Nombre complexe fendu
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2008-05-12T11:36:44Z
Sherbrooke
18624
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En [[mathématiques]], les '''nombres complexes fendus''' sont une extension des [[nombre réel|nombres réels]] définis de manière analogue aux [[nombre complexe|nombres complexes]] (usuels). La différence-clef entre les deux est que la multiplication des nombres complexes (usuels) respecte la [[norme euclidienne]] standard (carrée) :
:<math>x^2 + y^2\,</math> sur <math>\mathbb{R}^2\,</math>
alors que la multiplication des nombres complexes fendus, quant à elle, respecte la norme de Minkowski ou [[norme lorentzienne]] (carrée)
:<math> x^2 - y^2 \,</math>
Les nombres complexes fendus ont beaucoup d'autres noms, voir la section des synonymes ci-dessous.
Un [[espace vectoriel]] réel à deux dimensions muni du produit interne de Minkowski est appelé un [[espace de Minkowski]] de dimension 1+1, souvent noté <math>\mathbb{R}^{1,1}\,</math> . Tout comme la [[géométrie euclidienne]] du plan euclidien <math>\mathbb{R}^2\,</math> peut être décrite avec les nombres complexes, la [[géométrie lorentzienne]] du plan de Minkowski <math>\mathbb{R}^{1,1}\,</math> peut être décrite avec les nombres complexes fendus.
Le nom ''fendu'' provient du fait que les signatures de la forme (''p'',''p'') sont appelées ''signatures fendues''. En d'autre mots, les nombres complexes fendus sont similaires aux nombres complexes mais dans la signature fendue (1,1).
==Définition==
Un nombre complexe fendu est de la forme :
:<math>z = x + j.y\,</math>
où ''x'' et ''y'' sont des [[nombre réel|nombres réels]] et la quantité ''j'' définie par (voir les [[Tessarine]]s) :
:<math>j^2 = +1\,</math>
L'ensemble de tous ces ''z'' est appelé le ''plan complexe fendu''. L'[[addition]] et la [[multiplication]] des nombres complexes fendus sont définies par
:<math>(x + j.y) + (u + j.v) = (x + u) + j.(y + v)\,</math>
:<math>(x + j.y)(u + j.v) = (xu + yv) + j.(xv + yu)\,</math>
Cette multiplication est [[commutativité|commutative]], [[associativité|associative]] et [[distributivité|distributive]] sur l'addition.
===Conjugué, norme, et produit interne===
Comme pour les nombres complexes, on peut définir la notion de ''conjugué complexe fendu''. Si
:<math>z = x + j.y\,</math>,
le conjugué de ''z'' est défini par
:<math>z^* = x - j.y\,</math>.
Le conjugué satisfait les propriétés similaires du conjugué complexe usuel :
:<math>(z + w)^* = z^* + w^*\,</math>
:<math>(zw)^* = z^*w^*\,</math>
:<math>(z^*)^* = z\,</math>
Ces trois propriétés impliquent que le conjugué complexe fendu est un [[automorphisme]] d'ordre 2.
La ''norme carrée'' (ou [[forme quadratique]]) d'un nombre complexe fendu <math>z = x + j.y\,</math> est donnée par
: <math>\lVert z \rVert = z z^* = z^* z = x^2 - y^2\,</math>.
Cette norme n'est pas définie positivement mais possède plutôt une métrique (1,1). Une propriété importante de cette norme est qu'elle est préservée par la multiplication complexe fendue :
: <math>\lVert z w \rVert = \lVert z \rVert \lVert w \rVert </math>
Le produit interne associé (1,1) est donné par
: <math><z, w> = Re(zw^*) = Re(z^*w) = xu - yv\,</math>
où <math>z = x + j.y\,</math> et <math>w = u + j.v\,</math> et
: <math> \lVert z \rVert = \langle z, z \rangle </math>
Les nombres complexes fendus ''z'' et ''w'' sont dits [[orthogonal|orthogonaux]] hyperboliques si <''z'', ''w''> = 0.
