Règne d'Isabelle II
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31792798
2008-07-22T15:14:44Z
Enguerrand VII
191817
/* Décadence et fin du règne */
[[Image:IsabellaII.png|thumb|200px|left|Isabelle II d'Espagne]]
{{Histoire de l'Espagne}}
Le règne d'[[Isabelle II d'Espagne]] ([[1833]] - [[1868]]) est marqué par une période d'instabilité plongeant l'Espagne dans l'équivalent d'une guerre civile. La configuration contemporaine de la politique du pays hérite de cette situation.
À la mort de [[Ferdinand VII d'Espagne|Ferdinand VII]], le {{date|29|septembre|1833}}, son épouse, [[Marie-Christine de Bourbon-Siciles (1806-1878)|Marie-Christine de Bourbon]] assume la [[régence]] avec l'appui des libéraux et au nom de sa fille, la future reine Isabelle II. Le conflit avec son beau-frère, [[Charles de Bourbon (1788-1855)|Charles de Bourbon]], qui aspire au trône en vertu d'une [[loi salique]] prétendument en vigueur (bien que déjà dérogée par [[Charles IV d'Espagne|Charles IV]] et Ferdinand VII lui-même) entraînent le pays dans la [[Crise de succession d'Espagne (1833-1846)|Première Guerre Carliste]], de laquelle les partisans libéraux d'Isabelle sortent vainqueurs.
Après la concession par les [[Cortes]] générales d'une majorité anticipée à Isabelle en réaction à l'échec de la régence d'[[Baldomero Espartero|Espartero]] en [[1843]], plusieurs périodes caractérisées par des tentatives manquées de modernisation de l'Espagne se succédent. Cependant, les tensions internes des dénommés « libéraux », la pression que continuent d'exercer les partisans d'un [[absolutisme]] plus ou moins modéré, les gouvernements totalement influencés par l'institution militaire, l'échec final face aux difficultés économiques et la décadence de l'[[Union Libérale (Espagne)|Union libérale]] provoquent, suite au coup d'Etat du général [[Joan Prim]] en [[1868]] et à l'exil en France d'Isabelle, la première période [[démocratie|démocratique]] en Espagne, connue sous le nom de '''[[Sexenio Democrático]]'''.
La personnalité de la reine Isabelle, puerile, peu intéressée par la politique et sous la pression permanente de la Cour, en particulier de sa mère et des généraux [[Ramón María Narváez y Campos|Narváez]], Espartero et [[Leopoldo O'Donnell|O'Donnell]], rend impossible l'indispensable transition de l'[[Ancien Régime]] vers un modèle plus libéral. Le règne personnel d'Isabelle II est plutôt impopulaire et agité; assez rapidement, la réalité du pouvoir appartient à l'armée et ce sont des généraux qui contrôlent le pays. Tout ceci explique que l'Espagne aborde le dernier tiers du {{s-|XIX|e}} dans des conditions nettement défavorables par rapport aux autres puissances européennes.
== L'Espagne en 1833 ==
L'Espagne de 1833 présente l'aspect d'un pays instable sur le plan politique, archaïque dans les domaines économique et social, faible et hésitant sur le plan diplomatique.
Près de vingt ans après la restauration monarchique, la situation politique espagnole n'est toujours pas stabilisée, la Constitution libérale de 1812 ayant été enterrée lors de la répression de la ''[[décennie abominable]]'' (la ''{{lang|es|década ominosa}}'') menée par un pouvoir absolutiste particulièrement réactionnaire ([[1823]]-[[1833]]). La fin du règne de [[Ferdinand VII d'Espagne|Ferdinand VII]] est cependant marquée par une évolution favorable au libéralisme : le roi se rapproche en effet des libéraux les plus modérés. Ceux-ci, recrutés au sein d'une bourgeoisie embryonnaire de négociants castillans ou d'entrepreneurs catalans, évoluent eux-mêmes vers un certain conservatisme.
L'économie du pays est marquée par une industrialisation encore balbutiante.
