Pierre Jean Louis Ovide Doublet
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'''Pierre Jean Louis Ovide Doublet''', homme politique et écrivain : région d'[[Orléans]] 25 août 1749 - [[La Valette]] (Malte) 4 février 1824.
== Les premières années (1749 - 1781) ==
Fils de Jean Doublet, simple jardinier, et de Jeanne Désir, '''Pierre Jean Louis Ovide Doublet''' naît le 25 août 1749 selon son acte de baptême, à une vingtaine de kilomètres d'[[Orléans]] non loin du [[château de Chambord]]. Il est baptisé dès le lendemain en l'église paroissiale Saint-Firmin ainsi qu'il est précisé dans ses mémoires. Elevé dans un établissement religieux, il semble alors se diriger vers la prêtrise. Dans cette perspective, il est envoyé à [[Rome]]. Mais en définitive, il s'engage dans l'armée de [[Ordre de Malte|Ordre de Saint-Jean]] à [[Malte]].
C'est ainsi que le 19 juin 1779, il entre comme soldat au régiment d'infanterie de [[Ordre de Malte|l'Ordre]] et il accède au grade de premier sergent en novembre 1782.
== L'ascension dans l'Ordre de Malte (1781 - 1798) ==
Parallèlement, en 1781, il entre à la Secrétairerie d'État Française du Grand Maître [[Emmanuel de Rohan-Polduc|de Rohan]] (l'Ordre comprenait également deux autres secrétaireries, espagnole et italienne) avec le titre de sous-secrétaire de ses [[Commanderie]]s.
Il se distingue rapidement par ses compétences et, par bulle du 6 octobre 1783, il est affilié à l'Ordre en qualité de "confratello" ou "donato" ([[Hiérarchie dans l'Ordre de Malte|donat]]) avec faculté de porter la croix à 6 pointes en or émaillé à la boutonnière ainsi que celle en toile blanche cousue sur l'habit, Il acquiert en outre droit de posséder des pensions sur toutes les Commanderies, privilège réservé habituellement aux seuls commandeurs de l'Ordre.
Sa bulle de réception est enregistrée à la Chancellerie de l'Ordre le 14 octobre 1783.
L'année suivante, sur proposition du bailli d'Almeida et et de l'auditeur Bruno, il lui est offert d'être admis au rang des [[Hiérarchie dans l'Ordre de Malte|chapelains conventuels]]. Mais les projets de mariage qu'il a déjà formés l'obligent à renoncer : les chapelains conventuels, tout comme les chevaliers, devaient obligatoirement faire vœux de chasteté.
C'est ainsi que 19 avril 1784, bravant la volonté de sa hiérarchie et dans la quasi clandestinité, il épouse une jeune maltaise d'origine modeste, Elisabetta "''Bettina''" Magri.
Il terminera Chef de la Secrétairerie Française de l'Ordre sous les règnes successifs de deux [[Grands maîtres de l'ordre de Malte|Grands Maîtres]] : [[Emmanuel de Rohan-Polduc|Emmanuel de Rohan]] dont il fut le protégé puis, à la mort de Rohan en 1797, de son successeur [[Ferdinand de Hompesch|Ferdinand Von Hompesch]].
Dans le cadre de ses fonctions, il sera notamment étroitement associé à la création du [[Paul Ier de Russie|Grand-Prieuré de Russie]] appelé à remplacer le prieuré de Pologne après le [[Partitions de la Pologne|partage]] de ce pays.
Il est, par ailleurs, "Frère" de la Loge maçonnique de Malte de la [[Grande Loge unie d'Angleterre|Grande Loge de Londres]] (Loge de Saint Jean du Secret et de l’Harmonie).
Le bailli Litta, figure majeure de la création du Prieuré de Russie est, comme par hasard, également membre de cette même loge, le tout sous l'indifférence bienveillante du Grand-Maître de Rohan (lui-même initié à Modane en 1756).
== Occupation française de Malte (1798 - 1800) ==
En juin 1798, lors de la prise de Malte par [[Napoléon Ier|Bonaparte]] en route pour l'[[Campagne d'Égypte|Egypte]], il fit partie de la délégation qui négocia à bord de l'Orient, le navire amiral, les conditions de la reddition de l'Ordre. Il intervint notamment lorsqu'il fut question de fixer le montant des indemnités allouées au Grand-Maître. Faisant observer que ce montant lui paraissait insuffisant, Bonaparte lui rétorqua qu'il n'avait qu'à s'adresser directement à la [[Directoire|République]]. Comme aux autres Français servant dans l'Ordre, le Général en Chef lui proposa, ou plutôt lui intima l'ordre, de le suivre en Égypte, but final de cette expédition.
En raison de son âge (il avait presque 50 ans) et de sa famille dont il était le seul soutien, Doublet déclina courtoisement mais fermement la proposition. Il s'attira la colère de Bonaparte qui n'appréciait pas qu'on puisse lui tenir tête. Peu après, le futur empereur confiera néanmoins à [[Jean-Andoche Junot|Junot]], son aide de camp, que cet homme devait avoir des qualités car il avait du culot.