Un nombre complexe fendu est inversible [[Équivalence logique|si et seulement si]] sa norme est différente de zéro (<math>\lVert z \rVert \ne 0 </math>). L'[[inverse]] d'un tel élément est donné par
: <math> z^{-1} = z^* / \lVert z \rVert </math>
Les nombres complexes fendus qui ne sont pas inversibles sont appelés ''éléments nuls''. Ceux-ci sont tous de la forme <math>(a \pm j.a)\,</math> pour un certain nombre réel ''a''.
===La base diagonale===
Il existe deux éléments [[idempotent]]s non-triviaux donnés par <math>e = \frac{(1 - j)}{2}\,</math> et <math>e^* = \frac{(1 + j)}{2}\,</math>. Re-employer ces éléments idempotents veut dire que <math>ee = e\,</math> et <math>e^*e^* = e^*\,</math>. Ces deux éléments ensemble sont nuls :
: <math>\lVert e \rVert = \lVert e^* \rVert = e^* e = 0 </math>
Il est souvent commode d'utiliser ''e'' et ''e''<sup>*</sup> comme une [[base (algèbre linéaire)|base]] alternative pour le plan complexe fendu. Cette base est appelée la ''base diagonale'' ou ''base nulle''. Le nombre complexe fendu ''z'' peut être écrit dans la base nulle sous la forme
:<math>z = x + j.y = (x - y)e + (x + y)e^*\,</math>
Si nous notons le nombre
: <math>z = ae + be^*\,</math> pour les nombres réels ''a'' et ''b'' par (''a'',''b'') alors la multiplication complexe fendue est donnée par
: <math>(a_1,b_1)(a_2,b_2) = (a_1a_2,b_1b_2)\,</math>.
Dans cette base, il devient clair que les nombres complexes fendus sont [[isomorphe]]s à la [[somme directe]] <math>\mathbb{R} \oplus \mathbb{R}\,</math> avec l'addition et la multiplication définie ci-dessus.
Le conjugué complexe fendu dans la base diagonale est donné par
:<math>(a,b)^* = (b,a)\,</math>
et la norme par
:<math>\lVert (a,b) \rVert = ab </math>
==Géométrie==
L'ensemble de points
: <math>z : \lVert z \rVert = a^2\,</math>
est une [[Hyperbole (mathématiques)|hyperbole]] pour tout ''a'' de <math>\mathbb{R}</math> différent de zéro. L'hyperbole est constitué d'une branche gauche et droite passant par ''a'' et - ''a''. Le cas ''a'' = 1 est appelé l'''hyperbole unité''. L'hyperbole conjuguée est donnée par
: <math>z : \lVert z \rVert = - a^2\,</math>
avec une branche supérieure et inférieure passant par ''ja'' et - ''ja''. L'hyperbole et l'hyperbole conjuguée sont séparée par deux [[asymptote]]s diagonales qui forment l'ensemble des éléments nuls :
: <math>z : \lVert z \rVert = 0\,</math>
Ces deux droites (quelques fois appelées le ''cône nul'') sont [[perpendiculaire]]s et ont des pentes de <math>\pm 1\,</math>.
L'analogue de la [[formule d'Euler]] pour les nombres complexes fendus est
: <math>e^{(j.\theta)} = \cosh(\theta) + j.\sinh(\theta)\,</math>
Ceci peut être déduit du développement en série de puissances utilisant le fait que [[cosinus hyperbolique|cosh]] a seulement des puissances paires tandis que [[sinus hyperbolique|sinh]] a des puissances impaires. Pour toutes les valeurs réelles de l'[[angle hyperbolique]] <math>\theta\,</math>, le nombre complexe fendu <math>\lambda = e^{(j.\theta)}\,</math> est de norme 1 et est lié à la branche droite de l'hyperbole unité.
Puisque <math>\lambda\,</math> est de norme 1, en multipliant tout nombre complexe fendu ''z'' par <math>\lambda\,</math>, la norme de ''z'' est préservée et représente une ''rotation hyperbolique'' (aussi appelée une ''[[transformation de Lorentz]]''). En multipliant par <math>\lambda\,</math> la structure géométrique est préservée, prenant les hyperboles par elles-mêmes et le cône nul par lui-même.