Mise au pas par l'expédition française de 1823, privée de la plupart ses colonies américaines dès 1824, paralysée par ses troubles internes, l'Espagne n'exerce plus de réelle influence dans le reste du monde et, oscillant entre une alliance avec l'Angleterre ou un rapprochement avec la France, elle apparaît de plus en plus isolée en Europe.
==Les régences de Marie-Christine et d'Espartero (1833-1843) ==
[[Image:Mariacristina.jpg|thumb|left|150px| [[Marie-Christine de Bourbon]]]]
La régence de [[Marie-Christine de Bourbon|Marie-Christine]] est marquée par la guerre civile et la confrontation entre les généraux dont les aspirations et les critères dominent, non seulement la vie du pays mais aussi le développement naissant des [[parti politique|partis politiques]]. [[Francisco Cea Bermúdez]], très proche des thèses [[absolutisme|absolutistes]] du défunt [[Ferdinand VII d'Espagne|Ferdinand VII]] est le premier [[Liste des présidents du Gouvernement espagnol|Président du Conseil des Ministres]]. L'absence d'avancées libérales entraîne le départ de Cea Bérmudez et l'arrivée de [[Francisco Martínez de la Rosa|Martínez de la Rosa]], qui convainc la régente de promulguer le [[Statut Royal de 1834]], qui constitue une régression par rapport à la [[Constitution espagnole de 1812|Constitution de Cadix]].
L'échec des conservateurs amène les libéraux au pouvoir durant l'été [[1835]]. La personnalité la plus marquante de cette période est [[Juan Álvarez Mendizábal]], homme politique et économiste qualifié et renommé, qui parvient à faire cesser les soulèvements libéraux dans toute l'Espagne et initie des réformes économiques et politiques dont les plus importantes touchent l'armée et les finances publiques, avec le processus de [[Désamortissement en Espagne|désamortissement]] des biens de l'[[Église catholique]]. Après la démission de Mendizabal, débordé par de multiples conflits, naît la [[Constitution espagnole de 1837|Consitution de 1837]], œuvre de [[José María Calatrava]], dans une tentative pour concilier l'esprit de la Constitution de Cadix et celui des partisans de l'[[Ancien Régime]].
La [[Crise de succession d'Espagne (1833-1846)|Guerre Carliste]] entraîne de graves difficultés économiques et politiques. La lutte contre l'armée du [[carlisme|carliste]] [[Tomás de Zumalacárregui]], qui a pris les armes dès [[1833]], oblige la régente à se reposer en grande partie sur des militaires bénéficiant d'une importante renommée dans la population. Parmi ceux-ci, il convient de souligner le rôle important joué par [[Baldomero Espartero|le général Espartero]], chargé de consigner la victoire finale dans la [[Convention de Oñate]]. Cette situation, dans laquelle les militaires se substituent à des partis politiques trop faibles, provoque une crise gouvernementale permanente au cours de laquelle les intérêts des différentes autorités militaires imposent des gouvernements successifs manquant de légitimité auprès de la population.
[[Image:Baldomero Espartero.jpg|thumb|right|150px| [[Baldomero Espartero]]]]
En [[1840]], Marie-Christine, consciente de sa faiblesse, tente de négocier un accord avec Espartero, mais celui-ci poursuit ses intrigues jusqu'à la révolution libérale à [[Madrid]] le I{{er}} septembre. Marie-Christine est obligée de s'exiler en France en abandonnant la régence à Espartero, qui l'assume dès le {{date|12|octobre|1840}}, avec un large soutien populaire. Le général ne sait toutefois pas mettre en œuvre l'esprit libéral qui l'a amené au pouvoir et préfère confier les affaires les plus importantes à ses anciens compagnons d'armes de la guerre carliste et de la [[bataille d'Ayacucho]].
De fait, la régence prend la forme d'une [[dictature militaire]]. Pour leur part, les conservateurs représentés par Leopoldo O'Donnell et Ramón María Narváez multiplient les [[pronunciamiento]]s. En [[1843]], la détérioration politico-économique et l'impopularité d'Espartero sont telles que même ses anciens alliés libéraux conspirent contre lui. Le {{date|11|juin|1843}}, le soulèvement des modérés reçoit l'appui de certains hommes de confiance d'Espartero comme [[Joaquín María López]] et [[Salustiano Olózaga]], obligeant le général à abandonner le pouvoir et à s'exiler à [[Londres]].