Durant l'occupation de Malte par la France (juin 1798 / sept 1800), ses compétences furent à nouveau mises à contribution par les autorités françaises en raison de sa connaissance du terrain et du fait qu'il était Français et donc fiable aux yeux des occupants. Il est nommé dès juin 1798 Secrétaire Général de la Commission de Gouvernement mise en place par Bonaparte lors de son séjour. Puis il accédera, le 10 novembre 1799, à la fonction de '''Commissaire du Gouvernement''' en remplacement de [[Regnaud de Saint-Jean d'Angély]] rappelé en France, poste qu'il conservera jusqu'à la reddition de La Valette le 5 septembre 1800. Le président de cette commission était un autre Français, le "citoyen" Bosredon de Ransijat, ex commandeur de l'Ordre et son ancien trésorier.
* ''' L'affaire du chiffre du Grand Maître '''
A la suite de la prise de Malte par les troupes de Bonaparte et dans la débacle de l'Ordre qui suivit, Doublet fut accusé d'avoir communiqué aux autorités françaises le code chiffré que les Grands Maîtres [[Ferdinand de Hompesch|Hompesch]] et, avant lui, [[Emmanuel de Rohan-Polduc|Rohan]] utilisaient pour sécuriser leurs courriers diplomatiques. En effet, en tant qu'ordre souverain, l'Ordre de Malte échangeait alors une abondante correspondance avec les différentes cours européennes.
Ses services ayant intercepté plusieurs messages échangés notamment entre le Grand Maître et le [[Paul Ier de Russie|tsar de Russie]], Bonaparte exigea qu'on lui remit ce code de déchiffrage afin de connaître le contenu de ces correspondances. [[Ferdinand de Hompesch|Ferdinand von Hompesch]] céda à cette exigence et Doublet fut chargé à contre-cœur de la remise de ce code chiffré. Ces lettres n'apportèrent d'ailleurs rien de très nouveau que le Général en Chef ne sut déjà sauf peut-être, détail amusant, certaines appréciations sur sa propre personne émanant de diplomates... français ! Toutefois, très jalousé dans certains milieux de l'Ordre et, de plus, en raison de son origine française qui le rendait automatiquement suspect, une rumeur chargea très vite Doublet, en tant qu'homme de confiance de von Hompesch, de l'entière responsabilité d'avoir livré le chiffre à l'ennemi. Certains de ses accusateurs n'hésiteront pas d'affirmer que Doublet était un traître, au mieux un agent secret à la solde de Bonaparte introduit au sein de l'Ordre. Ce fut en particulier le cas du "Manifeste de Saint Petersbourg" signé d'anciens membres de l'Ordre affichant une allégeance toute servile au tsar Paul 1er et dans lequel Hompesch est notamment traité d'incapable et de défaitiste. C'est aussi le cas d'une brochure partisane éditée également à Saint-Petersbourg par un ancien garde du corps du Comte d'Artois (le futur Charles X). On peut douter sérieusement de l'objectivité de ces écrits dans la mesure où leurs auteurs étaient les obligés du tsar, placés sous son autorité et ils tentaient de relancer d'une façon dérisoire et pitoyable les gloires passées d'un ordre décomposé et déchu. En effet, le tsar Paul 1er avait été désigné protecteur de l'Ordre et, après sa dissolution à Malte, il tentait de le reconstituer dans le cadre du récent Prieuré de Russie. Il était donc important de discréditer von Hompesch et, si le malheureux grand maître, compte tenu de son rang, ne pouvait pas être ouvertement accusé de traîtrise, à tout le moins en reportant le crime sur ses plus proches collaborateurs, pouvait-on en faire un traitre par incompétence, faiblesse et forfaiture. Le tsar parviendra d'ailleurs à atteindre son but puisqu'après l'[[Giovanni Battista Tommasi|abdication]] de von Hompesch, il se fera proclamer Grand-Maître par une partie des membres de l'Ordre en exil qu'il s'était empressé d'accueillir après leur expulsion de Malte (grand maître non reconnu par le Pape car le tsar était marié et de religion orthodoxe).
L'ex donat partagera ces calomnies avec notamment Bosredon de Ransijat, autre renégat aux yeux des rescapés de l'Ordre.
Profondément blessé et atteint dans son honneur par toute cette cabale, d'autant plus qu'il a toujours espéré le relèvement de l'Ordre et son retour à Malte, Doublet ne cessera jusqu'à la fin de ses jours de clamer son innocence dans cette affaire, innocence qui sera d'ailleurs attestée par plusieurs témoins directs, notamment Poussielgue, un proche de Bonaparte à l'époque de ces évènements.
== L'exil - Epilogue (1800 - 1824) ==
Après la reddition de la garnison française de La Valette le 5 septembre 1800, les Anglais expulsèrent de l'archipel maltais tout ceux qui avaient peu ou prou collaboré avec les Français ou leur avaient manifesté une quelconque sympathie, voire même s'en étaient passivement accommodés. Se trouvaient dans le lot non seulement ceux qui avaient activement participé à l'admistration civile et militaire française de l'archipel, Français et Maltais confondus, mais aussi des Français installés de longue date à Malte et qui n'avaient pas grand-chose à voir avec l'occupation et les évènements qui l'avaient accompagnée, leur seul tort étant leur origine. Exemple, le cas d'un certain Pierre Manchin, un Français natif de Troyes dans l'Aube, installé à Malte depuis 1749, qui s'y était marié, y avait fondé une famille et s'était parfaitement intégré dans la population maltaise.