L'ensemble de toutes les transformations du plan complexe fendu qui préserve la norme (ou de manière équivalente, le produit interne) forme un [[groupe (mathématiques)|groupe]] appelé le [[groupe orthogonal généralisé]] O(1,1). Ce groupe est constitué des rotations hyperboliques - qui forme un [[sous-groupe]] noté <math>SO^+(1,1)\,</math> - combiné avec quatre [[Réflexion (mathématiques)|réflexion]]s discrètes données par
:<math>z\mapsto\pm z</math> et <math>z\mapsto\pm z^{*}</math>.
L'application exponentielle
: <math>\exp : \mathbb{R} \rightarrow SO^+(1,1)\,</math>
qui associe <math>\theta\,</math> à la rotation par <math>e^{(j.\theta)}\,</math> est un [[isomorphisme]] de groupe puisque la formule usuelle des exponentielles s'applique :
:<math>e^{j(\theta+\phi)} = e^{j\theta}e^{j\phi}\,</math>
==Propriétés algébriques==
En termes d'[[algèbre générale]], les nombres complexes fendus peuvent être décrits comme le [[anneau quotient|quotient]] de l'[[anneau polynomial]] <math>\mathbb{R}[x]\,</math> par l'[[idéal]] généré par le [[polynôme]] <math>x^2 - 1\,</math>,
: <math>\mathbb{R}[x]/(x^2 - 1)\,</math>.
L'image de ''x'' dans l'ensemble-quotient est l'unité imaginaire ''j''. Avec cette description, il est clair que les nombres complexes fendus forment un [[anneau commutatif]] de [[caractéristique d'un anneau|caractéristique]] 0. De plus, si nous définissons une multiplication scalaire de manière évidente, les nombres complexes fendus forment une [[algèbre]] associative et commutative sur les nombres réels de dimension deux. L'algèbre n'est pas un [[corps (mathématiques)|corps]] puisque les éléments nuls ne sont pas inversibles. En fait, tous les éléments nuls différents de zéro sont des [[diviseur de zéro|diviseurs de zéro]].
Puisque l'addition et la multiplication sont des opérations continues en respectant la topologie usuelle du plan, les nombres complexes fendus forment un [[anneau topologique]].
Les nombres complexes fendus ne forment pas une [[algèbre normée]] dans le sens usuel du mot puisque la « norme » n'est pas définie positivement. Néanmoins, si on étend la définition pour inclure les normes de signature générale, ils forment une telle algèbre. Ceci s'ensuit du fait suivant
:<math>\lVert zw \rVert = \lVert z \rVert \lVert w \rVert\,</math>
Pour un exposé sur les algèbres normées de signatures générales, voir la référence par Harvey.
Les nombres complexes fendus sont un cas particulier d'une [[algèbre de Clifford]]. Nommément, ils forment une algèbre de Clifford sur un espace vectoriel à une dimension avec une forme quadratique définie négativement. Comparer ceci avec les nombres complexes qui forment une algèbre de Clifford sur un espace vectoriel à une dimension avec une forme quadratique définie positivement. (NB : certains auteurs permutent les signes dans la définition d'une algèbre de Clifford ce qui interchangera le sens de ''définie positivement'' et de ''définie négativement'').
==Représentations matricielles==
Comme dans le cas des nombres complexes (usuels), on peut facilement représenter les nombres complexes fendus par les [[matrice (mathématiques)|matrices]]. Le nombre complexe fendu
: <math>z = x + j.y = 1.x + j.y\,</math>
peut être représenté par la matrice
:<math>z \mapsto \begin{bmatrix}x & y \\ y & x\end{bmatrix}</math>
car
:<math>1 \mapsto \begin{bmatrix}1 & 0 \\ 0 & 1\end{bmatrix}</math>
et
:<math>j \mapsto \begin{bmatrix}0 & 1 \\ 1 & 0\end{bmatrix}</math>
L'addition et la multiplication des nombres complexes fendus sont alors donnés par l'addition et la multiplication matricielle. La norme de ''z'' est donnée par le [[déterminant]] de la matrice correspondante. La conjugaison complexe fendue correspond à la multiplication des deux cotés par la matrice
:<math>C = \begin{bmatrix}1 & 0 \\ 0 & -1\end{bmatrix}</math>
La rotation hyperbolique par <math>e^{(j.\theta)}\,</math> correspond à la multiplication par la matrice
:<math>\begin{bmatrix}\cosh\theta & \sinh\theta \\ \sinh\theta & \cosh\theta\end{bmatrix}</math>
En travaillant dans la base diagonale, cela nous conduit à la représentation matricielle diagonale
:<math>z \mapsto \begin{bmatrix}x - y & 0 \\ 0 & x + y\end{bmatrix}</math>
Les rotations hyperboliques dans cette base correspond à la multiplication par
:<math>\begin{bmatrix}e^{-\theta} & 0 \\ 0 & e^{\theta}\end{bmatrix}</math>
qui montre qu'elles sont des applications encadrantes.