==La majorité d'Isabelle II==
Avec la chute d'Espartero, l'ensemble de la classe politique et militaire s'accorde à ne pas instaurer une nouvelle égence, mais plutôt reconnaître la majorité de la reine, alors âgée de 13 ans. Le règne de cette dernieère reste donc compliqué et instable jusqu'en [[1868]]; cette période marque durablement la situation politique du {{s|XIX|e}} et d'une partie du {{s|XX|e}} en Espagne.
La situation politique, économique et sociale connaît des périodes distinctes : la ''décennie modérée'' jusqu'en [[1854]], les ''deux ans progressistes'' (''{{lang|es|Bienio Progresista}}'') jusqu'en [[1856]], suivi des ''gouvernements de l'Union Libérale'' (''{{lang|es|Unión Liberal}}'') jusqu'en [[1868]].
===Des débuts tumultueux===
[[Image:Cortes1843-1-.jpg|thumb|left|300px| Gravure du Palais des Cortes en [[1843]]]]
Isabelle II prête serment sur la [[Constitution espagnole de 1837|Constitution de 1837]] le {{date|10|novembre|1843}} devant les [[Cortes|Cortes générales]]. Elle demande immédiatement au progressiste [[Salustiano Olózaga]], le négociateur du retour d'exil de Marie-Christine, la formation de son premier gouvernement. malheureusement, Olózaga n'obtient pas son élection au poste de Président du congrès des Députés et, accusé - sans fondement - par le réactionnaire [[Luis González Bravo]] d'avoir intrigué et d'avoir forcé la reine à signer le décret de dissolution des Cortes (dissolution intervenue le [[28 novembre]]), est obligé de démissioner, entraînant la rupture de l'accord ''de facto'' entre progressistes et modérés qui a mis fin à la régence d'Espartero.
González Bravo, agissant en réalité pour le compte du général Narváez, est nommé nouveau [[Président du Gouvernement (Espagne)|président du Conseil des Ministres]] le {{1er décembre}} et propose immédiatement un débat à l'Assemblée sur l'accusation contre Olózaga. Au fur et à mesure des séances, ce dernier met en évidence le caractère infondé des accusations mais ne peut lutter contre la majorité parlementaire appuyant González Bravo et part pour l'Angleterre devant la menace pesant sur sa vie.
===La ''décennie modérée''===
[[Image:Ramon Maria Narvaez.jpg|thumb|right|200px|Le général [[Ramón María Narváez]]]]
La direction du [[Parti modéré (Espagne)|Parti modéré]] revient par la suite à Narváez, qui assume la Présidence du Gouvernement, initiant la période appelée la ''décennie modérée''. Pendant cette période d'une relative stabilité, les ''modérés'' tentent d'annuler les avancées de la régence d'Espartero en matière de libertés, en dictant une [[Constitution espagnole de 1845|nouvelle constitution]], qui revient au modèle de ''souveraineté partagée'' entre le roi et les Cortes, et renforce donc les pouvoirs de la Couronne.
Le Parti Modéré apparaît rapidement comme divisé, provoquant la chute de Narváez. La volonté de Marie-Christine de Bourbon de marier sa fille à l'héritier du trône de France contribue également à jeter le trouble en Espagne, éveillant les suspicions de l'Angleterre, désireuse de maintenir le respect du [[traité d'Utrecht]] et d'éviter l'union des deux nations sous un seul roi. Après les [[accords d'Eu]], le nombre de candidats possibles pour Isabelle se réduit considérablement, et elle choisit son cousin [[François d'Assise de Bourbon]] avec qui elle se marie la même année.
====Succession de gouvernements====
Le gouvernement de [[Francisco Javier de Istúriz]] reste en place jusqu'au {{date|28|janvier|1847}}. Mendizabal et Olózaga, de retour d'exil avec l'autorisation de la reine, mènent une offensive pour le contrôle des Cortes qui l'oblige à démissionner. De janvier à octobre se succèdent trois gouvernements sans ligne politique claire. Les carlistes continuent à poser des problèmes et des émigrés espagnols reviennent d'exil dans l'espoir de voir l'instauration d'un régime libéral.