C'est ainsi, qu'après un détour par les Baléares, Pierre Jean Louis Ovide Doublet fut débarqué à Marseille en décembre 1800.
Malgré un décret du Directoire imposant aux réfugiés maltais, s'ils voulaient bénéficier d'une aide, de demeurer dans les départements du Var, des Bouches-du-Rhône et de Corse (départements du [[Liamone]] et du [[Golo]]), on retrouve Doublet en 1802 à Paris ainsi que [[Louis Antoine Fauvelet de Bourrienne|Bourrienne]], secrétaire particulier de Napoléon le rapporte dans ses "[[Mémoires]]".
Il pu croire un instant, après la "[[Paix d'Amiens]]", qu'il pourrait de nouveau s'établir à Malte et il y retournera quelques temps. Mais il fut une fois encore contraint de s'exiler lorsque les [[Troisième Coalition|hostilités]] reprirent entre la France et l'Angleterre.
Dès lors sa vie ne fut plus guère qu'un long exil. En raison de sa participation, durant l'occupation française, à la Commission de Gouvernement entre 1798 et 1800, il était devenu suspect aux yeux des autorités britanniques qui administraient l'archipel maltais. Il passa neuf ou dix années à Rome, vivant de façon précaire, entrecoupées malgré tout de brefs séjours à Malte où il ne pouvait évidemment jamais rester très longtemps. Il vint finalement s'installer à [[Tripoli (Libye)|Tripoli de Barbarie]], appelé par son fils qui s'y était établi. Dans les derniers mois de sa vie, il fut enfin autorisé à revenir se fixer à Malte et il y mourut peu de temps après son retour, le 4 février 1824.
Il existe encore aujourd'hui, à Malte, plusieurs de ses descendants. Parmi ceux-ci, certains se sont prénommés Louis-Ovide et un autre, vers la fin du {{s-|XIX|e}}, Napoléon !
== Bibliographie ==
Pierre Jean Louis Ovide Doublet a laissé un livre, '''"Mémoires Historiques sur l'Invasion et l'Occupation de Malte par une Armée Française, en 1798"''', où il raconte son expérience. La première partie est une analyse du règne du Grand-Maître Emmanuel de Rohan alors que la deuxième partie relate l'invasion et l'occupation de Malte par les Français telle qu'il la vécut de l'intérieur comme témoin privilégié. Lorsqu'en 1832, Sir [[Walter Scott]] fera à son tour le projet d'un ouvrage sur cette période d'occupation de Malte par les Français, on lui présentera le manuscrit laissé par Doublet (il ne sera édité qu'en 1883 soit près de 60 ans après sa mort). Le père d'[[Ivanhoé (roman)|Ivanhoe]] affirmera qu'il s'agissait du meilleur et du plus complet compte-rendu de ces évènements qu'il lui avait été donné de connaître.
Cet ouvrage constitue plus vraisemblablement une sorte de plaidoyer pro domo et quelques-uns avanceront que Doublet pourrait s'être attribué à cette occasion un rôle plus important qu'il ne l'a été en réalité.
== Sources ==
*Archives Départementales du Loiret.
*Pierre Jean Louis Ovide Doublet, ''Mémoires historiques sur l'invasion de Malte par une armée française, en 1798'', Librairie Firmin-Didot Paris, 1883.
*M. Miège, ''Histoire de Malte'', Bruxelles, 1841.
*Louis Antoine Fauvelet de Bourrienne, ''Mémoires de Napoléon''.
*Clément de la Jonquière, ''L'expédition d'Égypte 1798-1801'', (tome 5).
*Eusebe de Salles, ''Pérégrinations en Orient (Tome 2)''.
*Henri Plon, ''Correspondance de Napoléon 1er'', 1860.
*Chevalier de M****, ''Révolution de Malte en 1798 : réponse au manifeste du Prieuré de Russie'', 1799.
*F.A. de Cristophoro d'Avalos, ''Tableau historique de Malte et de ses habitants'', Paris 1820.
*Louis François de Villeneuve-Bargemont, ''Monument des grands maîtres de l'Ordre de St Jean de Jérusalem'', 1829.
*Dennis Castillo, ''The maltese cross : a strategic history of Malta''.
*Frederick W. Ryan, ''House of the Temple'', 2003.
== Liens externes ==
*{{en}}[http://www.maltagenealogy.com/libro%20d'Oro/Doublet.html Libro d'Oro di Melita]
*{{en}}[http://www.searchmalta.com/surnames/doublet/index.shtml Searchmalta.com]
{{Portail|Révolution française}}
{{DEFAULTSORT:Doublet, Pierre}}
[[Catégorie:Personnalité de la Révolution française]]
[[Catégorie:Malte]]
[[Catégorie:Ordre de Malte]]
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