|2-13-054404-5}} * ''Michel Debré, un réformateur aux finances, 1966-1968'', CHEFF, 2005, 200 p, {{ISBN|2-11-094802-7}} === Notes === <references /> === Liens externes === {{Commons}} * [http://www.academie-francaise.fr/immortels/base/academiciens/fiche.asp?param=676 Michel Debré] sur le site de l'[[Académie française]] * [http://www.politique.com/dossiers/france/articles/institutions/discours-michel-debre-conseil-etat-aout-1958.htm Synthèse du discours du 27 août 1958 devant le Conseil d’État] * [http://www.premier-ministre.gouv.fr/IMG/doc/Discours_de_politique_generale_de_Michel_Debre.doc Discours de politique générale de Michel Debré] {{Doc}} le [[15 janvier]] [[1959]] *[http://www.ina.fr/archivespourtous/index.php?vue=notice&id_notice=CAA8001210201 Sujet du journal télévisé de TF1 daté du 7 juillet 1980 traitant de la campagne de Michel Debré à la Réunion] Ina Archives Télé *[http://www.ina.fr/archivespourtous/index.php?vue=notice&id_notice=PHD95075428 Radioscopie de Michel Debré] Ina Archives Télé == Chronologies == {{Début dynastie}} {{Insérer dynastie|couleur1=#BFC5F9|couleur2=white|couleur3=#F9C8BF|icone=Flag of France.svg |nom=[[Liste des chefs du gouvernement français|Premier ministre]] |avant=[[Charles de Gaulle]]<br /><small>[[Président du conseil]]</small> |après=[[Georges Pompidou]] |période= {{date|8|janvier|1959}} - {{date|14|avril|1962}} }} {{Insérer dynastie|couleur1="#ffffff"|couleur2="#FFCC99"|avant=[[Robert Lecourt]]|nom=[[Liste des ministres français de la Justice|Ministre français de la Justice]]|après=[[Edmond Michelet]]}} {{Insérer dynastie|couleur1="#ffffff"|couleur2=lightgreen|avant=[[André Boulloche]]|nom=[[Ministre français de l'Éducation nationale]]|après=[[Louis Joxe]]}} {{Insérer dynastie|couleur1="#ffffff"|couleur2=lightyellow|avant=[[Maurice Couve de Murville]]|nom=[[Liste des ministres français des Affaires étrangères|Ministre français des Affaires étrangères]]|après=[[Maurice Schumann]]}} {{Insérer dynastie|couleur1="#ffffff"|couleur2=yellow|avant=[[Valéry Giscard d'Estaing]]|nom=[[Liste des ministres français des Finances|Ministre de l'Économie et des Finances]]|après=[[François-Xavier Ortoli]]}} {{Insérer dynastie|couleur1="#ffffff"|couleur2=#FF8080|avant=[[Pierre Messmer]]|nom=[[Liste des ministres français de la Défense|Ministre français de la Défense]]|après=[[Robert Galley]]}} {{Fin dynastie}} {{Académie française|avant=[[Louis de Broglie]]|Numéro=1|Période=1988-1996|après=[[François Furet]]}} {{Modèle:Palette Académie française jour d'élection |date=24 mars 1988 |fauteuil1=Michel Debré |fauteuil2=André Frossard |fauteuil4=Jean Hamburger |fauteuil5=René Huyghe |fauteuil6=Eugène Ionesco |fauteuil8=Michel Déon |fauteuil9=Alain Decaux |fauteuil10=Jean Guitton |fauteuil11=Alain Peyrefitte |fauteuil12=Jean d'Ormesson |fauteuil13=Maurice Schumann |fauteuil14=Jean Mistler |fauteuil15=Jacques Laurent |fauteuil16=Léopold Sédar Senghor |fauteuil18=Edgar Faure |fauteuil19=Pierre Moinot |fauteuil21=Félicien Marceau |fauteuil22=Julien Green |fauteuil23=Henri Gouhier |fauteuil24=Étienne Wolff |fauteuil25=Jean Bernard |fauteuil26=Georges Duby |fauteuil27=Michel Droit |fauteuil28=Henri Troyat |fauteuil29=Claude Lévi-Strauss |fauteuil30=Maurice Druon |fauteuil31=Jean Dutourd |fauteuil32=Maurice Rheims |fauteuil33=Michel Mohrt |fauteuil34=Jacques de Bourbon Busset |fauteuil35=Louis Leprince-Ringuet 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1979-1984]] [[Catégorie:Résistant français]] [[Catégorie:Personnalité de l'Union démocratique et socialiste de la Résistance]] [[Catégorie:Personnalité du Parti républicain, radical et radical-socialiste]] [[Catégorie:Personnalité du Rassemblement du peuple français]] [[Catégorie:Personnalité du Rassemblement pour la République]] [[Catégorie:Membre de l'Académie française]] [[Catégorie:Ancien élève de l'Institut d'études politiques de Paris]] [[Catégorie:Famille Debré]] [[Catégorie:Personnalité de la France libre]] [[ca:Michel Debré]] [[da:Michel Debré]] [[de:Michel Debré]] [[en:Michel Debré]] [[es:Michel Debré]] [[fi:Michel Debré]] [[it:Michel Debré]] [[ja:ミシェル・ドブレ]] [[la:Michael Debré]] [[no:Michel Debré]] [[pl:Michel Debré]] [[pt:Michel Debré]] [[ru:Дебре, Мишель]] [[sv:Michel Debré]]