Le [[4 octobre]], Narváez est de nouveau nommé président et désigne le conservateur [[Juan Bravo Murillo|Bravo Murillo]] pour être son bras droit et ministre des Travaux publics. Le gouvernement est stable jusqu'à ce que la [[Printemps des peuples|révolution de 1848]] qui parcourt l'Europe, menée par le [[mouvement ouvrier]] et la [[bourgeoisie]] libérale, provoque des insurrections en Espagne, qui sont durement réprimées; il se produit de plus une rupture diplomatique avec le [[Royaume-Uni de Grande-Bretagne|Royaume-Uni]], accusé d'avoir participé et aidé la [[Carlisme#Seconde guerre ou des Matiners (1846–1849)|seconde guerre carliste]]. Narváez agit comme un véritable dictateur et affronte la reine, le roi consort, les libéraux et les absolutistes. Cette situation d'affrontement dure jusqu'au {{date|10|janvier|1851}}, date à laquelle il doit démissionner et est remplacé par Bravo Murillo.
Sous le gouvernement conservateur de Bravo Murillo, on assiste à la révélation du haut degré de corruption de l'État, fruit d'une grande croissance économique désordonnée et d'intrigues internes pour tirer profit des concessions publiques, une situation dans laquelle la famille royale elle-même est très gravement impliquée. Bravo Murillo, que beaucoup considèrent comme un honorable serviteur public, démissionne en [[1852]] et trois autres gouvernements lui succédent jusqu'en juin [[1854]]. Pendant ce temps, O'Donnell, de l'entourage de l'ancienne régente Marie-Christine, s'allie aux modérés les plus libéraux et tente d'organiser un soulèvement à l'aide de bon nombre d'officiers et de certains futurs hommes politiques de premier plan comme [[Antonio Cánovas del Castillo]]. Le [[28 juin]], O'Donnell, venu clandestinement à Madrid, s'allie à diverses forces et affronte les troupes fidèles au gouvernement à [[Vicálvaro]], dans une bataille connue sous le nom de ''[[Vicalvarada]]'', sans qu'un camp pût clairement être désigné vainqueur. Tout au long des mois de juin et de juillet, d'autres troupes s'unissent au soulèvement à [[Barcelone]]. Le [[17 juillet]], à Madrid, des civils et des militaires investissent la rue et provoquent une succession d'actes violents, allant jusqu'à mettre en danger la vie de la mère de la reine, Marie-Christine, qui doit chercher refuge. Les barricades et les distributions d'armes donnèrent la victoire à un peuple las de la corruption ambiante.
====Mesures les plus importantes de la ''décennie modérée''====
Afin d'apaiser le conflit avec le [[Saint Siège]], né des processus de [[désamortissement]] menés à terme par [[Juan Álvarez Mendizábal|Mendizábal]] au cours de la période précédente, un concordat avec le pape [[Pie IX]] est signé en [[1851]]. En résumé, il établit une politique de protection des biens de l'[[Église catholique]] qui obtient donc des compensations financières. Il réaffirme de plus le caractère catholique très marqué de la monarchie.
Sur un plan législatif, sont approuvées diverses [[Loi organique|lois organiques]] qui accentuent la centralisation de l'[[administration publique]] par le biais d'un contrôle du pouvoir politique sur les municipalités et les [[université]]s, un moyen d'essayer de contenir les [[Junte|Juntas]] (pouvois exécutifs régionaux), toujours actives, indépendantes et influencées par les libéraux.
===''{{lang|es|Bienio Progresista}}''===
Après quelques tentatives désespérées de la reine pour nommer un président du Conseil des ministres qui maîtrise le désordre ambiant, elle suit finalement les conseils de sa mère et, pour éviter de voir O'Donnell au pouvoir, désigne [[Baldomero Espartero|Espartero]]: ainsi commence ce qui est convenu d'appeler le''{{lang|es|Bienio Progresista}}'' (les ''deux ans progressistes'').