==Histoire==
L'usage des nombres complexes fendus remonte à [[1848]] lorsque [[James Cockle]] exposa ses [[Tessarine]]s. [[William Kingdon Clifford]] utilisa les nombres complexes fendus pour représenter les sommes de spins en [[1882]]. Clifford appela les éléments « motors ».
Dans le vingtième siècle, les nombres complexes fendus devinrent une plateforme commune pour décrire les [[transformation de Lorentz|transformations de Lorentz]] de la [[relativité restreinte]], dans un espace-temps plat car un changement de vitesse entre des cadres de référence est élégamment exprimé par une ''rotation hyperbolique''.
En [[1935]], J.C. Vignaux et A. Duranona y Vedia développèrent l'algèbre et la théorie des fonctions géométriques complexes fendues dans quatre articles dans ''Contribucion a las Ciencias Fisicas y Matematicas'', Universidad Nacional de La Plata, Republica Argentina (en espagnol).
Plus récemment, le plan des nombres complexes fendus a été exploité pour exprimer des idées mathématiques, des requêtes et des fonctions. C'est un pont important entre une structure comme le plan complexe ordinaire et le caractère exotique des créations modernes.
==Synonymes==
* (Réel) Tessarines James Cockle 1848
* (Algébrique) motors W.K. Clifford 1882
* numeros complejos hiperbolicos J.C. Vignaux 1935
* double nombres I.M. Yaglom 1965 et Hazewinkle 1990
* anormal-complex Zahlen W. Benz 1973
* nombres perplexes P. Fjelstad 1986
* nombres de Lorentz F.R. Harvey 1990
* nombres complexes hyperboliques G. Sobczyk 1995
* nombres complexes fendus B. Rosenfeld 1997
==Voir aussi==
*[[Espace de Minkowski]]
*[[Groupe de Lorentz]]
*[[Algèbre de Clifford]]
*[[Coquaternion]]
==Références et liens externes==
* Benz, W. (1973)''Vorlesungen uber Geometrie der Algebren'', Springer
* Cockle, James (1848) « A New Imaginary in Algebra », ''London-Edinburgh-Dublin Philosophical Magazine'' (3) '''33''':345-9.
* Fjelstadt, P. (1986)"Extending Special Relativity with Perplex Numbers", ''American Journal of Physics'' '''54''':416.
* F. Reese Harvey. ''Spinors and calibrations.'' Academic Press, San Diego. 1990. ISBN 0-12-329650-1. Contains a description of normed algebras in indefinite signature, including the Lorentz numbers.
* Hazewinkle, M. (1990) editor ''Encyclopaedia of Mathematics'' Soviet/AMS/Kluyer, Dordrect.
* Literature review: [http://ca.geocities.com/cocklebio/motorplaneD The Motor Plane D]
* Rosenfeld, B. (1997) ''Geometry of Lie Groups'' Kluwer Academic Pub.
* Sobczyk, G.(1995) [http://mailweb.pue.udlap.mx/~sobczyk/HYP2.PDF Hyperbolic Number Plane (PDF)]
* Clifford, W.K.,''Mathematical Works'' (1882) edited by A.W.Tucker,pp.392-4, « Further Notes on [[Biquaternion]]s »
* Vignaux, J.(1935) « Sobre el numero complejo hiperbolico y su relacion con la geometria de Borel », ''Contribucion al Estudio de las Ciencias Fisicas y Matematicas'', Universidad Nacional de la Plata, Republica Argentina.
[[Catégorie:Nombre hypercomplexe|Complexe fendu]]
[[en:Split-complex number]]
[[pt:Número complexo hiperbólico]]
[[ru:Двойные числа]]
[[zh:雙曲複數]]