Le {{date|28|juin|1854}}, Espartero et O'Donnell entrent dans Madrid et sont acclamés comme des héros. La reine charge Espartero de former un gouvernement. Ce dernier se voit obligé de nommer O´Donnell ministre de la Guerre en raison de sa popularité et de son autorité chez les militaires. Cette union forcée, dans laquelle chacun semble fidèle à l'autre, ne va pas sans problèmes. Tandis qu'O'Donnel tente de contrer les pratiques libérales d'Espartero sur le plan des relations avec l'Église et le désamortissement, l'ancien régent cherche une voie pour le libéralisme en Espagne, très influencée par sa propre personnalité et les changements qui s'opèrent alors en Europe.
O'Donnel prépare l'ébauche de ce qui sera l'[[Union Libérale (Espagne)|Union libérale]] alors qu'il cohabite au gouvernement avec Espartero. Les élections à l'[[assemblée constituante]] de [[1854]] donnent plus de sièges au premier. Dans ces conditions, il n'est pas étonnant que les tentatives de cohabitation échouent, en particulier sur la question religieuse, au moment du [[désamortissement de Madoz]], et lorsqu'est présenté devant les Cortes un projet de loi visant à établir la [[Liberté de religion|liberté de croyance]]. La proposition est adoptée et les relations avec le Saint Siège rompues; le concordat de 1851 tombe dans l'oubli. Pour O'Donnell, la situation est inacceptable; Espartero en est conscient et s'active en défense du libéralisme, mobilise la [[Milice Nationale]] et la presse contre les ministres modérés. malheureusement pour lui, dans un contexte aggravé par les soulèvement carlistes à [[Valence (Espagne)|Valence]] et une situation économique déplorable, la reine remet la direction du gouvernement à O'Donnell. Les deux camps s'affrontent violemment en pleine rue les [[14 juillet|14]] et [[15 juillet]] [[1856]] et Espartero préfère se retirer.
===Les gouvernements de l'Union libérale===
[[Image:Leopoldo O'Donnell.jpg|200px|right|thumb|Le général O'Donnell fut à l'origine du ''Bieno progresista'' et l'artisan des gouvervements de l'[[Union Libérale]]]]
Une fois nommé président du conseil, O'Donnell restaure la [[Constitution espagnole de 1845|Constitution de 1845]] et essaie de séduire les libéraux. Les luttes entre factions libérales et modérées ainsi que les luttes internes continuent à peser sur le système. Après les évènements de juillet, la faiblesse politique d'O'Donnell amène la reine à rappeler Narváez aux affaires. L'instabilité dure jusqu'en [[1857]]. Avec un nouveau retour d'O'Donnell commence la longue marche des gouvernements de l'Union Libérale.
Le {{date|30|juin|1858}}, O'Donnell forme un gouvernement dans lequel il se réserve le ministère de la Guerre. Le cabinet dure quatre ans et demi, jusqu'au {{date|17|janvier|1863}}, le plus stable de cette période. Malgré quelques changements ponctuels, il ne compte pas plus d'une dizaine de ministres. Les personnes clefs du nouvel exécutif sont les ministres du budget, [[Pedro Salaverría]], chargé de soutenir la reprise économique, et celui de l'Intérieur, [[José de Posada Herrera]], qui contrôle habilement les listes électorales et la discipline des membres du nouveau parti: l'Union Libérale.
La Constitution de 1845 est de nouveau restaurée et les élections générales du {{date|20|septembre|1858}} donnent un contrôle absolu du [[pouvoir législatif]] à l'Union libérale. Les mesures les plus importantes sont les grands investissements dans les travaux publics, avec l'octroi de crédits extraordinaires, qui permettent le développement du chemin de fer et de l'armée; le désamortissement continue, mais l'État rétablit le concordat de 1851 et verse des indemnisations à l'Eglise sous forme de participation à la [[dette publique]]; d'importantes lois sont adoptées pour réformer les administrations centrale et municipales; le premier grand plan national de construction routière est mis en place. Le gouvernement essuie cependant quelques échecs: il ne parvient pas à éliminer la corruption politique et économique qui gangrène tous les échelons du pouvoir; la loi annoncée sur la liberté de la presse n'est pas adoptée et, à partir de [[1861]], les appuis parlementaires se font moins présents.
==== Soulèvements carlistes et paysans====
En [[1860]] se produit le [[soulèvement carliste de San Carlos de la Rápita]], dirigé par le prétendant au trône [[Charles de Bourbon (1818-1861)|Charles de Bourbon]]. Il tente de débarquer depuis les [[Îles Baléares|Baléares]] près de [[province de Tarragone|Tarragone]] l'équivalent d'un régiment de ses fidèles pour entamer une nouvelle [[Carlisme#Les guerres carlistes|guerre carliste]] mais sa tentative se solde par un échec retentissant. On assiste également au [[soulèvement paysan de Loja]] dirigée par le [[vétérinaire]] Rafael Pérez del Álamo; le premier grand mouvement paysan, pour la défense de la terre et du travail, est durement réprimé en peu de temps avec plusieurs [[Peine de mort|condamnations à mort]] à la clef.
==== La politique étrangère ====
Après l'indépendance des pays sud-américains et la défaite de [[bataille de Trafalgar|Trafalgar]], l'Espagne doit faire face à une inévitable remise en question de sa condition de puissance coloniale, et même de sa place en Europe. La France et le Royaume-Uni occupent tout l'espace européen et leurs empires respectifs s'étendent sur tous les continents.
La politique étrangère consiste donc à essayer de maintenir la condition de puissance de second plan de l'Espagne, une tâche rendue difficile par plusieurs éléments. Tout d'abord, le caractère indéfini ou mal défini de l'action internationale espagnole, et ce même pendant la période de gouvernement de l'Union libérale; en second lieu, la tentative de maintenir à travers le globe de nombreux intérêts économiques, nécessitant des forces armées modernes et actives dont ne dispose pas le pays; et enfin, l'indéniable supériorité militaire des Français et des Britanniques.
Le panorama européen a changé. D'un côté, la France et la Grande-Bretagne, loin de s'affronter comme par le passé, se sont alliés et ont aidé Isabelle à se maintenir sur le trône. La [[Prusse]], l'[[Autriche]] et la [[Russie]] sont partisans des carlistes, à qui ils apportent un soutien plus ou moins voilé. Dans ces circonstances, l'Espagne intègre en 1834 la quadruple alliance en même temps que le Portugal avec des conditions limpides: la France et la Grande-Bretagne soutiennent la monarchie isabelline à condition que cette dernière mène une politique étrangère qui leur convienne à tous deux, même si dans le cas où les deux puissances auraient des positions différentes, l'Espagne peut adopter la sienne propre.
Durant les gouvernements de l'Union libérale, l'Espagne, sous la protection et avec le consentement des deux puissances évoquées, se sent capable de récupérer une partie de sa gloire passée. On explique ainsi que certaines actions "de prestige" et d'exaltation patriotique emportent une ferveur considérable: [[Campagne de Cochinchine|expédition franco-espagnole en Cochinchine]] de [[1857]] à [[1862]], participation à la [[guerre de Crimée]], [[guerre d'Afrique]] en [[1895]]. On peut remarquer qu'au cours de cette dernière, O'Donnell obtient un grand soutien populaire et un grand prestige en consolidant les places de [[Ceuta]] et [[Melilla]] (il ne peut cependant prendre [[Tanger]] à cause de pressions anglaises), en participant à l'[[Expédition du Mexique|expédition franco-espagnole au Mexique]], à l'annexion de [[Histoire de la République dominicaine|Saint-Domingue]] en [[1861]] et à la [[guerre hispano-sud-américaine]] en [[1863]].
=== Chute du gouvernement de l'Union Libérale ===
En [[1861]], la politique de harcèlement du gouvernement d'O'Donnell par le parti modéré et le parti progressiste s'accentua fortement. Ils abandonnent l'Union libérale en raison de divergences avec des personnalités aussi importantes que Cánovas, [[Antonio de los Ríos Rosas]] (un des fondateurs) et le général [[Joan Prim]] lui-même, entre autres, au motif récurrent de la trahison des idées qui avaient mené le prestigieux général au pouvoir. Des membres de l'armée et de la bourgeoisie catalane se joignent à eux. Les divergences ne s'apaisent pas avec la démission de Posada Herrera en janvier 1863; le 2 janvier, la reine accepta la démission d'O'Donnell.
===Décadence et fin du règne===
Remplacer O'Donnell n'est pas tâche aisée; les partis traditionnels font face à de nombreux problèmes, rivalités et affrontements internes. Les militants du parti modéré offrent la possibilité de constituer un nouveau gouvernement avec le général [[Fernando Fernández de Córdova]]. Les progressistes, menés par [[Pascual Madoz]], estiment opportune une dissolution des Cortes. La reine confie finalement le gouvernement à [[Manuel Pando Fernández de Pineda]], comte de Miraflores, qui, ne pouvant compter que sur de maigres appuis, ne dure pas au-delà de janvier 1864. Sept autres gouvernements se succèdent jusqu'en 1868, dont un, remarquable, gouverné par [[Alejandro Mon y Menéndez]] et avec Cánovas à l'Intérieur et Salaverría au Budget. Pour leur part, les progressistes estimant que Espartero a fait son temps, Olózaga et Prim mettent en place une alternative pour sortir de cette crise permanente, sans compter sur la reine désavouée.
Narváez forma un gouvernement le {{date|16|septembre|1864}} avec l'intention d'unir les forces et faire naître un esprit permettant l'intégration des progressistes dans la politique active, craignant que la remise en cause du règne aille au-delà. Le refus des progressistes de participer dans un système qu'ils considèrent comme corrompu et caduc entraîne Narváez vers l'autoritarisme et des démissions en rafale au sein de son gouvernement. À tout ceci viennent s'ajouter, au discrédit du gouvernement, les événements de la [[Nuit de Saint-Daniel]] (''{{lang|es|Noche de San Daniel}}'') le {{date|10|avril|1865}}: les étudiants de la capitale protestent contre les mesures d'[[Antonio Alcalá Galiano]], qui tente d'éloigner rationnalisme et [[Panenthéisme|krausisme]] des salles de cours, en maintenant la vieille doctrine de la morale officielle de l'Église catholique, et contre la destitution d'[[Emilio Castelar]] de la chaire d'histoire pour ses articles publiés dans ''La Democracia'', où il annonce la cession du patrimoine royal avec appropriation par la reine de 25% des bénéfices des ventes. La dure répression gouvernementale provoque la mort de treize étudiants.
Un nouveau gouvernement est constitué le 21 juin avec le retour d'O'Donnell. On approuve, entre autres mesures,une nouvelle loi qui permet d'augmenter le corps électoral de {{formatnum:400000}} membres, presque le double du nombre antérieur, et des élections générales sont convoquées. Avant même leur tenue, les progressistes annoncent leur non-participation. Dans ce contexte, le [[soulèvement de Villarejo de Salvanes]], organisé par Prim pour prendre le pouvoir par les armes, échoue en raison d'une planification insuffisante. L'attitude hostile des progressistes provoque un regain d'autoritarisme chez O'Donnell, entraînant le [[soulèvement de la garnison de San Gil]] le 22 juin, de nouveau organisé par Prim, mais qui échoue également et se solde avec plus de soixante condamnations à mort.
O'Donnell se retire épuisé de la vie politique, et est remplacé en juillet par Narváez, qui anulle les peines aux insurgés qui n'ont pas été encore exécutés, mais maintient avec autoritarisme les expulsions des chaires des républicains et krausistes, renforce la censure et le contrôle de l'ordre public. À la mort de Narváez, il est remplacé par l'autoritaire [[Luis González Bravo]], mais la révolution était déjà en marche et la fin de la monarchie arrive avec la [[révolution de 1868]], ''La Gloriosa'', tandis qu'Isabelle part s'exiler en France.
==Bibliographie==
===Bibliographie générale===
* [[Raymond Carr|Carr, Raymond]], ''Historia de España''. Edit. Península-Atalaya. Madrid, 2001. ISBN 84-8307-337-4
* VV.AA. ''Historia contemporánea de España. Siglo XIX''. Edit. Ariel. Madrid, 2004. ISBN 84-344-6755-0
*VV.AA.: ''Enciclopedia de Historia de España''. Alianza Editorial. Madrid, 1991.
===Bibliographie spécifique===
*'''[http://www.ateneodemadrid.com/biblioteca_digital/folletos/Folletos-0100.pdf Azcárate, Gumersindo. ''Olózaga. Origen, ideas y vicisitudes del partido progresista''. Conferencias Históricas. 1886. Ateneo de Madrid].'''
*'''[http://www.biopsychology.org/tesis_pascual/ La desamortización de Mendizabal en la provincia de Zaragoza]'''
*'''[http://hc.rediris.es/01/Numero01.html Los partidos políticos en el pensamiento español, ''de Ignacio Fernández Sarasola en la Revista Electrónica de Historia Constitucional]'''''
*'''[http://www.ucm.es/BUCM/tesis/cps/ucm-t25728.pdf#search=%22%22Baltasar%20Hidalgo%20de%20Quintana%22%22 LA CONFIGURACIÓN DE LA MENTALIDAD MILITAR CONTEMPORANEA Y EL MOVIMIENTO INTELECTUAL CASTRENSE. EL SIGLO CRÍTICO 1800-1900. Tesis doctoral de Pablo González-Pola de la Granja. Universidad Completense de Madrid, 2001.]'''
* '''Burdiel, Isabel'''. ''Isabel II. No se puede reinar inocentemente''. Edit. Espasa-Calpe. Madrid, 2004. ISBN 84-670-1397-4.
*'''Comellas, José Luis'''. ''Historia de España Moderna y Contemporánea''. Madrid, 1975. ISBN 84-321-0330-6
*'''Javier de Burgos, F.''' ''Anales del Reinado de Isabel II''. Madrid, 1850.
*'''Llorca, Carmen'''. ''Isabel II y su tiempo''. Alcoy, 1956.
*'''Martínez Gallego, Francesc A'''. ''Conservar progresando: La Unión Liberal (1856-1868).'' Valencia, 2001. ISBN 84-95484-11-0
*'''Rico, Eduardo G'''. ''La vida y la época de Isabel II''. Edit. Planeta. Barcelona, 1999.
*'''Suarez Cortina, Manuel'''. ''Las máscaras de la libertad. El liberalismo español, 1808-1950''. Madrid, 2003. ISBN 84-95379-63-5
==Voir aussi==
===Article connexe===
*[[Liste des rois d'Espagne]]
===Liens externes===
*{{es}} [http://www.cervantesvirtual.com/historia/monarquia/isabel2.shtml La Monarquía Hispánica. Isabel II en la Biblioteca Virtual Miguel de Cervantes]
*{{es}}[http://www.artehistoria.com/frames.htm?http://www.artehistoria.com/historia/personajes/6589.htm Biografía de Isabel II en Arte Historia]
*{{es}}[http://www.historiasiglo20.org/esp1833-1875/3.htm Cronología del Reinado]
*{{es}}[http://alipso.com/monografias/isabelii/ Monographie sur le règne d'Isabelle I]
====Wikisource====
*{{es}}[http://es.wikisource.org/wiki/Ley_General_de_Caminos_de_Hierro_de_1855 Ley General de Caminos de Hierro de 1855]
*{{es}}[http://es.wikisource.org/wiki/Ley_Moyano_de_Instrucci%C3%B3n_P%C3%BAblica_de_1857 Ley Moyano de Instrucción Pública de 1857]
{{Portail|Cliopédia|Espagne|XIXe siècle}}
[[catégorie:Bourbons d'Espagne]]
[[catégorie:Histoire contemporaine de l'Espagne]]
[[Catégorie:Monarchie espagnole]]
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[[es:Reinado de Isabel II de España]]
[[eu:Isabel II.aren erregealdia]]
[[gl:Reinado de Isabel II de España]]